Laouni a décidément beaucoup à dire sur le rap d’aujourd’hui.
Le rap a bien changé depuis ses débutset même en France, depuis les premiers « hits » rap sortis au tout début des années 90, les changements ont été radicaux. Il n’y a que comparer avec ce qui se passe actuellement dans le rap game : refrains chantés, usage parfois abusif de l’autotune, réduction du vocabulaire, omniprésence de la merde, de l’herbe ou des ballons, on est clairement entré dans l’ère du divertissement. Des changements qui peuvent parfois déplaire à certains vétérans, même les plus ouverts d’esprit, comme c’est le cas pour La Fouine par exemple.
Petit coup de gueule
La Fouine revient au cœur de l’actualité de cette fin d’année, avec la sortie de son tout nouveau projet « Capital du Crime Radio »qui s’est vendu à près de 10 000 exemplaires la première semaine, ce qui est une belle performance pour un artiste longtemps absent. Avec ce retour remarqué, Laouni multiplie également les interviews, lui qui est très sollicité par les médias. Lors d’une interview pour Libération, le rappeur a livré son point de vue légèrement négatif sur l’état du rap actuel :
Avant, il fallait être le meilleur rappeur de son quartier, puis de sa ville, et enfin de son département. C’est aussi pourquoi les artistes parlent autant de leur quartier et de leur code postal. C’était une façon de remercier votre premier public. UUne autre chose que je regrette c’est la disparition des messages. Ils dépensent moins, voire plus. C’est dans l’ADN du rap de prendre position. Je ne dis pas qu’il faut sortir uniquement des morceaux engagés. Mais à travers un mot ou une phrase, souvenez-vous des luttes. Au fond, nous sommes la voix de ceux qui n’ont rien.
Un constat qui est évidemment bien vrai : peu de rappeurs incluent encore quelques messages dans leurs chansons, ou même créent simplement des paroles qui ont du sens. Un autre sens de « gros gammos, gros chargement de stup, gros joint 3* filtré, gros timp’ », et tous les autres clichés qui vont avec. Les quelques rappeurs à inclure des messages dans leurs paroles ne sont pas les plus réussis.
-La Fouine en partie responsable ?
Là où il est un peu hypocrite de la part de La Fouine de faire ce genre de constat, c’est parce qu’il lui-même a fortement participé au passage du rap à l’ère du divertissementavec des titres comme “Veni Vidi Vici” et bien d’autres. Et le fait de regretter le manque de messages dans le rap français, par exemple, ne l’a pas empêché de faire un featuring avec Koba La D sur son nouvel album, qui est probablement l’artiste dont les textes contiennent le moins de messages de toute l’histoire du rap français.
Évidemment, La Fouine est loin d’être le seul coupable : la faute à l’industrie comme le premier responsable de ces changements, puisque les labels, les radios, les plateformes de streaming mettent en avant des chansons qui n’ont pas beaucoup de sens. Mais les anciens, comme Booba, La Fouine par exemple, ont aussi leur part de responsabilitéeux qui ont clairement participé à la baisse du niveau en sortir des albums remplis d’egotrips et de clashs, avec très peu de substance.
Enfin, le public doit aussi prendre ses responsabilités, celui qui ne jure plus que par les hits et les morceaux « viraux », et cherchera de moins en moins la pépite rare et pas trop commerciale, alors qu’il a littéralement tout à portée de main sur Spotify.