Le 51ème État ? Si simple, mais si compliqué…

Le Canada peut-il devenir le 51e L’État des États-Unis comme l’a « suggéré » Donald Trump ? En termes de procédure, ce serait facile. Mais sur le plan politique, ce serait bien plus compliqué.

Publié à 6h00

La procédure est simple, le chemin est clairement balisé et il a déjà été emprunté pas moins de 37 fois. Elle est régie par l’Article IV, Section 3, Clause 3 de la Constitution américaine, connue sous le nom de « Clause d’admission ».

« De nouveaux États peuvent être admis par le Congrès dans l’Union ; mais aucun nouvel État ne sera formé […] sans le consentement des législatures des États concernés, ainsi que du Congrès. »

Il suffirait donc que le corps législatif du nouvel État formule et approuve une demande et que le Congrès de Washington la ratifie.

C’est évidemment là que commencent les complications. Cet article de la Constitution américaine était principalement utilisé pour faire intervenir des « territoires organisés ». Des territoires alors peu peuplés, notamment à l’Ouest, et auxquels le Congrès avait donné une forme de gouvernement à l’autonomie limitée. Ils sont devenus plus peuplés et ont voulu devenir de véritables États.

Il suffit donc d’un vote du Congrès, seul organe habilité à déterminer les conditions d’adhésion. Du côté américain, c’est donc très simple d’un point de vue juridique.

Politiquement, c’est une autre affaire. Aucun État n’a été admis dans l’Union depuis Hawaï en 1959. Depuis lors, les présidents ont défendu l’admission de Porto Rico ou du District de Columbia (la ville de Washington).

En effet, l’admission de nouveaux États modifierait l’équilibre fragile des partis politiques au Congrès.

Un nouvel Etat, c’est deux nouveaux sénateurs dans une institution où les majorités sont souvent très faibles. Quant à Porto Rico et au District de Columbia, cela signifierait probablement quatre nouveaux sénateurs démocrates. Aujourd’hui, cela ferait basculer le contrôle du Sénat actuellement en faveur des Républicains.

Mais l’admission du Canada comme 51e L’État dépendrait également d’une série de décisions politiques qui devraient être prises au Canada avant toute autre étape.

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Premièrement, nous devrions nous entendre sur l’euthanasie du pays appelé Canada. Avec les mêmes partenaires qui, il y a quelques années, ne parvenaient pas à s’entendre sur l’existence du Québec comme « société distincte » !

Si l’on suit la jurisprudence de la Cour suprême, il faudrait donc un amendement constitutionnel – à l’unanimité des provinces ! – confirmant légalement la fin du pays souverain appelé Canada.

Même si cela était unanime, une toute autre série de questions se poseraient inévitablement : le Canada tout entier chercherait-il à être admis en tant qu’État unique ? Le Canada deviendrait alors l’État le plus grand et le plus peuplé des États-Unis (40,1 millions de Canadiens pour 38,9 millions de Californiens). Que diraient les Américains ?

Certaines provinces voudront sans doute rejoindre l’Union individuellement plutôt qu’un seul État appelé Canada. Mais, du point de vue américain, que pensons-nous de l’ajout de 10 États ? Alors, 20 nouveaux sénateurs, dont la majorité serait plutôt à gauche ? Même Donald Trump s’en inquiéterait !

Le Québec voudra sans doute relancer le débat sur son avenir, plutôt que de se joindre au creuset Américain. Mais comment fait-on cela ? Avec un référendum sur la souveraineté ? Et que se passerait-il si la réponse était non ?

Certaines provinces – les Maritimes, par exemple – voudraient-elles s’unir ? D’autres provinces ne tenteraient-elles pas de conserver la souveraineté canadienne même si l’une des parties choisissait de se joindre aux États-Unis ? Toutes ces questions sont légitimes.

Autre question très délicate à considérer : la langue. Le Canada est un pays qui a deux langues officielles alors que les États-Unis n’en ont pas une.

En effet, nos voisins n’ont jamais réussi à adopter une loi qui aurait fait de l’anglais la langue officielle du pays, malgré plusieurs projets de loi qui ont été proposés en ce sens. C’est un débat qui a toujours été plus déchirant qu’on pourrait le penser à première vue.

Les États et le gouvernement fédéral fournissent des services dans leur langue aux citoyens qui parlent peu ou pas anglais. Toujours avec la mention « dans la mesure du possible », donc sans obligation légale.

Alors, quelle serait la place du français si tout le Canada rejoignait le pays de Donald Trump ? Toutes les lois du Congrès adoptées dans les deux langues ? Sérieux ? Notez que nous pourrions fournir les traducteurs…

 
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