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L’augmentation de l’espérance de vie est-elle vouée à ralentir au XXIe siècle ?

Ces résultats « suggèrent que la bataille de l’humanité pour une longue vie est en grande partie terminée », conclut l’étude.

Getty Images

L’augmentation de l’espérance de vie, spectaculaire au siècle dernier, ralentit nettement depuis trente ans dans les pays où elle est la plus élevée et ne pourra se poursuivre au XXIe siècle en l’absence de progrès décisifs pour en freiner les effets. de vieillesse, selon une étude démographique publiée lundi.

Jusqu’au milieu du XIXe siècle, l’espérance de vie à la naissance oscillait entre 20 et 50 ans. Au siècle suivant, les progrès de la médecine et de la santé publique « ont produit une révolution de la longévité », rappelle l’étude signée dans Nature Aging par le démographe américain S. Jay Olshansky.

Alors que les humains gagnaient auparavant en moyenne un an d’espérance de vie en un ou deux siècles, ce gain est passé à trois ans d’espérance de vie par décennie au cours du 20e siècle.

Mais cette progression a-t-elle une limite ? En France, où l’ancienne doyenne de l’humanité Jeanne Calment serait décédée à 122 ans, l’espérance de vie à la naissance en 2019 était de 79,7 ans pour les hommes et de 85,6 ans pour les femmes.

Dès 1990, des chercheurs, notamment le professeur Olshansky, prédisaient une limite au progrès médical face au vieillissement. D’autres ont au contraire défendu l’absence théorique de plafond biologique.

“Nous ne pouvons plus réaliser des gains significatifs en matière d’espérance de vie en nous basant sur la réduction des maladies”, a-t-il déclaré à l’AFP.

« Compression de la mortalité »

En basant sa démonstration sur les statistiques des huit pays ayant la plus longue espérance de vie à la naissance (Australie, Corée du Sud, Espagne, France, Italie, Japon, Suède, Suisse) sur la période 1990-2019.

Leurs populations peuvent espérer vivre en moyenne 6,5 ans de plus s’ils sont nés en 2019 plutôt qu’en 1990. Un gain bien inférieur à celui enregistré sur la période précédente.

Ces résultats « suggèrent que la bataille de l’humanité pour une longue vie est en grande partie terminée », conclut l’étude. Même si une majorité de pays dans le monde attendent encore de bénéficier des avancées en matière de santé publique dont ont bénéficié les plus riches.

La lutte pour l’espérance de vie est aujourd’hui simplement victime de la “loi des rendements décroissants”, explique à l’AFP le démographe et épidémiologiste Jean-Marie Robine, qui n’a pas participé à l’étude.

Les progrès enregistrés au XXe siècle résultent avant tout d’une réduction drastique de la mortalité infantile. Or, en la réduisant « on fait immédiatement des gains considérables en espérance de vie », rappelle ce directeur de recherche émérite à l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm).

« Et puis progressivement, on commencera à réduire la mortalité à l’âge mûr » et à faire des gains sur celle des seniors après la Seconde Guerre mondiale, au point qu’aujourd’hui « peu de gens meurent avant 70 ans ». En fin de compte, les populations bénéficient d’une « compression de la mortalité » vers une tranche d’âge plus élevée. Autrement dit, une « réduction des inégalités sociales face à la mort ».

Le plafond de la « fragilité »

La marge de progrès restante est encore plus réduite, selon l’étude. Dans les pays considérés, il faudrait réduire la mortalité, toutes causes et à tous âges, d’environ 20 % pour que l’espérance de vie des femmes à la naissance passe de 88 à 89 ans.

Pour les populations nées en 2019, les chances de survie jusqu’à 100 ans ne concernent que 5,1 % des femmes et 1,8 % des hommes.

Ce qui fait dire à S. Jay Olshansky que « la porte qui nous reste ouverte est celle de la science gérontologique ». Et qu’en l’absence d’avancée dans ce domaine il vaudrait mieux privilégier « la durée de vie en bonne santé que l’espérance de vie ».

Jean-Marie Robine, de son côté, constate qu’il reste du « grain à moudre » pour réduire la mortalité entre 75 et 95 ans.

Au-delà, il fait le pari que si « nous sommes bloqués par la fragilité des personnes âgées, ce n’est pas parce que nous le sommes aujourd’hui que nous le serons indéfiniment ».

“Nous n’avons jamais eu autant de laboratoires et de chercheurs, publics ou privés, à la recherche de solutions” à la “fragilité” des personnes âgées, qui les rend vulnérables aux “événements extrêmes”.

Et donc « l’idée que nous sommes au bout du progrès est une illusion », selon lui.

(AFP)

 
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