ÔLivier tient dans ses mains une soupe chaude. Le SDF de 51 ans a son « coin », « là-bas ». L’homme évite les groupes, il soigne sa solitude, mais vient volontiers voir les maraudeurs de la Croix-Rouge de Bayonne. « Ils font ça pendant leur temps libre, ils ont peut-être des enfants, de la famille et ils sont ici ce soir, le 24 décembre. Nous devons les remercier. »
Comme six soirs par semaine, des bénévoles parcourent le BAB à la rencontre des plus démunis. Évelyne Duchange, Mylène « avec-un-Y-j’y-tien » Rico, Julien Cohen et Jacques Cazalé rencontreront une quarantaine de personnes et rentreront chez eux dans la nuit, vers 13 heures. « Disons qu’on passe le réveillon ensemble », sourit Évelyne.
Pour cette soirée spéciale, un Tetris de colis soigneusement emballés occupe la banquette arrière du van. « Des associations ont préparé des cadeaux pour les gens de la rue. Nous ne savons pas ce que contiennent les boîtes, il est simplement écrit « homme » ou « femme » dessus. Nous allons les distribuer. Un peu d’attention. » En plus des couvertures. Ou encore une boisson chaude, des sandwichs et pâtisseries invendus des boulangeries bayonnaises.
“Aller à”
« Comme beaucoup sont fermés demain, nous en avons eu beaucoup ce soir. Mais notre mission première n’est pas de nourrir les gens », note Évelyne. La Croix-Rouge établit un lien avec les plus vulnérables et espère les revoir dans la journée, notamment mercredi après-midi à l’unité de soutien relais. « Là-bas, nous essayons d’inciter à aller vers. On peut par exemple les accompagner dans leurs démarches, simplement en faisant appel à un service et en les orientant. Ils sont reçus par les maraudeurs, pour eux, ce n’est pas l’institution. »
“Ils font ça pendant leur temps libre, ils ont peut-être des enfants, de la famille et ils sont ici ce soir, le 24 décembre. Nous devons les remercier”
Travailleurs pauvres
Un simple arrêt, la Place des Basques, concentre un nombre important de problématiques de rue. Olivier, le gars facile à vivre, qui n’a « rien contre les autres », mais qui veut rester tranquille. «Je ne dérange personne, je pars là où je dors propre. Souvent, au réveil, il y a une pochette avec un peu de fromage, des pommes, c’est sympa. »
Julien quitte le travail. Une fine pellicule de poussière sur ses lunettes traduit le turbin : « Je travaille comme maçon en ce moment. Un chantier chez un particulier à Bidart mais j’en ai un autre à Capbreton. » Ce Breton de 36 ans traverse la France, entre dans des agences d’intérim et vend sa main d’œuvre aux « clochards » d’aujourd’hui. « Ce n’est pas un choix. » L’histoire d’un emploi perdu et d’une déchéance à laquelle il fait face la tête haute et le dos douloureux à force de dormir dans sa voiture. « Au moins j’ai un abri, je me considère un peu privilégié. »
Myriam lui tend un colis surprise. Il y trouvera quelques produits d’hygiène, peut-être une écharpe ou un chapeau. ” MERCI ! C’est tellement sympa ! » C’est la réaction de presque tout le monde. Parce qu’un homme sur dix autour du van n’est pas satisfait du présent. Il en voudrait un autre. Myriam lui explique que ce n’est pas possible, “il faut quelque chose pour tout le monde”.
L’homme a une attitude agressive. Mieux vaut partir. La rue reste un monde d’épuisement et de tension, aux équilibres instables. Les volontaires de la Croix-Rouge et d’autres membres de la communauté solidaire absorbent une grande partie de cette tension. Olivier a raison, il faut leur dire merci.
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