(Québec) Avec son moratoire sur la majorité de l’immigration économique, le premier ministre François Legault effectue un «virage à 180 degrés» et démontre qu’il a «perdu le contrôle» sur la gestion des nouveaux arrivants, accuse l’opposition.
Publié à 9h03
Mis à jour à 9h47
En entretien à La presse Mercredi, le ministre de l’Immigration, Jean-François Roberge, a annoncé la suspension de deux importants programmes d’immigration permanente afin de freiner une hausse plus élevée que prévu du nombre de nouveaux arrivants l’an prochain. Avec ce moratoire de huit mois, Québec prépare un scénario d’abaissement du seuil d’immigration à partir de 2026.
Et désormais, le gouvernement prendra en compte les immigrants temporaires, et non seulement les immigrants permanents, dans sa planification en matière d’immigration. Il s’agit d’une demande répétée de l’opposition à laquelle il a résisté jusqu’à présent.
Le moratoire concerne le Programme régulier des travailleurs qualifiés (PRTQ) et le volet diplômés du Programme de l’expérience québécoise (PEQ), destinés aux diplômés étrangers souhaitant s’établir ici de façon permanente (le volet destiné aux travailleurs étrangers temporaires n’est finalement pas concerné contrairement à ce que Québec suggéré mercredi). Ces deux programmes constituent la majorité de l’immigration permanente sous le contrôle du gouvernement du Québec.
“C’est une torsion!” » a lancé le chef péquiste Paul St-Pierre Plamondon en conférence de presse, jeudi. «C’est un 180 degrés de la part du gouvernement d’imposer un moratoire sur l’immigration économique hors Québec, mais aussi sur les PEQ, (immigrants) qui sont déjà sur le territoire. »
Il fait un lien direct entre la décision du gouvernement et l’annonce de son plan de réduction de l’immigration qu’il a présenté dans son intégralité lundi. Jean-François Roberge le nie, parce que ce n’est pas le genre de décision qui se prend si vite, mais M. St-Pierre Plamondon n’y croit pas.
«On a devant nous un Jean-François Roberge qui se rend compte que le gouvernement a perdu le contrôle des seuils» d’immigration, a fait valoir le chef péquiste. Le ministre « désavoue » ce que sa prédécesseure Christine Fréchette a fait à l’Immigration. « Elle a ouvert les vannes du PEQ », se souvient-il. M. Roberge a reconnu que son moratoire s’explique notamment par une augmentation plus importante que prévu des immigrants permanents du PEQ dans la catégorie des diplômés. Nous parlons de milliers de plus que les prévisions.
«Le gouvernement dérape», a tonné le chef par intérim du Parti libéral, Marc Tanguay. « C’est comme si quelqu’un dévalait une pente en hiver sur une route verglacée : c’est une perte de contrôle de l’immigration. Il a tiré le volant dans l’autre sens pour tenter de se stabiliser. »
Le moratoire est « préjudiciable » pour le Québec selon lui. «Il coupe des programmes qui permettent d’attirer au Québec des hommes et des femmes qui sont qualifiés, qui veulent se qualifier, des cerveaux, alors que le Québec est engagé dans une compétition internationale. » Il « n’a pas réfléchi aux conséquences » et a pris sa décision « sans concertation », a-t-il déploré.
Le porte-parole de Québec solidaire, Guillaume Cliche-Rivard, a lui aussi parlé d’un «virage à 180 degrés». L’inclusion des immigrants temporaires dans la planification de l’immigration est nécessaire depuis longtemps, et le gouvernement accepte enfin de le faire, a-t-il observé, un point également soulevé par les deux autres partis d’opposition.