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en cas de censure gouvernementale, la risque-t-elle d’être déclassée ?

l’essentiel
En cas de censure gouvernementale, le Premier ministre Michel Barnier met en garde contre une « tempête financière » en . Qu’en pensent les économistes Nicolas Bouzou, du cabinet de conseil Asterès, et Mathieu Plane, du service d’analyse et de prévision de l’OFCE ?

Nicolas Bouzou : « ce qui se passe est extrêmement grave »

Le Premier ministre et les membres du gouvernement dramatisent-ils la situation en promettant une crise financière en cas de motion de censure ?

Non, non, je suis d’accord avec eux. Et par ailleurs, on constate que la peur de la censure commence à générer des tensions sur les marchés financiers. Ce que l’on appelle le « spread », c’est-à-dire l’écart de taux d’intérêt, entre la France et l’Allemagne, s’est creusé ces derniers jours. C’est un bon indicateur pour mesurer le risque de prêter de l’argent à la France. Pire encore, depuis la dissolution, nos taux d’intérêt ont progressivement augmenté au-dessus de ceux du Portugal, de l’Espagne et, maintenant, de la Grèce. Seule l’Italie paie sa dette à un taux plus élevé que le nôtre. Ce qui se passe est donc extrêmement grave.

Que se passerait-il si, en cas de censure gouvernementale, le budget 2024 était prolongé jusqu’en 2025 ?

Nous entrerions complètement dans l’inconnu. Parce que ce budget 2024 était extrêmement laxiste et déficitaire. Si elle était prolongée de plusieurs mois, cela ferait dérailler encore davantage les finances dans des proportions absolument insoutenables. Et on se retrouverait fin 2025 avec un déficit non pas de 6%, mais d’au moins 7%. On ne peut donc pas se rassurer, comme le font certains parlementaires, dont Marine Le Pen, en disant qu’il faudra seulement reporter le budget 2024. Parce que ce budget nous a justement mis dans une situation clinique.

Comment réagiraient les marchés financiers ?

Ils pourraient faire monter nos taux d’intérêt. Et là, la situation peut commencer à devenir incontrôlable, notamment en France. Tu ne devrais pas jouer avec ça. C’est pourquoi je dis qu’un certain nombre de parlementaires sont absolument irresponsables : ce qui est potentiellement au bout du chemin, c’est bien une crise financière, où les choses échappent à tout contrôle et deviennent complètement hors de contrôle.

Votez-vous pour le budget présenté par le gouvernement ?

Non, car je considère qu’il implique trop d’augmentations d’impôts et pas assez de réductions de dépenses. Mais voilà, c’est la France, tout ça a été bricolé à la va-vite. En revanche, je ne voterais pas pour la censure du gouvernement car il vaut mieux avoir un mauvais budget qu’un gouvernement renversé.

Mathieu Plane : “Personne n’est sûr de ce qui va se passer”

Qu’avez-vous pensé des propos du Premier ministre Michel Barnier sur l’éventuel rejet du budget 2025 ?

J’ai trouvé qu’il forçait peut-être un peu le point. La situation est inédite et, selon la place que l’on occupe sur l’échiquier politique, on aura tendance à plus ou moins accentuer ses conséquences. La vérité est que personne ne sait vraiment ce qui va se passer. A l’heure actuelle, ce n’est pas tant la mauvaise situation budgétaire de la France qui inquiète que la crise politique qu’elle traverse.

C’est à dire ?

Eh bien, les fondamentaux de la France sont bons, il y a des réserves, une épargne abondante, une capacité à générer une certaine croissance, une dette très liquide sur les marchés… Nous sommes donc une des valeurs refuges pour les investisseurs. Le problème est que nous perdons leur confiance. En raison du manque de visibilité politique.

Cela pourrait-il conduire à une crise financière ?

Le mot est un peu fort. En revanche, petit à petit on demande à la France une prime de risque plus élevée, c’est possible. Ainsi, contrairement au porte-parole du gouvernement, je ne crois pas au scénario grec et au risque de défaut. Je crains un scénario italien. L’Italie, en raison de la fragilité de ses finances publiques, paie des taux d’intérêt plus élevés que les autres, ce qui lui coûte cher et pèse sur sa croissance. Pour vous donner une idée, un point de taux d’intérêt supplémentaire coûte plus de 3 milliards d’euros la première année et jusqu’à 30 milliards la dixième année.

Quelle est votre opinion sur le budget présenté par le gouvernement ?

Il s’agit d’un programme de consolidation budgétaire forte pour compenser une forte dérive des finances publiques. Et notamment celle de l’année écoulée, puisqu’on a eu un dérapage de plus de 50 milliards d’euros. Nous allons être le pays de la zone euro avec le déficit le plus élevé… Il faut donc faire quelque chose, trouver le chemin de la reprise. Et je serais plutôt indulgent à l’égard du budget qui nous est présenté, même s’il aura des effets négatifs sur la croissance, que l’OFCE estime à 0,8 point de PIB l’année prochaine.

 
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