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Cette technique suisse permettra de mieux stocker l’énergie

Le stockage de l’énergie est la clé de la transition énergétique vers l’abandon du pétrole et du gaz. Le prestigieux Watt d’Or vient de récompenser un projet qui utilise l’énergie solaire stockée en hiver et produite en été, grâce à une technologie de stockage longue durée peu coûteuse.

Bruno Knellwolf / ch médias

Une odeur désagréable flotte autour de la nouvelle usine de traitement des carcasses d’animaux à Frauenfeld (TG). Benjamin Fumey, de l’Université de Lucerne (HSLU), se tient devant la porte derrière laquelle se trouve la première installation de démonstration de stockage d’énergie à long terme qu’il a développée. Avec son partenaire industriel Matica, a reçu le prestigieux Watt d’Or de l’Office fédéral de l’énergie (Ofen) dans la catégorie « Technologies de l’énergie » à Berne.

Depuis longtemps déjà, la recherche étudie les moyens de stockage à long terme. En effet, le développement des énergies renouvelables entraîne des fluctuations saisonnières de la production électrique : trop en été, pas assez en hiver. De plus, en raison des nombreuses pompes à chaleur installées dans les habitations, la consommation électrique pour le chauffage augmente fortement.

Un support de stockage longue durée pas cher

La soude caustique est la réponse de Benjamin Fumey. Ce liquide, l’hydroxyde de sodium dissous dans l’eau, stocke l’énergie comme le pétrole, mais cela prend des millions d’années. Avec la soude caustique, ça va beaucoup plus vite.

L’excédent d’énergie renouvelable produit par des panneaux photovoltaïques, des installations solaires thermiques ou de l’énergie éolienne en été y est stocké. Après 20 ans de recherche, l’idée a désormais atteint son premier objectif. Marc Lüthi de Matica explique :

«Une deuxième installation de démonstration sera inaugurée cet été à Kaltenbach, en Thurgovie, à proximité du nouveau centre de distribution de la Poste»

Un troisième sera construit dans un lotissement en Allemagne.

Les réservoirs contiennent le fluide de stockage, la soude caustique et l’eau dissoute.Image : Niklas Thalmann

Dans l’installation de démonstration, financée par BGE, dans le bâtiment des cadavres d’animaux, se trouvent huit réservoirs remplis soit de soude caustique, soit d’eau. A côté, un échangeur de masse et de chaleur, baptisé SeasON, qui gère les flux d’énergie.

D’avril à octobre, la soude caustique se charge en énergie renouvelable. Cela signifie que l’eau contenue dans la soude caustique s’évapore et qu’il reste une soude caustique plus concentrée. “Cette soude concentrée emmagasine le potentiel pour fournir de la chaleur plus tard”explique Benjamin Fumey. Plus la concentration de soude caustique est élevée, plus l’énergie stockée est importante.

En hiver, cette énergie est extraite de la soude caustique concentrée, qui est ainsi évacuée. L’été suivant, la soude caustique est à nouveau chargée d’électricité solaire depuis le toit de l’usine de transformation des carcasses d’animaux. Un circuit fermé. La pompe à chaleur est alimentée par des moyens chimiques et non par l’électricité comme les pompes à chaleur air-eau courantes.

Benjamin Fumey (à gauche), chercheur en énergie à l’Université de Lucerne et lauréat du prix Watt d’Or.Image : Niklas Thalmann

Benjamin Fumey explique :

“Pour un grand réservoir saisonnier qui n’est ni chargé ni déchargé quotidiennement, il est essentiel que le support de stockage soit bon marché”

C’est précisément le cas de la soude caustique, car il s’agit d’un déchet issu de la production de plastique. Le volume de stockage peut également être facilement augmenté. “Ajoutez simplement plus de réservoirs de soude caustique”explique le chercheur en énergie. Si la maison ou l’entreprise manque d’énergie de chauffage en hiver, il est également possible de recharger en soude caustique concentrée.

Chaque mètre cube de soude caustique emmagasine environ 200 à 350 kilowattheures de chaleur. Cette densité de stockage de la soude caustique est donc six fois supérieure à celle d’un ballon d’eau chaude. Pour une maison unifamiliale, il faut environ 8 à 10 mètres cubes de soude caustique pour un hiver, selon le standing de la maison et sa localisation.

De l’idée au produit commercialisable

« La soude caustique est très stable, il n’y a aucune perte en système fermé et elle ne se décompose pas», explique Benjamin Fumey. Il s’agit simplement d’un processus de chargement-déchargement qui oscille entre soude caustique concentrée et diluée. La soude caustique n’est donc pas consommée. Le chercheur poursuit :

« Si une telle installation devait être démantelée après 40 ans, la soude caustique serait toujours la même »

Benjamin Fumey a d’abord exploré l’idée avec Robert Weber pendant 14 ans dans le cadre d’un projet européen à l’Empa. Il a ensuite emmené ces recherches à Lucerne il y a trois ans. Il ne s’agit désormais plus de jeter un pont entre recherche fondamentale et recherche appliquée. Cette idée doit maintenant devenir un produit commercialisable. “Aujourd’hui, c’est clair que ça marche”conclut Benjamin Fumey.

(Traduit et adapté par Chiara Lecca)

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