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La peut-elle encore se défendre sans les Etats-Unis ?

Kyiv, l’élection du nouveau locataire de la Maison Blanche a été scrutée de près. Il faut dire qu’avec 100 milliards d’euros d’aide en matériel militaire transférés depuis le début du conflit, les Américains sont les principaux contributeurs de soutien à l’Ukraine. Ainsi, l’élection de Donald Trump et ses intentions sur le plan international plongent Volodymyr Zelensky dans l’inconnu, mais l’Otan retient également son souffle après les nombreuses critiques du candidat républicain à l’égard de l’Alliance.

Depuis le 5 novembre, une question demeure : les États-Unis resteront-ils fidèles à leurs alliés ? La Suède a commencé à envoyer quelque cinq millions de brochures à ses habitants le 18 novembre, les encourageant à se préparer à l’éventualité d’une guerre. La Finlande voisine a, pour sa part, lancé un site Internet proposant des conseils de préparation similaires. En , l’inconnu américain pose une question : l’armée pourrait-elle tenir le coup dans un conflit de haute intensité si nos frontières étaient menacées ?

“Sans aucun doute”» a affirmé le général Pierre Schill, chef d’état-major de l’armée, dans un récent entretien au JDD. Une affirmation que l’historien Michel Goya tempère : « Cela dépend de ce que nous appelons la haute intensité. » Selon l’ancien officier de la Marine, la France dispose des moyens techniques pour mener un combat de ce type. « Elle dispose des hommes, des capacités, des compétences, de tous les équipements, de l’armement de contact à l’appui d’artillerie »précise-t-il en mettant le doigt sur un point faible : « volume et durée ».

Les stocks de munitions français augmentent depuis le conflit ukrainien

En 2024, l’armée dispose d’une force terrestre de 77 000 soldats, mais seuls 15 000 d’entre eux pourraient être déployés entièrement équipés. C’est l’équivalent de deux brigades. Par rapport à l’Ukraine, la France pourrait tenir une ligne de front de « 80 kilomètres », mais pour combien de temps ? Michel Goya affirme : « pour tenir sur le long terme, il faut pouvoir renouveler les effectifs, avoir des munitions, etc. »

Longtemps fragiles, les stocks français de munitions augmentent depuis le conflit ukrainien, mais ce choix stratégique se fait au détriment notamment des véhicules de combat. Dans ce domaine, Paris ne produit plus de chars à chenilles, préférant les véhicules à roues. Une décision déconnectée de la réalité du terrain en Ukraine ? “En Europe, dans la perspective d’un conflit de haute intensité, ces véhicules sont moins lourds, moins efficaces dans les terrains boueux et embarquent moins d’armes que les chars”remarque Michel Goya.

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Supériorité technologique limitée

Dans les airs, Paris compte environ 250 avions de combat, dont 138 Rafale. En comparaison, la Russie compte plus de 1 100 chasseurs, mais pour Xavier Tytelman, rédacteur en chef numérique du magazine Air & Cosmos, “La masse n’est pas tout”. Selon lui, les avions russes sont équipés de radars à plus courte portée et sont moins discrets tandis que “leurs missiles sont souvent limités à une portée inférieure de 40 kilomètres”il explique.

De plus, le Rafale peut assurer des missions variées alors que d’autres pays ont besoin de plusieurs types d’avions pour des actions spécifiques. « Une polyvalence qui a poussé huit pays à choisir le Rafale »souligne Tytelman, affirmant que les avions produits par Dassault aviation pourraient abattre jusqu’à quatre Sukhoi Su-35 russes. Cependant, contre la Russie “nous n’aurions probablement pas assez de missiles pour détruire tout leur système de défense”il admet. Enfin, la chaîne de production du Rafale est aujourd’hui capable de fabriquer 36 avions par an, qui ne sont pas uniquement destinés à la France, tandis que Moscou en produit une quarantaine pour elle-même.

Dans le domaine maritime, la Marine nationale est « l’un des plus efficaces et formés d’Europe »estime Patrick Chevallereau, chercheur associé à l’Institut de relations internationales et stratégiques. Sa flotte comprend un porte-avions, trois porte-hélicoptères amphibies et quelques frégates. Suffisant en cas de désengagement des États-Unis et alors que Paris possède le deuxième espace maritime du monde ? « Le format n’est pas adapté. Nous disposons d’une quinzaine de frégates de premier ordre, dont certaines sont insuffisamment armées. Dix-huit serait un minimum pour les missions que nous devons accomplir jusqu’à l’Indo-Pacifique »concède-t-il.

La dissuasion, la défense ultime

La Marine possède dix submersibles. D’ici 2030, six d’entre eux seront parmi les plus modernes dotés de sous-marins nucléaires d’attaque (SNA) de type Barracuda. “Ils offrent une grande discrétion, une capacité d’emport d’armes importante et des systèmes de combat efficaces”explique Patrick Chevallereau. Mais la France s’appuie principalement sur quatre sous-marins nucléaires lance-missiles (SNLE). Cachés au fond des océans, toute l’année, ils sont équipés de seize missiles emportant chacun plusieurs têtes nucléaires. Malgré un coût important, ils sont considérés comme l’assurance vie de la nation, car ils dissuadent tout adversaire de menacer les intérêts vitaux de la France.

La France fait partie des cinq plus grandes puissances nucléaires avec 290 têtes nucléaires, réparties entre les composantes aérienne et maritime. Comparée aux 6 000 hommes russes, la force de frappe semble minime. Mais, pour Héloïse Fayet, chercheuse à l’Institut français des relations internationales, cette différence est acceptée : « Nos arsenaux sont calibrés en fonction de nos besoins et de nos adversaires potentiels. Nous sommes dans une logique de « stricte suffisance ». » Même si la France dispose d’une armée « d’échantillon », aux capacités limitées dans tous les domaines, elle reste avant tout une puissance nucléaire. Cela l’a jusqu’à présent protégé des attaques extérieures.

 
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