Sabine Cazenave, la directrice et conservatrice en chef du Musée basque et d’histoire de Bayonne commence par rassurer : « Ni l’animal ni le traitement pour l’éradiquer ne sont nocifs pour l’homme. » Pas de panique, alors. Mais une certaine urgence pour lancer l’attaque contre les coléoptères qui infestent la maison Dagourette. L’insecte xylophage menace le bâtiment structuré en bois et les collections qu’il abrite. Après les vacances de fin d’année, l’institution des bords de Nive fermera ses portes au public, du 6 janvier au 24 mars. Il est - d’en finir avec la créature et tous ses cousins avides de bois : capricornes et termites. principalement.
Le problème avec ce « solidus », c’est qu’il l’est. « Il semble qu’elle résiste aux traitements en raison de l’anoxie. »
Les musées sont constamment vigilants quant à l’apparition d’insectes indésirables dans leurs murs. Plus précisément, c’est la larve du ver à bois qui grignote le bois là où elle se développe, laissant derrière elle une poussière traîtresse. « Nous avons eu une alerte en août dernier. Un phénomène très limité que nous avons pu éradiquer. Nous avons immédiatement mis en place un protocole de surveillance très strict et nous avons constaté que le coléoptère était ailleurs. »
Une broche très « solidus »
Rien d’extraordinaire dans la vie dans de tels endroits, surtout au Pays Basque où les conditions d’humidité et de chaleur conviennent à la petite créature. Sauf que celui apparu dans l’édifice du XVIIe août est de type « assez exogène ». « Le Calymmaderus solidus », informe le réalisateur. Elle n’est pas endémique en France. Elle vient du sud. Probablement importé. Nous n’en sommes ici qu’au début de notre observation, nous sommes suivis par un entomologiste. »
Le problème avec ce « solidus », c’est qu’il l’est. « Il semble qu’elle résiste aux traitements en raison de l’anoxie. » Ou la méthode classique de désinfestation dans les musées, en éliminant l’oxygène dans un espace hermétiquement fermé. Il est donc nécessaire d’avoir recours à d’autres approches, également peu invasives. Car le Musée Basque est classé monument historique. Pas question de brûler les poutres, une démarche radicale qui consiste à retirer les vis sans fin. Alors que dire des œuvres, objets et meubles ?
Insecticide et chaleur
« Nous allons commencer par le bâtiment. C’est le préalable logique pour ne pas réinfecter les collections. » Sabine Cazenave décrit une méthode impliquant l’injection d’un insecticide et d’un répulsif. « Nous l’introduisons par les trous existants. Tout cela se fait sous le contrôle des conservateurs des Monuments Historiques et de l’architecte des Bâtiments de France. Lorsque cela sera fait, nous pourrons traiter les collections. »
Nous le faisons aussi en hiver car les coléoptères sont en dormance. Ils ne risquent pas de voler partout quand on va les soigner au Musée Basque
Là, le Musée fait appel à une société autrichienne, Thermo lignum international. Le même qui s’est débarrassé des coléoptères en août, sans recourir à l’anoxie inefficace avec Calymmaderus solidus. Elle appliquera un traitement thermique aux objets et œuvres. Une technique extrêmement précise. « Ils créeront des salles à l’intérieur du musée où ils organiseront la rotation des œuvres. Ils appliquent un procédé d’augmentation très progressive de la chaleur autour de l’œuvre. En même - qu’une lente baisse de l’humidité. Tout cela en s’adaptant à chaque type de collection. L’idée est de cuisiner la vrille mais pas l’œuvre. »
100 000 euros
Le conseil syndical des musées historiques, les élus, avec l’accord du préfet de ce Musée de France, ont décidé de ne plus attendre. « Le problème, c’est que nous avons des petits objets parmi les 80 000 pièces de nos collections. Sur un objet de 50 cm2, le coléoptère peut faire des ravages rapides. » Si elle ne s’attaque pas aux toiles et aux tableaux, si elle ne goûte pas aux cuirs, les cadres, meubles et autres objets basques du quotidien exposés composent des menus très alléchants.
Le moment est venu. Il a lieu pendant les mois de basse saison touristique, entre les vacances de Noël et le printemps. « Nous le faisons aussi en hiver car les coléoptères sont en dormance. Aucun risque qu’ils volent partout quand on va les soigner au Musée Basque. »
Le planning global de l’intervention prévoit un mois de préparation des locaux et des travaux, avec un énorme travail de manutention. Un mois de traitement des locaux et des collections. Un mois de nettoyage et de réinstallation. Le coût global de l’opération est estimé à 100 000 euros. « C’est le prix d’une exposition », mesure Sabine Cazenave.
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