Des militants condamnés à Hong Kong

Des dizaines de militants pro-démocratie ont été condamnés mardi à de longues peines de prison pour « subversion » à Hong Kong. Ils ont été arrêtés à la suite de l’adoption d’une loi controversée sur la sécurité nationale.

Ce que vous devez savoir

  • Quarante-cinq militants pro-démocratie accusés de « sédition » ont été condamnés à de lourdes peines de prison.
  • Ils ont participé aux primaires en 2020 pour désigner les candidats les plus susceptibles d’être élus au Conseil législatif et tentent de se placer en position de force, suscitant la désapprobation des autorités proches de Pékin.
  • Selon plusieurs experts, la loi sur la sécurité nationale utilisée pour les condamner a progressivement érodé les libertés fondamentales dont disposaient les habitants de l’ancienne colonie au moment de sa rétrocession à la Chine.

Le gouvernement chinois, qui a imposé cette loi en 2020 pour renforcer son contrôle sur l’ancienne colonie britannique et mettre fin à d’importantes manifestations, a salué cette décision comme la preuve que l’État de droit fonctionne bien.

Au lieu de cela, les critiques de Pékin y voient une preuve supplémentaire que les droits étendus dont les résidents de Hong Kong étaient censés bénéficier en vertu du principe « un pays, deux systèmes » ont été largement érodés.

Jeff Wasserstrom, expert de la région à l’Université de Californie à Irvine, estime que l’application généralisée de la loi sur la sécurité nationale a privé le territoire de son caractère exceptionnel par rapport à la Chine continentale.

Les différences qui existaient en matière de liberté d’expression, de liberté de la presse ou de liberté d’association « ont complètement disparu ou sont marginales », constate le chercheur.

“Le message envoyé par ces peines de prison, c’est qu’on ne peut pas faire confiance à la Chine pour tenir parole alors qu’elle a promis de respecter les droits du peuple de Hong Kong pendant 50 ans” après la rétrocession de la colonie en 1997, souligne Guy Saint-Jacques, ancien Ambassadeur du Canada en Chine.

« La notion de sécurité nationale est tellement vague que les habitants peuvent être condamnés pour n’importe quoi », note l’ancien diplomate.

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PHOTO TYRONE SIU, REUTERS

De nombreux diplomates étrangers se sont rendus mardi au palais de justice de West Kowloon.

Benedict Rogers, de l’organisation Hong Kong Watch, note que les peines annoncées mardi “sont épouvantables”, mais peu surprenantes en raison de l’influence des autorités prochinoises sur les tribunaux.

“La possibilité qu’ils prononcent des peines contraires à la volonté de Pékin dans ce type d’affaires appartient pratiquement au passé”, a-t-il déclaré.

« Subversion »

Les militants étaient accusés d’avoir « comploté » pour renverser l’État en tentant d’obtenir une majorité au Conseil législatif de Hong Kong qui leur permettrait de bloquer les ordres de Pékin.

En 2020, ils ont organisé des primaires auxquelles ont participé des centaines de milliers de personnes dans l’espoir d’identifier les candidats les plus susceptibles d’obtenir le soutien populaire.

“L’idée était de rassembler toutes les forces démocratiques dans un acte final de résistance”, note M. Wasserstrom, qui ne voit rien de “subversif” dans cette action par les urnes.

« Le projet n’a de toute façon pas pu être tenté puisque les élections ont été retardées à cause de la pandémie », souligne le chercheur.

Les arrestations de 47 militants en lien avec les primaires, survenues en février 2021, ont permis de « retirer brutalement de la circulation les principales figures de l’opposition » et de mettre gravement à mal le mouvement de contestation qui avait secoué l’ancienne colonie.

Parmi les personnes condamnées figure Benny Tai, un avocat qui avait déjà été emprisonné pour avoir participé à des manifestations en 2014 dans le cadre de la « Révolution des parapluies ». Il a été condamné à 10 ans de prison après avoir été présenté comme le cerveau du « complot ».

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PHOTO PHILIP FONG, ARCHIVES AGENCE -PRESSE

Benny Tai, en 2019

Un autre militant bien connu, Joshua Wong, connu comme l’un des leaders étudiants du mouvement pro-démocratie, a été condamné à une peine de quatre ans et demi.

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PHOTO KIN CHEUNG, ARCHIVES PRESSE ASSOCIÉE

Joshua Wong, en 2019

Parmi les autres personnes condamnées, figurent des journalistes, des avocats, des élus locaux et des syndicalistes, âgés de 27 à 68 ans.

Plus d’une trentaine avaient plaidé coupable dans l’espoir d’obtenir une réduction de peine, et 14 ont été condamnés en mai à l’issue de leur procès.

Gwyneth Ho, qui a filmé plusieurs manifestations en 2019, a indiqué, dans une déclaration publique relayée par l’Agence France-Presse, que son procès avait des connotations de 1984en référence au célèbre roman de George Orwell.

Une répression qui coûte cher à la Chine

Le recours à la loi sur la sécurité nationale par les autorités locales inquiète le monde des affaires et les expatriés et pousse les entreprises à se délocaliser ailleurs en Asie, souligne M. Saint-Jacques.

Nous assisterons certainement à davantage de départs à mesure que la situation continue de se détériorer. L’État de droit et l’ouverture de Hong Kong ont été les clés de son succès.

Benedict Rogers, de l’organisation Hong Kong Watch

M. Wasserstrom souligne que le tourisme a fortement chuté, en partie à cause de la pandémie, et qu’il tarde, dit-il, à se rétablir alors que les autorités s’efforcent de présenter l’ancienne colonie comme un endroit « heureux ».

Un porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères, Lin Jian, a déclaré mardi lors d’un point de presse que les pays occidentaux s’efforçaient de « diffamer » Hong Kong et son système judiciaire en « utilisant » le procès des militants.

“Personne ne devrait pouvoir utiliser la “démocratie” comme prétexte pour se livrer à des actions illégales et tenter d’échapper à la justice”, a-t-il souligné.

 
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