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De MC Solaar à Damso, cinq samples qui ont marqué l’histoire du rap français

Alors que la culture du sampling dans le rap revient sur le devant de la scène, le journaliste Brice Miclet publie un ouvrage sur l’évolution de cette technique en . Il décrypte cinq exemples mythiques du hip-hop français.

MC Solaar en 1994. Le sample de sa chanson « Bouge de là » est l’un des plus reconnaissables du rap français. Photo Al Pereira/Getty Images/Archives Michael Ochs

Par Sophie Jeanneteau

Publié le 23 novembre 2024 à 16h00

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Ccaractéristique de la production hip-hop, la culture du sampling a récemment vu son engouement ravivé grâce au documentaire DJ Mehdi : Fabriqué en France, qui fait sensation sur Arte.tv depuis début septembre. Heureuse coïncidence, c’est dans ce contexte que le journaliste musical Brice Miclet a publié le 22 novembre, avec Le Mot et le Reste, un ouvrage consacré à l’histoire des samples dans le rap français. Après avoir exploré le rap américain avec Échantillon! Aux origines du son hip-hop en 2018, il se concentre désormais sur les spécificités d’une scène française au patrimoine sonore riche et varié.

Dans Sample & rap français, l’auteur décrypte la manière dont les artistes locaux se sont réappropriés cette technique, née aux États-Unis, pour créer un son de plus en plus distinct. À travers des exemples marquants, il éclaire l’évolution de l’identité musicale du hip-hop français. Explication en cinq échantillons devenus légendaires.

MC Solaar, « Partez de là » (1990)

« L’échantillon de Éloignez-vous, de MC Solaar, n’est peut-être pas la plus sophistiquée, mais elle reste sans doute l’une des plus emblématiques. C’est un exemple parfait pour vulgariser la pratique de l’échantillonnage. Le producteur Jean-François Delfour a repris un extrait de Le message, de Cymande, groupe britannique d’origine antillaise qui a fusionné funk, soul et reggae dans les années 70. Avec S’éloignerMC Solaar fait entrer le rap dans des sphères qui lui échappaient auparavant, conquérant un public bien au-delà de ses frontières habituelles. Ce morceau marque l’un des premiers grands succès du rap en France, posant ainsi les bases d’une popularisation du genre, ce que certains puristes pouvaient reprocher à l’époque à Solaar. »

IAM, « Demain est loin » (1997)

« L’origine de l’échantillon de Demain est loin, de IAM, reste une énigme sonore, même si ce titre figure parmi les monuments du rap français. Imhotep, en véritable alchimiste, a construit une boucle simple, mais d’une richesse incroyable, divisée en deux parties distinctes : l’une agrémentée de cordes, l’autre plus dénudée. Cette rupture crée une tension narrative, enveloppant l’auditeur dans une atmosphère sombre. Les influences des producteurs de l’époque sont évidentes : musiques de films, variétés françaises et sonorités orientales, avec une orchestration riche en cordes et piano. Ce morceau de plus de neuf minutes incarne l’art du sampling à la française, avec une finesse et une mélancolie propres à cette époque. »

NTM, « Pose ton pistolet » (1998)

« Pose ton pistolet, de NTM, s’impose comme un classique du genre, tant par son poids historique que par sa construction sonore. La chanson est basée sur un extrait de Bobby Womack, qui revisite Et je l’aime des Beatles dans une version soul déchirante. La voix brute de Joey Starr se marie parfaitement avec cette production glaçante et extrêmement marquante, renforcée par un clip lugubre, tourné dans une morgue. Tout dans cette œuvre résonne autour de la mort, mais c’est surtout la manière dont Womack semble chanter depuis l’au-delà qui fascine et terrifie à la fois. Le sample joue vraiment un rôle déterminant dans la dramaturgie du titre. C’est l’une de mes chansons de rap préférées depuis que je suis enfant, la première fois que je l’ai entendue, ça m’a époustouflé. »

113, « Les Princes de la Ville » (1999)

« Grâce à l’excellent documentaire d’Arte consacré à DJ Mehdi, Les Princes de la Ville, du groupe 113, connaît un regain d’intérêt qui transcende les générations. L’échantillon de Fais-moi croire en toi, de Curtis Mayfield, joue un rôle central, avec ses cordes montantes créant une tension dramatique, avant de s’évaporer dans une production house audacieuse. DJ Mehdi, déjà en avance sur son temps, savait jouer avec les fréquences comme aucun autre, manipulant les aigus et les graves pour créer un paysage sonore riche et immersif. Tout dans ce morceau est légendaire, du thème aux choix rythmiques en passant par le groupe 113 lui-même. En bousculant les codes, ce titre est devenu un jalon incontournable du rap français. »

Damso, « Amnésie » (2016)

«Enfin, avec Amnésie, originaire de Damso, le producteur Jowëll a puisé dans le répertoire jazz-funk français des années 70 en samplant Alain Mion, le cerveau du groupe Cortex. Ce riff de piano, à la mélodie presque fantomatique, a traversé les décennies. La musique du Français a trouvé un écho inattendu auprès des rappeurs outre-Atlantique (Rick Ross, Tyler The Creator et Curren$y ont également samplé des morceaux de Cortex). Si le titre de Damso a dû être retiré des plateformes faute d’autorisation pour cet extrait, l’affaire a cristallisé les enjeux juridiques du sampling dans le rap français. Paradoxalement, cette suppression a permis à une nouvelle génération d’auditeurs de découvrir les mystères du sampling, mais aussi les tensions juridiques qui l’accompagnent. »

Sample & rap français, de Brice Miclet, éd. La Parole et le reste, 304 p., 24 €.

 
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