(Montréal) Les personnes atteintes de sclérose latérale amyotrophique (SLA) pourraient bénéficier d’un traitement supplémentaire pour ralentir la progression de la maladie. Un nouveau médicament qui pourrait leur faire gagner du temps.
Publié à 16:01
Mis à jour à 17h02
Ugo Giguère
La Presse Canadienne
L’Institut national d’excellence en santé et en services sociaux (INESSS) recommande sous certaines conditions que le médicament Albrioza soit pris en charge par le régime public d’assurance médicaments.
Dans un nouvel avis publié vendredi, l’INESSS recommande au ministre de la Santé d’inscrire Albrioza sur la liste des médicaments d’exception à condition que son « fabricant contribue à réduire le fardeau économique sur le système de santé ».
Ce médicament est commercialisé par la société pharmaceutique américaine Amylyx.
Selon les informations contenues dans le rapport de l’institut, on estime que le traitement par Albrioza pendant les trois premières années de la maladie coûterait au système public 134,7 millions de plus pour traiter 476 patients.
En juin dernier, l’INESSS recommandait de refuser l’homologation du médicament en raison de doutes sur son efficacité. Des études complémentaires ont toutefois rassuré les experts. Cette fois, l’institut estime que « Albrioza, pris pendant 6 mois, ralentit la perte des fonctions physiques (par exemple, écrire, parler, marcher) chez les personnes ».
Cependant, il est averti que “l’ampleur de cet effet est considérée comme modeste”. À plus long terme, le médicament pourrait possiblement prolonger la vie des patients d’environ cinq mois, indique l’INESSS. De plus, le comité scientifique considère que le coût du traitement est élevé. Le rapport coût-efficacité serait également “défavorable” par rapport aux deux autres médicaments disponibles sur le marché, peut-on lire.
De plus, l’INESSS suggère de restreindre l’accès à ce traitement aux patients qui ont reçu un diagnostic de SLA, également connue sous le nom de maladie de Lou Gehrig, depuis moins de 18 mois. Les patients doivent aussi jouir d’une certaine autonomie et ne pas avoir subi de trachéotomie.
Il est ajouté que l’autorisation de traitement ne doit pas excéder un maximum de six mois. Une demande de poursuite de traitement pourrait alors être déposée, démontrant toujours que le patient n’a pas subi de trachéotomie, insiste le comité scientifique.
Gagnez du temps
Pour le DD Angela Genge, directrice de la clinique de sclérose latérale amyotrophique à l’Institut-Hôpital neurologique de Montréal, la SLA doit être vue comme un cancer du pancréas qui ne laisse que peu de temps à vivre.
« Dans un tel cas, un gain de cinq ou six mois, c’est énorme ! », plaide-t-elle.
---Ainsi, elle espère ardemment que la Régie de l’assurance maladie du Québec (RAMQ) ne tardera pas à adhérer à la recommandation de l’INESSS de rendre le médicament accessible aux Québécois.
C’est aussi ce que souhaite de tout cœur Amanda Tam. Le Montréalais de 22 ans, étudiant à l’Université McGill, a reçu un diagnostic de SLA en octobre 2021.
Depuis, elle prend les trois médicaments disponibles sur le marché pour ralentir la progression de la maladie. En plus de l’Albrioza, il y a le riluzole, qui prolongerait la vie de quelques mois, et l’edaravone (ou Radicava), qui ralentirait légèrement la progression de la maladie.
“Mes médecins m’ont dit qu’il valait vraiment mieux tout prendre que ne rien prendre. Je suis donc un corps gavé de drogue, en espérant que ça marche », confie-t-elle, disant observer un certain ralentissement de son déclin.
Cependant, si les deux premiers traitements sont couverts par la RAMQ, elle a accès à l’Albrioza grâce à l’assurance privée de sa mère. La jeune femme craint donc de perdre ses médicaments lorsqu’elle sera diplômée en fin de session ce printemps.
Amanda Tam veut aussi parler au nom des autres malades atteints de la maladie ou encore de ceux qui recevront bientôt le terrible diagnostic.
« Le truc avec la SLA, c’est qu’il faut profiter de tous les traitements disponibles car le pronostic peut parfois varier entre une espérance de vie de six mois à deux ans. S’il faut attendre un an pour avoir accès à un médicament homologué, c’est ridicule ! », dénonce celle qui a étudié la psychologie et le marketing.
Le DD Genge ajoute en disant que l’espoir des patients repose sur la promesse de nouveaux traitements, de nouvelles découvertes scientifiques. Le problème, c’est qu’il faut les acheter à ce moment-là pour qu’ils puissent encore être là quand le prochain médicament sortira dans six mois, un an ou même deux ans.
Albrioza est une combinaison de deux médicaments, le phénylbutyrate de sodium (PB) et l’ursodoxicoltaurine (TURSO). On ne connaît pas précisément son mécanisme d’action, concède l’INESSS, mais il aurait pour effet de réduire la mort des cellules neuronales.
Ce médicament se consomme sous forme de poudre que l’on mélange dans un verre d’eau.
La SLA est une maladie relativement rare qui attaque les cellules nerveuses responsables du mouvement musculaire. Au fur et à mesure qu’il progresse, il entraîne une paralysie du corps, affectant même la capacité de parler, de manger et de respirer. L’espérance de vie dépasse rarement cinq ans à compter de l’apparition des premiers symptômes.
Le contenu sur la santé de la Presse canadienne est financé grâce à un partenariat avec l’Association médicale canadienne. La Presse canadienne est seule responsable des choix éditoriaux.