FRANCE Musique – DIMANCHE 24 NOVEMBRE À 11H – DIFFUSION
Élégante et accueillante, Priscille Lafitte est l’image de « Musique émoi », portrait musical d’une personnalité des arts ou des sciences, qui rassemble chaque dimanche plus de 210 000 auditeurs sur France Musique. Une émission précédemment réalisée par Elsa Boublil, reçue comme “un cadeau” en septembre 2020, et cela avec sa réalisatrice Claire Lagarde, remplacée aujourd’hui par Françoise Cordey, et Maud Noury, assistante de production, qu’elle sait si bien partager.
D’une voix chaleureuse, Priscille Lafitte accompagne ses invités, leur suggère des idées et, dit-elle, la musique fait le reste : « C’est elle qui fait avancer la réflexion, c’est elle qui fait le « travail » ! Et l’intelligence, la présence d’esprit, la générosité du convive va jusqu’au bout. »
Parmi les dernières émissions, on pense à celle où l’actrice Catherine Hiegel, les larmes au bord des larmes, disait : « La musique et la voix de papa sont la même chose. » Il n’est pas rare que le producteur garde un paquet de mouchoirs à portée du microphone. Il n’est pas rare non plus que le spectacle ressemble à une séance de psychanalyse. « Ce n’est peut-être pas pour rien que je laisse une bonne partie de l’architecture du salon se construire au fur et à mesure, se produire, comme par libre association… Le questionnaire envoyé au préalable aux invités a déjà cette fonction : chercher à ouvrir » tiroirs « de souvenirs »confie Priscille Lafitte, avant d’ajouter : « Mais mes capacités d’analyse s’arrêtent là ; et la relation analysant-analysé n’est pas entre l’intervieweur-interviewé, mais entre l’invité et la musique : c’est bien la musique qui fait l’objet du transfert, nous y ajoutons beaucoup de nos propres émotions, de nos projections, de nos fantasmes et nos histoires. »
« Une forme de communion »
Elle entretient elle-même une relation intime et familiale avec la musique. Sa mère, qui dirigeait une chorale, lui jouait du Bach et de Chopin au piano, sa sœur est violoniste professionnelle. Après des études de journalisme, Priscille Lafitte choisit la radio. Ses références ? « L’insurmontable Claude Maupome [disparue en 2006] et son « Concert égoïste » puis « Comment l’entendez-vous ? Et aussi Laure Adler pour sa présence au micro ; Augustin Trapenard comme un maïeuticien hors pair de la pensée ; Rebecca Manzoni pour le sens de l’écriture et du rythme à la radio. »
Parmi sa liste d’invités de marque, elle cite les auteurs Hélène Cixous et Amélie Nothomb, Alexander Neef, l’actuel directeur de l’Opéra de Paris, ou encore le sociologue Edgar Morin. Celui-ci également avec le comédien Didier Sandre, sociétaire de la Comédie-Française : «Est-ce sa relation avec Bach [il manque très rarement à l’appel de tous ces entretiens tant Bach est un socle très important de nos psychés musicales] ou son rapport au sacré au théâtre comme en musique, qui m’a interpellé ? J’avoue que j’ai moi aussi grandi dans une culture protestante, ce qui explique peut-être un goût prononcé non seulement pour Bach, pour le chant, mais aussi pour la recherche d’une forme de communion, d’une manière de faire société autour/à travers la musique, et cette conviction que nous sommes tous égaux dans ce rapport au « sacré » que la musique contient/permet. Patrick Boucheron parle très bien de ce besoin de « réconciliation » dans la société, notamment à travers la musique : j’y suis très sensible ! »
« De manière sauvage »
C’est bien. L’historien et professeur au Collège de France, producteur depuis cette année de “Allons voir !” », dimanche de 14h à 15h sur France Culture, est l’invité du jour. Qui avoue immédiatement : « Je ne suis pas un spécialiste de la musique classique : ce n’était pas ma première discothèque. C’est venu d’une manière sauvage, abrupte et désordonnée. » Il évoque sa participation à l’écriture des cérémonies des Jeux Olympiques et Paralympiques au cours desquelles il a été entendu « toute la diversité de la musique française ».
Et tant pis si cette partie n’a pas pu, finalement, être conservée au montage, il aura dit aussi ceci, lui, l’historien à l’oreille si fine, lui, celui attentif aux bouleversements du monde : que nous, parfois « le droit au repos et à la beauté. Le droit, et peut-être le devoir, notamment à Radio France, de donner du repos à la réflexion et de ne pas se laisser systématiquement emporter par le cours des événements. ». Alors que leEtude n°6 de Philip Glass se fait entendre, sous les doigts de Vikingur Olafsson, ses paroles, longtemps après la traversée de la Seine, résonnent encore : l’émotion.
“Musique émoi”, a program by Priscille Lafitte. Available on France Musique and all the usual listening platforms (Fr., 2024, 58 min).
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