Le Tribunal administratif du Québec vient de trancher le litige opposant une agence viticole montréalaise qui exploitait également une buvette à la Régie des alcools, des courses et des jeux du Québec (RACJ) : Boires perd définitivement son permis.
L’histoire a fait les manchettes l’année dernière parce que Québec, par l’intermédiaire de la RACJ, a remis en question une interprétation de ce nouveau modèle d’affaires de type marchand de vins qui s’est développé pendant la pandémie. En 2021, Boires a ouvert un petit établissement où l’on pouvait s’attabler pour prendre un café ou un verre de vin, avec une carte succincte, mais qui contenait des plateaux de charcuterie et autres snacks pour accompagner la boisson.
L’automne dernier, la RACJ lui a révoqué son permis de restaurant. Boires est une agence qui représente les vignerons, mais qui possédait également une succursale sur le boulevard Saint-Laurent à Montréal pour le service. Dans ce lieu dédié aux vins naturels, les amateurs pouvaient acheter des bouteilles à l’unité et même à la caisse à emporter, à condition d’acheter également des plats préparés sur place.
La Régie a contesté le modèle économique de cet établissement, soulignant le fait que la vente d’alcool jouait un rôle prépondérant et celle de nourriture, un rôle supplémentaire – certains clients achetant un paquet de noix ou de pop-corn pour repartir avec plusieurs bouteilles.
Selon elle, cela n’est pas conforme au permis de restaurant. Environ 80 % du volume d’affaires de Boires provient de la vente d’alcool, a-t-on estimé au cours du processus.
S’ensuit une bataille menée par l’entrepreneur Charles Landreville, fondateur de l’agence Boires, qui souhaite notamment qu’on comprenne mieux son modèle d’affaires. L’établissement a également tenté de modifier l’obligation de consommer un « repas » par « nourriture » et pour le commerçant de pouvoir vendre des bouteilles de vin à emporter à un prix différent de ceux consommés sur place.
Dans cette lutte, Charles Landreville voulait essentiellement légitimer un nouveau type d’établissement centré sur le vin.
Restaurateur expérimenté et désormais vigneron, David McMillan s’est comporté en expert dans cette histoire, à la demande de Boires, afin de mieux définir la personnalité d’une buvette ou encore d’une « vinothèque », bref des établissements où le vin est le personnage principal. .
Selon David McMillan : « En matière de ventes, il est possible qu’un restaurant de vins vende plus de vin que de nourriture. Dans certains cas, l’offre de vins peut être plus prédominante que l’offre de restauration dans ce type de restaurant, en mettant l’accent sur l’expérience œnologique plutôt que sur la restauration traditionnelle », a déclaré M. McMillan qui a néanmoins admis lors de sa comparution devant les avocats que l’offre de Boires était « très basique ».
Dans sa décision initiale, la Régie a soutenu : l’activité principale de l’établissement n’est pas de préparer des aliments, son permis n’est donc pas conforme.
Lors d’une première visite de la Régie dans ce dossier, en novembre 2022, les inspecteurs ont constaté que la carte alimentaire proposait essentiellement du pop-corn et des cornichons. Une visite ultérieure a montré que l’offre s’était améliorée : amandes, chips, sandwichs, plateaux, conserves de fruits de mer, olives.
La Cour note dans le dossier qu’elle « ne comprend pas qu’un restaurant oenologique dont l’une des caractéristiques est l’accord mets et vins puisse véritablement exploiter un tel commerce entre 12 heures et 19 heures » et constate que le prix des vins au verre n’apparaît nulle part dans le menu.
Le propriétaire de Boires a vivement contesté cette décision et a récupéré son permis un mois plus tard, en attendant la décision du Tribunal administratif du Québec. C’est désormais chose faite : la Cour confirme la décision de la RACJ.