Pour la fin de la COP29, François Gemenne revient sur l’enquête annuelle de l’Observatoire international du climat et des opinions publiques, commandée par EDF à IPSOS, une enquête mondiale sur la perception du changement climatique. “La COP29 rassemble le monde entier, mais le monde est représenté par les gouvernementsdit-il. Et pour comprendre les positions de ces gouvernements, il est encore utile de regarder l’état de l’opinion publique sur le changement climatique dans ces différents pays – même si les gouvernements représentés à la COP29 sont loin d’être tous des gouvernements démocratiques. , évidemment« .
Selon François Gemenne, c’est tout l’intérêt de cette enquête qui est réalisée dans 30 pays, sur un échantillon total de 23 500 personnes, interrogées en ligne et sélectionnées selon la méthode des quotas. Cet échantillon couvre les deux tiers de la population mondiale.c’est ce qui est vraiment intéressant – car cela permet de comparer l’opinion des Français à celle des autres pays, et leur évolution dans le temps», explique-t-il.
franceinfo : qu’apprend-on dans cette enquête ?
François Gemenne : La première leçon, c’est que les gens sont de moins en moins inquiets du changement climatique : 35% se disaient très inquiets en 2022, seulement 29% en 2024. Pour la première fois, en France, il y a plus de gens qui s’en moquent (30%), que les personnes très inquiètes. Dans le reste du monde, 40% se disent très inquiets : 11 points de plus qu’en France. Il est intéressant de noter qu’en France, c’est surtout parmi les électeurs de gauche que l’on constate une baisse d’inquiétude. Chez les électeurs républicains, à l’inverse, il est en augmentation. Logiquement, en France comme dans le monde, la priorité environnementale est en déclin. Et donc, évidemment, c’est compliqué de demander ensuite aux gouvernements d’agir davantage. Pourtant, sept personnes sur dix, en France et dans le monde, estiment que c’est aux gouvernements d’agir en premier : nous ne sommes pas tirés d’affaire.
Est-ce lié à la montée du climato-scepticisme, que l’on constate dans d’autres sondages ?
Pas seulement ça. Le déni climatique reste important en France, mais pas plus que dans le reste du monde. Dans le monde comme en France, nous avons 10 % d’irréductibles qui pensent que le changement climatique n’existe tout simplement pas – un chiffre légèrement supérieur au nombre de personnes qui pensent que la Terre est plate. Mais surtout, un grand quart de la population mondiale pense que le changement climatique n’est pas lié aux activités humaines. Cependant, il faut le rappeler encore et encore, le dernier rapport du GIEC est clair : le changement climatique actuel est entièrement dû aux activités humaines, à 100 %. Cela n’empêchera évidemment pas certains politiques, en France comme ailleurs, de prétendre le contraire sur les plateaux de télévision, mais il est de notoriété publique que ces politiques ont mené des études approfondies en climatologie, qui leur permettent de contredire avec assurance les travaux de l’ensemble du gouvernement. communauté scientifique mondiale.
Y a-t-il des pays où cela est plus prononcé ?
Oui, il existe des différences notables entre les pays. Aux États-Unis, par exemple, 44 % de la population est dans le déni. A l’inverse, on n’en compte qu’un quart au Brésil, au Mexique, en Turquie et en Corée du Sud. Mais c’est sur la voiture électrique que le contraste est le plus étonnant : seuls 18 % des Français pensent que la voiture électrique est meilleure pour le climat que la voiture à essence, contre 34 %, soit environ le double, de la population mondiale. Et peu importe que toutes les études montrent que l’empreinte carbone d’une voiture électrique, sur tout son cycle de vie, est 2 à 6 fois meilleure que celle d’une voiture thermique, ça ne vaut pas une bonne vidéo sur YouTube d’un indépendant. chercheur qui dira le contraire.
Ce qu’il faut faire?
Premièrement, 40 % des Français considèrent qu’il est déjà trop tard quoi qu’on fasse et 22 % estiment qu’ils devront changer de lieu de résidence dans les 10 prochaines années à cause du changement climatique. On sent ici émerger une certaine forme de résignation. Même si cela reste majoritaire, les Français sont de moins en moins prêts à changer de mode de vie, et s’appuient de plus en plus sur le progrès technologique. Et l’acceptabilité des politiques publiques varie, avec néanmoins un rejet très fort des politiques fiscales. Tout cela n’est pas très engageant, mais je crois que cela devrait surtout nous donner matière à réflexion sur les stratégies de communication et de mobilisation sur le climat. Car là aussi, le chemin est encore long.
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