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Dans le Grand Sud, c’est l’océan qui dicte sa loi

Les cartes météo racontent mieux que quiconque : patchworks de couleurs vives, flèches désordonnées, comme si la mer s’amusait à brouiller les pistes. Chaque skipper est seul face à son destin, coincé dans une toile de vents mouvants qui ne répondent qu’à l’appel du chaos. Et pourtant, malgré cette dispersion, une sorte de fil invisible relie tous ces hommes et ces femmes. Une fraternité née dans la solitude, une communion forgée dans le choc des éléments. ” Dans les mers du Sud, on se sent vraiment seul. Il n’y a pas grand chose autour de nous. Avoir des gens proches de soi est important. Bien sûr le Vendée Globe est une course et nous sommes des concurrents, mais nous avons aussi tous envie que tout se passe bien pour chacun de nous. Parfois on a l’impression de former une équipe contre nature », a commenté Sam Davies (Initiatives-Cœur), bien revenu dans la lutte avec Justine Mettraux (TeamWork – Groupe Snef), Boris Herrmann (Malizia – Seaexplorer) et Clarisse Crémer (L’Occitane en Provence) après avoir tenté un petit décalage dans le Nord. ” Depuis 24 heures, nous bénéficions de vents assez stables et d’une mer assez plate. On est sur un bord rapide et c’est vraiment sympa même si c’est assez intense », a détaillé la navigatrice qui a parcouru près de 485 milles entre les 3 heures hier et aujourd’hui à la même heure, se montrant ainsi la plus rapide de la flotte sur cette période.

Ne sois pas surpris

« Le but est d’arriver à rester le plus longtemps possible devant la dépression qui nous rattrape petit à petit pour ne pas tomber dans une zone sans vent mais aussi et surtout profiter du décalage qui nous permettra de faire une trajectoire assez naturelle le long de la zone d’exclusion de l’Antarctique sous le vent », ajoute Sam, alors à l’approche des îles Kerguelen, dernier signe de terre avant un long tête-à-tête avec l’immensité de l’océan Austral. «C’est un jalon important. J’aime découper le tour du monde en petits morceaux pour ne pas trouver le - trop long. Le passage de ce petit archipel marque ainsi la fin du premier tronçon de l’Indien. C’est un pas vers le prochain : le Cap Leeuwin », a ajouté le Britannique qui s’apprête à plonger encore plus profondément dans la solitude du Grand Sud et qui sait, pour avoir déjà participé quatre fois à la course, comment naviguer dans ce coin de la planète. est aussi compliqué qu’un puzzle de 1 000 pièces. Une voile mal réglée ? Une dépression mal négociée ? Et paf ! C’est le Sud profond lui-même qui vous gifle. « Ici, les rafales sont plus fortes, le vent plus dense. Il ne faut surtout pas se laisser surprendre mais au contraire bien anticiper tout pour ne pas endommager le matériel et ne pas se faire peur », a souligné Sam.

L’importance d’anticiper

En effet, dans le Grand Sud, l’anticipation n’est pas seulement un atout stratégique, c’est une nécessité pour naviguer rapidement et en toute sécurité dans l’une des régions les plus hostiles de la planète. Être trop conservateur peut vous coûter de précieux kilomètres, tandis que prendre un risque mal calculé peut s’avérer coûteux. Tanguy Le Turquais l’a appris en lui donnant un coup de pied dans le derrière pas plus tard qu’avant-hier, lorsqu’il a cassé trois lattes de grand-voile lors d’un empannage après la bôme, passé précipitamment, enfoncé dans la bastaque au vent. « Il a fallu réagir assez vite. Cela aurait pu être très problématique mais je suis content car j’ai réussi à le réparer, et dans un délai assez rapide. Cela m’a permis de ne pas trop perdre de terrain sur mes concurrents », raconte le skipper de Lazare qui prend progressivement toute l’ampleur de la navigation dans les 40e Rugissants.

Une petite claque, une grande leçon

« Quand je suis entré dans l’Océan Indien, j’ai emprunté la voie d’un débutant des mers du Sud. Je suis arrivé en me disant « 35 nœuds de fichiers, c’est tout ! », mais en fait, ça ne fait pas ça du tout ! Ça ne sert à rien d’aller dans autant de vent et autant de mer, ce n’est pas efficace du tout ! », raconte Tanguy, qui s’est donc « coaché ​​» par la réalité (pour une fois, assez stricte), à ​​tel point qu’il a mangé la morale à pleine cuillère. « J’ai vu ce que c’était : huit mètres de houle et 55-60 nœuds de vent. Ce n’est pas raisonnable”, a reconnu Tanguy, qui a donc choisi de se déplacer plus au nord hier soir afin d’anticiper le passage d’une nouvelle “patate” attendue jeudi. “Cela va fermer un peu la porte entre l’Australie et la ZEA”, a souligné le marin qui n’a certainement pas fini de se battre encore contre des dépressions furieuses ou des calmes trompeurs. Et pour cause, là où il se trouve, le véritable adversaire n’est pas celui de devant ou derrière, mais plutôt cet immense océan, maître du jeu et de ses règles changeantes.

Retrouvez chaque jour l’analyse METEO CONSULT Marine dans notre dossier spécial Vendée Globe.

 
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