Au Sénégal, la contraception est principalement utilisée par les femmes et les filles célibataires, et les pilules et solutions injectables restent les méthodes les plus courantes. C’est ce qu’a souligné Ramatoulaye Diouf Samb, sage-femme et responsable de l’information et de la communication de l’Association nationale des sages-femmes du Sénégal.
Pouvez-vous faire le point sur la pratique de la planification familiale au Sénégal, en particulier les dernières données ?
Les dernières Enquêtes Démographiques et de Santé (EDS) de 2023, réalisées par l’Agence Nationale de la Statistique et de la Démographie (ANSD), montrent qu’au Sénégal, 27% des femmes en âge de procréer, âgées entre 15 et 49 ans et cohabitant, utilisent au moins une méthode contraceptive moderne. Chez les femmes célibataires, ce taux atteint 42 %. La prévalence des contraceptifs est plus élevée chez les femmes célibataires et sexuellement actives. Il convient de noter que ce taux varie selon les régions : en milieu urbain, il est de 34 %, contre 20,4 % en milieu rural.
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Quelles sont les méthodes de planification familiale existantes et les plus utilisées au Sénégal ?
Il existe plusieurs méthodes de planification familiale au Sénégal : les pilules, à prendre quotidiennement ; injectables, administrés tous les trois mois ; l’implant, valable trois ans avec des suivis réguliers (1 mois après l’injection, puis 6 mois plus tard, puis un suivi annuel) ; le dispositif intra-utérin, positionnable pour une durée de 12 ans, généralement choisi par les femmes multipares ou hypertendues ; l’anneau vaginal à la progestérone, testé mais retiré par les établissements de santé publique ; préservatifs, féminins et masculins ; la méthode LAMA (Méthode de Lactation et Aménorrhée), très répandue chez les femmes, mais à haut risque, car seulement 2% des femmes réussissent avec cette méthode ; la méthode des jours fixes ou collier cycle, composé de perles pour signaler la période fertile (perles blanches) et la période stérile (perles brunes), ainsi que d’une perle rouge pour signaler le premier jour des règles.
Les femmes peuvent également recourir à des méthodes d’observation, basées sur la mesure quotidienne de la température corporelle, pour déterminer la période d’ovulation. Enfin, il existe la ligature des trompes, souvent pratiquée chez les femmes multipares, et la contraception d’urgence, de plus en plus utilisée par les jeunes filles.
Bien qu’il n’existe pas encore d’étude spécifique indiquant quelle méthode est la plus utilisée au Sénégal, on constate que les pilules, notamment combinées, sont très appréciées des femmes. Dans nos établissements de santé, les pilules et injectables sont les plus demandés.
L’implant est-il considéré comme une méthode « à risque » ?
L’implant est une méthode contraceptive à long terme. Injecté sous la peau, il libère des hormones, principalement des progestatifs. Il est accessible, utile et efficace. Même si cette méthode n’est pas gratuite, elle reste abordable, coûtant moins de 500 francs CFA, et l’installation est gratuite. Des journées spéciales planning familial sont organisées pour proposer gratuitement certaines méthodes. Nous veillons à n’imposer aucune méthode, mais à informer les femmes et à les accompagner dans leur choix, en fonction de leur état de santé. Certaines femmes signalent des effets secondaires tels que des douleurs abdominales pendant les règles, une interruption des règles ou des changements de poids. Cependant, ces effets sont généralement gérables.
Que pouvez-vous dire des effets secondaires de la planification familiale ?
Il est vrai que quel que soit le choix, des effets secondaires peuvent survenir, mais ils sont généralement gérables. Lorsque les femmes viennent en consultation, nous leur expliquons qu’il existe des effets secondaires possibles, comme des maux de tête, des douleurs abdominales ou encore des saignements. Ces symptômes sont temporaires et peuvent être soulagés. En revanche, certains effets négatifs sont souvent amplifiés par les rumeurs. Nous aidons les femmes à comprendre ces effets et à prendre une décision éclairée. En cas de doute, si le premier contact se passe bien, ils acceptent plus facilement les conseils. Nous avons des stratégies de communication pour soutenir les femmes tout au long de leur parcours contraceptif.
Comment accompagnez-vous les femmes dans le choix de leur méthode contraceptive ?
Nous utilisons une disquette qui présente les critères médicaux d’adoption des méthodes contraceptives. Ce disque est basé sur les directives de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) et facilite notre travail en rendant l’orientation plus rapide et plus efficace.
Les hommes adhèrent-ils de plus en plus à la planification familiale ?
Des progrès considérables ont été réalisés à Dakar, même s’il existe encore des résistances, notamment de la part de certains maris. Dans les zones rurales, des obstacles demeurent. Cependant, nous constatons que la prise de conscience progresse.
Existe-t-il des risques pour la santé associés à la planification familiale pour les filles hors mariage ?
Non, il n’y a pas de risques spécifiques. Nous avons lancé une politique pour soutenir les adolescentes, les mettre à l’aise et éviter de les stigmatiser. Le but est de prévenir les grossesses non désirées et d’éviter de prendre la pilule du lendemain de manière anarchique. Une mauvaise planification peut entraîner des complications, comme une mauvaise prise de la pilule du lendemain, qui pourraient affecter la fertilité future. Nous sensibilisons les filles et les femmes, notamment dans les écoles, pour prévenir ces comportements.
Quant au coût, la pilule coûte 100 francs CFA dans les formations sanitaires, mais peut atteindre 400 francs CFA dans les pharmacies privées. De bons soins et une meilleure information sur la contraception permettront d’éviter des situations problématiques.
Commentaires recueillis par Mariama DIEME