La maison mère du réseau social se tourne vers la plus haute instance judiciaire américaine après le rejet de son appel par la cour d’appel de Washington.
TikTok déterre la hache de guerre. Le réseau social a indiqué vendredi 6 décembre son intention de porter l’affaire devant la Cour suprême des Etats-Unis pour bloquer l’application d’une loi votée au Congrès américain obligeant ByteDance, sa maison mère, à le vendre. Cette démarche, communiquée à l’AFP par un porte-parole de la plateforme, sera lancée en réponse au rejet, le même jour, par une cour d’appel de Washington, d’un recours contre l’entrée en vigueur du texte adopté en avril.
Interrogé par l’AFP, le groupe a indiqué qu’il porterait l’affaire devant la Cour suprême, « qui a démontré sa capacité à protéger la liberté d’expression des Américains ». Mais même en cas de renvoi, rien ne garantit que la plus haute juridiction américaine accepterait d’examiner l’affaire. Avec cette loi, adoptée à une large majorité incluant des élus des deux bords, le Congrès visait à prévenir les risques d’espionnage et de manipulation des utilisateurs de la plateforme par les autorités chinoises.
TikTok, qui revendique 170 millions d’utilisateurs actifs aux Etats-Unis, a nié à plusieurs reprises avoir transmis des informations au gouvernement de Pékin et a assuré qu’il refuserait toute éventuelle demande à cet égard. ByteDance, la société mère de TikTok, a déclaré qu’elle n’avait pas l’intention de brader sa précieuse application. S’adresser au tribunal est donc sa seule option pour survivre aux Etats-Unis. Dans sa procédure d’appel, TikTok cherchait principalement à démontrer que la loi violait le droit à la liberté d’expression, garanti par la Constitution américaine.
Mais les juges de la cour d’appel ont statué que la loi visait à lutter contre le contrôle par une entité non américaine et l’éventuelle collecte de données par les autorités chinoises, mais n’aurait aucun effet sur le contenu publié sur le réseau social. « Le gouvernement ne supprime pas de contenu ni ne demande un certain type de contenu »ont écrit les juges dans leur décision, publiée vendredi, estimant qu’il n’y avait donc aucun risque d’entrave à la liberté d’expression. “Le contenu pourrait, en principe, rester le même après un transfert”estiment les magistrats.
-Donald Trump, un sauveur ?
« Cette décision est une victoire pour le peuple américain et les utilisateurs de TikTok et une défaite pour le Parti communiste chinois (PCC) »a réagi John Moolenaar, élu républicain à la Chambre des représentants et président de la commission spéciale sur le PCC. Le salut du réseau social pourrait venir du président élu Donald Trump qui, en juin, avait promis de « sauvez TikTok » et serait opposé à une vente forcée ou à une interdiction. Le Républicain ne s’est pas exprimé sur le sujet depuis son élection.
« Je suis optimiste que le président Trump facilitera l’acquisition de TikTok par une entité américaine pour permettre la poursuite de son utilisation aux États-Unis »a expliqué John Moolenaar. En août 2020, Microsoft s’est associé à Walmart pour formuler une offre de rachat de la plateforme, que ByteDance avait déclinée. Quelques semaines plus tard, le groupe spécialisé dans l’informatique à distance (cloud) annonçait un accord avec TikTok portant sur une participation minoritaire de 12,5%, qui ne s’est jamais concrétisé.
Mauvaise nouvelle pour le marketing
Depuis que la loi a été votée au Congrès, plusieurs investisseurs ont manifesté leur intérêt pour une acquisition de TikTok, notamment l’ancien secrétaire au Trésor américain Steven Mnuchin et l’homme d’affaires Frank McCourt. “Empêcher l’application (de la loi) est plus facile à dire qu’à faire”a prévenu Jasmine Enberg, analyste chez Emarketer. “Et même si (Donald Trump) parvenait à sauver TikTok, il a déjà changé de position sur le sujet et rien ne dit qu’il ne l’attaquerait pas par la suite.”
L’ancien et le prochain président américain avaient en effet cherché à interdire TikTok par décret en 2020, mais ceux-ci ont été bloqués par la justice américaine, préoccupée par une potentielle violation de la liberté d’expression. Sauf invalidation ou rachat, « l’interdiction de TikTok (…) fera taire 170 millions d’Américains (…) le 19 janvier 2025 »a prévenu un porte-parole du réseau social. Pour Damian Rollison, du cabinet de marketing SOCi, la disparition de ce réseau social aux Etats-Unis aurait des conséquences majeures pour les annonceurs et les entreprises, notamment les PME qui font la promotion de leurs produits sur la plateforme. «Ils devraient rapidement se tourner vers des alternatives comme Instagram ou YouTube Shorts»selon lui.