Initié par Michel Barnier en octobre, rejeté par l’Assemblée nationale en première lecture, suspendu après la censure de l’ancien Premier ministre et finalement repris par François Bayrou, ce projet de loi de finances (PLF) a connu un parcours chaotique au Parlement…
Même si c’est sur un autre texte budgétaire, celui de la Sécurité sociale, que le gouvernement Barnier a été renversé, rien ne garantit que les oppositions laisseront passer ce PLF sans sourciller, bien au contraire.
Crucial pour le bon fonctionnement de l’État qui connaît actuellement un ralentissement sous le régime exceptionnel d’une loi spéciale votée en fin d’année, ce budget représente une équation quasi insoluble pour l’exécutif, privé de majorité absolue à l’Assemblée nationale mais ordonnée par Bruxelles pour redresser les finances publiques.
“C’est un exercice extrêmement difficile, très exigeant, mais qui est obligatoire. Il est essentiel que la France ait un budget. Une France sans budget, c’est une France à l’arrêt et qui creuse en même temps son déficit.»a insisté mercredi la porte-parole du gouvernement Sophie Primas, jugeant “impératif” que le texte puisse être promulgué avant la fin février.
Bercy vise un effort de 32 milliards d’économies et 21 milliards de recettes pour ramener le déficit public à 5,4% du PIB en 2025, contre un niveau de 6,1% attendu pour 2024.
Récupération
Pour atteindre ses objectifs, le gouvernement peut compter sur un Sénat globalement bienveillant. Dominée par une alliance centre-droite qui la soutient et privilégie également une logique de réduction des dépenses, la chambre haute devrait adopter le projet de budget de manière très large.
“Ce budget amorce l’effort de redressement des comptes. Nous sommes dans une situation d’extrême urgence et il est temps d’en prendre conscience, sans sacrifier nos convictions ni aligner nos lignes rouges.», résume le rapporteur général du budget Jean-François Husson (LR), qui dirige les débats budgétaires au Palais du Luxembourg.
Pour le gouvernement, la situation risque de se compliquer par la suite, avec la convocation le 30 janvier d’une commission paritaire (CMP), réunion de sept sénateurs et sept députés chargés d’aboutir à un texte de compromis.
En cas d’aboutissement, la version commune devra passer le filtre de l’Assemblée nationale dans la semaine du 3 février pour un vote final, ou un éventuel retour de 49,3, suivi sans doute d’une nouvelle motion de censure.
-Après avoir convaincu les socialistes de ne pas le censurer sur sa déclaration de politique générale, François Bayrou espère prolonger ce projet d’accord sur son budgetavec des concessions comme le renoncement à la suppression de 4 000 postes d’enseignants et le passage à trois jours d’attente dans la fonction publique, ainsi que la renégociation de la réforme des retraites de 2023.
Mais le score n’est toujours pas au rendez-vous pour les socialistes, qui voteront jeudi contre le budget comme l’ensemble de la gauche.
« Bougez les lignes »
« Le CMP sera le juge de paix. D’ici le 30 janvier, possibilité de déplacer les lignes. Le budget ne sera pas bon, nous le savons, mais nous voulons qu’il soit le plus mauvais possible.”assume à l’AFP le président des sénateurs PS Patrick Kanner, qui appelle à de nouveaux progrès.
Censure ou non-censure ? Au sein du Nouveau Front populaire, les Insoumis ont élevé mercredi le ton contre les socialistes : s’ils ont réitéré leur choix de ne pas censurer, les députés PS “je romprais définitivement” avec le NFP, selon LFI.
Entre-temps, la gauche est très échauffée par les derniers développements des débats budgétaires au Sénat, avec la présentation par le gouvernement de plusieurs «modifications d’avion»: des coupes budgétaires supplémentaires proposées en dernière minute dans presque tous les ministères.
Quelque 800 millions d’euros pour l’aide au développement, plus d’un milliard pour le logement et l’écologie, 600 millions pour la recherche et l’enseignement supérieur, et une réduction hautement symbolique du budget du sport par an après les JO…
Même à droite, ces arbitrages imprévus ont parfois fait sourciller. De quoi laisser présager d’intenses négociations jusqu’au bout.
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