CCe n’est pas un non pour non. Mais question de poser les choses sereinement, d’examiner en transparence le destin du Hall 1 du Parc des Expositions, à Bordeaux-Lac. « Démolir pose la question : pourquoi ? Soit la structure est en mauvais état, soit la toiture et son étanchéité sont à revoir, ce qui est normal, soit le sol est en mauvais état. Ces trois sujets peuvent être abordés. L’enjeu est de préserver ce bâtiment, ce patrimoine vivant de l’architecture du XXème siècle.e century,” explains architect Michel Pétuaud-Létang.
Lui, comme d’autres, est venu grossir les rangs du Collectif des Amis du Hall 1, des acteurs de la société civile, des associations, des défenseurs du patrimoine. Il y a un an presque jour pour jour, ils découvraient dans « Sud Ouest » le projet de destruction et de reconstruction du Hall 1, un peu plus en retrait des rives du lac. Ils tombent alors de leur chaise.
Des courses ?
Au fil des semaines, l’intention disparaît des radars, pour réapparaître de manière frappante lors du dernier conseil de Bordeaux Métropole. La délibération a consisté à donner le feu vert pour s’appuyer sur le secteur privé, tracer un horizon pour le secteur du Lac, « assurer le maintien de la fonction du Parc des Expositions et engager en priorité le renouvellement du Hall 1 ». Renouveau… Le terme est suffisamment vague.
Et au jeu des questions agaçantes et des réponses agréables, Pierre Hurmic, premier vice-président de Bordeaux Métropole, visiblement agacé par son opposition, déclare : « Le hall 1 est en mauvais état et ne correspond pas aux besoins des exposants. Il s’agit même d’un tamis thermique, qui n’a connu aucun investissement structurant depuis sa création. Je suis très attaché au patrimoine, je reconnais la grande élégance du Hall 1. Je préfère pouvoir défendre la réhabilitation plutôt que la destruction.. Mais le Hall 1 s’effondre ! On ne peut pas le rééduquer, il se rase tout seul ! »
Des destructions impensables
« On essaie de comprendre, des chiffres circulent. On parle de 150 millions d’euros pour la rénovation. D’où viennent-ils ? Sur quelle expertise s’appuient les collectivités pour décider si le bâtiment doit disparaître ? Des données objectives sont nécessaires pour prendre une décision. Or, à ce stade, il n’y en a pas. Nous sommes face à un précieux témoignage de l’architecture des années 1970, c’est un patrimoine culturel bordelais, au même titre que le Grand Théâtre », explique le guide Yves Simone.
« Le Hall 1 s’effondre ! » On ne peut pas le rééduquer, il se rase tout seul ! »
Si le Hall 1 a une vocation utilitaire, il a avant tout été conçu comme un « geste architectural ». Une silhouette élancée de plus de 800 mètres de long signée par les principaux architectes des Trente Glorieuses Francisque Perrier et Jean Dubuisson. Une façade ornée de tuiles émaillées qui produisent un éclat se confondant avec la surface du lac dans lequel se reflète l’édifice, comme le Palais de la Bourse sur le Miroir d’Eau. Marc Saboya, historien de l’art, écrit son soutien au collectif : « En choisissant de traiter une architecture d’une telle dimension à la manière d’une œuvre d’art plastique, la composition de Perrier et Dubuisson est unique en France. Sa destruction est impensable. »
Défauts
Sur le plan purement technique, Francis Maudous, ingénieur conseil, émet des réserves quant à la possibilité de voir le bâtiment s’effondrer. Il s’avère que dans ses jeunes années, il a travaillé à la construction du Hall 1 : « Je ne vais pas dire que le bâtiment est sain, c’est en fait une passoire thermique. Mais, lors de sa construction, pour des raisons économiques, des économies ont été réalisées sur certains aspects. La structure métallique repose sur des pieux dont les fondations ne sont pas ce qu’elles auraient dû être. Le sol repose sur une couche d’asphalte dont les sous-sols s’affaissent. Ces erreurs n’ont jamais été corrigées. »
“Nous sommes face à un précieux témoignage de l’architecture des années 1970, c’est un patrimoine culturel bordelais, au même titre que le Grand Théâtre”
Michel Pétuaud-Létang ajoute : « Les investissements nécessaires à l’entretien ont fait défaut. D’autres salles furent construites puis détruites. Ce sont des choix stratégiques de l’époque que nous sommes obligés de regretter aujourd’hui. » Le collectif entend porter le débat sur la place publique puisqu’il interroge la notion de patrimoine. Faut-il le résumer au Bordeaux du XVIIIe siècle ?e et XIXe des siècles ? « On ne dit pas : ‘ne touchez pas’ », assure Yves Simone. « Mais préservons ce précieux témoignage quitte à le refondre en profondeur. L’architecte Paul Chemetov a défendu l’idée de construire sans détruire. Il disait que tous les bâtiments peuvent avoir une seconde vie… Le triptyque conserver, adapter, transmettre, telle est la solution. La destruction-reconstruction est catastrophique d’un point de vue humain, écologique et patrimonial. »
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