Lorsque l’affaire éclate en 2017, Éric Pilaud, alors président du club de rugby de Grenoble, n’a pu retenir ses larmes lors d’une conférence de presse. Il avait licencié les joueurs, non pas pour le viol dont ils étaient accusés, mais pour avoir porté atteinte à l’image du club. « J’ai pris mes responsabilités en respectant la présomption d’innocence. Je ne les ai pas licenciés pour cela, mais parce qu’ils avaient terni l’image du club et n’avaient pas respecté leur contrat de travail, notamment en matière de vie nocturne. »
Sept ans et demi plus tard, le verdict est tombé : Denis Coulson, Loïck Jammes et Rory Grice sont tous trois reconnus coupables de viol collectif et condamnés respectivement à quatorze, quatorze et douze ans de prison. Christopher Farrell a été condamné à quatre ans, dont deux avec sursis, sa peine étant modifiée en placement externe avec port d’un bracelet électronique. Dylan Hayes reçoit deux ans de probation.
Désormais aux Etats-Unis mais toujours actionnaire du club, Éric Pilaud a accepté d’évoquer ce qu’il appelle « cette terrible affaire » pour France Bleu Isère.
« Je pense avant tout à la victime. Je regrette qu’elle ait dû attendre plus de sept ans avant d’avoir un procès. J’espère que cela lui permettra de reconstruire sa vie. Comme lorsque l’affaire a éclaté, je trouve ça tellement effrayant. C’est un énorme gâchis, des vies sont bouleversées. D’abord celui de la victime, d’abord, bien sûr, mais aussi ceux des joueurs, de leurs familles. C’est lamentable. Après, j’espère que le monde du rugby réagira car il s’y passe trop de choses pour dire que ce n’est qu’un accident. »
Éric Pilaud prône également un véritable travail de prévention et d’éducation dans le rugby. « Je pense que quand on vit, tous les jours, à 40 personnes, sans aucune ouverture sur le monde, eh bien ça présente un risque ! Parce que les garçons entre eux peuvent être stupides ! Ils ont une relation avec les femmes complètement désynchronisée. On passe alors de flirts un peu violents aux violeurs. C’est terrible. Pourtant, le rugby se professionnalise. Les joueurs ont des nutritionnistes, des préparateurs physiques et mentaux, on ne peut pas accepter qu’ils se mettent sur le toit tous les week-end et qu’ils perdent le contrôle et la décence qu’ils doivent avoir, ce n’est pas possible ! »
« Oui, je connais ces joueurs. Je ne pense pas qu’ils soient des pervers répétitifs. Dans un contexte d’alcool, de masculinité toxique, ils ont commis une énorme erreur qui a brisé la vie d’une victime et ils en paient le prix. Je suis père, j’ai des filles et ces histoires de viols sont terribles. Il faut vraiment que la société se réveille, on ne peut plus continuer ainsi. J’espère que cette affaire très sombre fera vraiment réagir les autorités du rugby, pour qu’au moins quelque chose de positif ressorte de tout cela”, a-t-il conclu.
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