L’Observatoire Vera C. Rubin bientôt prêt à sonder le côté obscur de l’Univers

L’Observatoire Vera C. Rubin bientôt prêt à sonder le côté obscur de l’Univers
L’Observatoire Vera C. Rubin bientôt prêt à sonder le côté obscur de l’Univers

Ici comme ailleurs, les équipes de recherche préparent minutieusement l’ouverture de l’Observatoire Vera C. Rubin, prévue pour 2025.

Sur la crête du Cerro Pachón, au Chili, on peut désormais admirer la silhouette imposante de l’observatoire américain Vera C. Rubin. Prévue en 1996, sa construction a débuté en 2015 et ne s’achèvera que cette année. Cet observatoire a nécessité plusieurs prouesses techniques, dont la fabrication de la caméra astronomique la plus grande et la plus sensible jamais construite ! De la taille d’une petite voiture, avec ses 3,2 milliards de pixels, il sera capable de détecter un large spectre de longueurs d’onde, allant de l’ultraviolet à l’infrarouge.

D’abord nommé LSST (Large Synoptic Survey Telescope), l’observatoire a finalement été baptisé Vera C. Rubin en l’honneur de cette astrophysicienne américaine décédée en 2016, pionnière dans l’étude de la matière noire. Il a été conçu dans le but de lever le voile sur la matière noire et l’énergie noire. Ceux-ci, bien qu’invisibles, constituent 96 % de l’Univers, et restent les plus grands mystères de l’astronomie actuelle.

Avant même de produire ses premières images, l’observatoire suscite déjà beaucoup d’intérêt au sein de la communauté scientifique. “C’est extrêmement excitant!” » s’enthousiasme Yashar Hezaveh, cosmologue et professeur de physique à l’Université de Montréal. Avec ses collègues, dont la cosmologiste Laurence Perreault-Levasseur, il travaille déjà d’arrache-pied à concevoir des méthodes d’analyse des données futures.

A partir de 2025, l’observatoire entamera une surveillance céleste sans précédent : le Enquête héritée de l’espace et du temps. Toutes les 3 à 4 nuits, pendant une décennie, il produira un relevé complet du ciel de l’hémisphère sud. Sa caméra spécialement conçue pour détecter les objets qui changent de luminosité ou de position (comme les supernovas) fera office de véritable montre astrale. Il émettra une alerte pour signaler tout changement – ​​nous en attendons plus de 10 millions par nuit !

« Avant, nous pouvions suivre des objets assez petits, comme une étoile ou une galaxie lointaine. Mais aucune étude du ciel n’était disponible à grande échelle », explique Yashar Hezaveh.

Comme Vera Rubin avant lui, cette chercheuse s’intéresse particulièrement à la matière noire, cette sorte de colle invisible qui maintient les galaxies ensemble. Il espère notamment cartographier sa répartition pour en savoir plus sur ses propriétés fondamentales.

Mais étudier la matière noire demande une certaine dose de créativité : comme elle n’interagit pas avec la lumière, elle est indétectable par nos appareils de mesure. Or on sait qu’il a une masse, donc qu’il exerce des effets gravitationnels sur ce qui l’entoure. Et ce sont les effets que nous suivons.

La plus grande caméra astronomique du monde dispose de six filtres qui peuvent être changés automatiquement 5 à 15 fois par nuit. Photo : Jacqueline Ramseyer Orrell/Laboratoire national des accélérateurs du SLAC

Aide des lentilles

Ainsi, pour le cartographier, il faut observer ses effets sur la lumière à l’aide de « lentilles gravitationnelles ». Ces derniers sont des corps célestes massifs, comme les galaxies, dont le champ gravitationnel dévie de sa trajectoire la lumière émise par une source lointaine. Résultat : lorsque l’on observe une source lumineuse à travers une « galaxie lentille », on ne voit pas une seule image, mais plusieurs images déformées, disposées dans un halo lumineux appelé « anneau d’Einstein ».

Cependant, la matière noire contenue dans une galaxie lentille exerce également un effet gravitationnel sur la lumière. Elle laisse une empreinte très nette sur l’anneau d’Einstein, ce qui permet de déduire sa répartition dans la galaxie.

Le problème est qu’il est très peu probable de trouver une galaxie lentille : l’alignement entre la source lumineuse, la galaxie et le télescope doit être parfait. En règle générale, il faut scanner un million de galaxies pour en trouver une seule. « Jusqu’à présent, seules quelques centaines de lentilles gravitationnelles ont été identifiées. Mais avec cet observatoire et ses enquêtes récurrentes, nous envisageons d’en identifier près de 200 000 ! » s’exclame Yashar Hezaveh.

Les images des anneaux d’Einstein obtenues grâce aux nouvelles lentilles gravitationnelles permettront également à l’équipe de l’Université de Montréal d’estimer le taux d’expansion de l’Univers, un sujet très brûlant en cosmologie. L’énergie sombre, force qui accélère l’expansion du cosmos, sera étudiée par d’autres équipes grâce aux nombreuses supernovas qui seront détectées par la caméra – ces « bougies » permettent de calculer précisément les distances astronomiques et donc l’expansion du cosmos. Univers.

Le défi de l’analyse

Afin de passer au crible la masse de données qui seront générées, l’équipe de l’Université de Montréal a désormais recours à l’intelligence artificielle (IA). Et grâce à l’expertise québécoise en IA, l’équipe est en bonne position pour perfectionner les méthodes numériques nécessaires aux calculs.

Sur dix ans, l’Observatoire Vera C. Rubin devrait produire 60 pétaoctets de données (il faudrait environ 70 000 ordinateurs portables pour tout stocker !). Qui sait ce qu’une telle quantité d’informations pourrait révéler ? « Les données seront un peu comme un coffre au trésor pour les astronomes et les cosmologues », conclut avec philosophie Yashar Hezaveh. Nous étudions [la matière noire], un inconnu connu. Mais je crois que les découvertes les plus intéressantes concerneront des inconnues… des inconnues ! »

Vue large de la monture du télescope, à l’intérieur du dôme. Photo : H. Stockebrand/RubinObs/NSF/AURA

 
For Latest Updates Follow us on Google News
 

PREV Les nouilles, un phénomène culinaire en pleine croissance au Maroc
NEXT Cyril Lignac lui vole sa place