Gaia, le formidable observatoire spatial de l’Agence spatiale européenne chargé de cartographier notre Voie lactée, tire aujourd’hui sa révérence après 12 ans de bons et loyaux services. La fin d’une belle épopée scientifique qui a permis à l’humanité d’appréhender son voisinage cosmique sous un nouvel angle.
Cet appareil lancé en décembre 2013 depuis le port spatial Europe, en Guyane française, commence en effet à manquer de ressources. Il consomme environ 12 grammes d’azote liquide chaque jour depuis plus d’une décennie pour naviguer avec une précision remarquable, et ce réservoir est désormais presque vide. Malheureusement, sa roue de réaction – le dispositif qui permet aux vaisseaux spatiaux de se réorienter sans utiliser de carburant – n’est pas capable d’accomplir cette tâche à elle seule, ce qui signifie que Gaia a effectué ses toutes dernières observations scientifiques le 10 janvier dernier.
Le fait que cet appareil ait survécu aussi longtemps est une réussite en soi. Gaia était initialement censé cartographier notre galaxie pendant 5 ans. Son espérance de vie a plus que doublé. grâce à la planification extrêmement rigoureuse de ses opérateurs, mais aussi parce qu’il s’est avéré bien plus résistant que prévu aux impacts de micrométéorites et aux tempêtes solaires qui auraient pu le mettre hors service.
UN ” machine de découverte » sans équivalent
Durant ces douze années, la sonde accomplit un travail gigantesque en construisant la carte la plus grande et la plus précise de la Voie lactée à ce jour. Au total, elle a réalisé plus de 3 000 milliards d’observations et documenté 2 000 milliards d’étoiles différentes, pour un total de plus de 142 To de données brutes qui ont alimenté plus de 13 000 publications scientifiques !
Grâce à ces contributions, Gaia a a complètement changé notre compréhension de la structure, de la dynamique et de l’histoire de la galaxie. « Gaia a changé notre perception de la Voie Lactée », explique Stefan Payne-Wardenaar, responsable de la visualisation scientifique à la Maison de l’astronomie allemande. ” Même les idées de base ont été révisées, comme la rotation de la barre centrale de notre galaxie, la déformation du disque, la structure détaillée des bras spiraux et la poussière interstellaire près du Soleil. »
« Les données collectées par Gaia nous ont permis d’acquérir des connaissances uniques sur l’origine et l’évolution de notre galaxie, la Voie Lactée, et ont également transformé l’astrophysique et la science du système solaire d’une manière que nous n’avons pas encore pleinement appréciée. Gaia laissera un héritage durable aux générations futures », ajoute l’astrophysicien Johannes Sahlmann dans un communiqué de l’ESA.
Encore des données en stock
Et le plus impressionnant, c’est que ces progrès déjà formidables ne reposent que sur les premières années d’observation. Cela signifie qu’il existe encore des tas de données qui n’ont pas encore été révélées ni même exploitées. La publication imminente du prochain jeu de données, sobrement appelé Données Gaia version 4, est très attendu par la communauté scientifique.
Et à plus long terme, il reste aussi une montagne de données sur lesquelles les spécialistes n’ont pas encore eu le temps de se pencher. Il y a fort à parier qu’une fois traités, ils alimenteront à nouveau une foule de découvertes remarquables. Une perspective évidemment très excitante pour les astronomes et tous les amoureux de l’espace.
« Gaia a été LA machine à découverte de cette décennie, et cette tendance est là pour rester », conclut Anthony Brown, le patron du groupe néerlandais chargé du traitement des données collectées par la machine.
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