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Dans l’Aude, le spectre de la Trump Tax plane à nouveau sur la filière vitivinicole

Donald Trump, président des Etats-Unis : cette perspective replonge la filière vitivinicole française dans les affres de la taxe éponyme, l’augmentation des droits de douane imposée par le républicain lors de son premier mandat entre 2019 et 2021.

Au lendemain des élections américaines, quel vigneron n’a pas pensé à la fameuse taxe Trump, la taxe de 25 % sur les vins tranquilles français instaurée par les États-Unis en octobre 2019 ? Suspendue par Joe Biden, mais pas levée, cette taxe reste, telle une épée de Damoclès, au-dessus de la tête des vignerons français.

C’est à la suite du conflit entre Boeing et Airbus que la taxe a été mise en place. Nous nous souvenons tous du leitmotiv de Donald Trump, « l’Amérique d’abord ». Pour la filière vitivinicole, cruellement touchée par une crise structurelle, cette taxe n’est pas anodine. A l’époque, la filière vitivinicole française avait subi un manque à gagner de 600 millions d’euros en un an sur le marché américain.

Le spectre de la politique protectionniste américaine fait frémir et la fédération des exportateurs français de vins et spiritueux avait, dès l’élection de Donald Trump, réagi, encourageant la future administration. « d’engager rapidement un dialogue transatlantique constructif et fructueux ».

Pour l’Occitanie, les USA représentent 15% des exportations

Aux USA, la réalise 4 milliards d’euros de chiffre d’affaires, c’est pour nous la destination la plus stratégique, celle où l’on crée le plus de valeur ajoutée, celle où la marge est la plus élevée. C’est le premier pays consommateur au monde et pour nous c’est important car la France est le premier fournisseur de vin en valeur des Etats-Unis, explique Jean-Marie Fabre, président national des Vignerons Indépendants. Pour l’Occitanie, les USA représentent 15% des exportations en valeur.

Pour le leader syndical, lui-même vigneron à Fitou, personne ne connaît qui est Donald Trump, ni ses valeurs : le protectionnisme et le patriotisme. « Je regrette que la France n’ait pas profité des quatre années Biden pour mettre tout son poids derrière l’Union européenne et résoudre définitivement le différend économique Boeing-Airbus. En un an, 600 millions d’euros ont été perdus et la nouvelle administration pourra très facilement rétablir la taxe Trump suspendue.»

Pour Coop de France vin, le président régional, Ludovic Roux, ne se fait pas d’illusion : « Les États-Unis ont seulement imposé un moratoire sur cette fameuse taxe, ils peuvent donc très facilement la rétablir. Et bien sûr, si tel est le cas, cela ne fera qu’ajouter aux difficultés rencontrées actuellement par les viticulteurs. L’Union européenne doit absolument nous défendre ou nous indemniser.»

Les pays européens seront-ils placés sous le même toit ?

Mais au Comité interprofessionnel des vins du Languedoc (CIVL), la tendance est plus combative que pessimiste : « Cette taxe peut être une opportunité pour les vins du Languedoc car ils sont moins chers que ceux des autres régions et de très grande qualité, explains Pierre Bories. Ce qui a été fait et qui a perturbé les parts de marché, c’est un décalage de neuf mois avec l’Italie. Nous n’avions rien pu faire et, pendant ce temps, l’Italie avait pris des actions que nous n’avions pas pu récupérer. Georgia Méloni et Elon Musk sont proches et face à la stratégie de division de Trump, il faut être vigilant sur le positionnement de tous les pays européens. Le président ajoute un autre fait important : « Tout dépend aussi des accords passés entre les Etats-Unis et les pays d’Amérique du Sud, mais aussi l’Australie. Parce que lors du premier mandat Trump, nous avons perdu des parts de marché. La réponse est très complexe : que va-t-il penser des vins australiens ? S’il impose des impôts à tout le monde, nous sommes sur la même ligne de départ et, là, que le meilleur gagne !

Françoise Antech à Limoux : « Les Américains adorent les bulles et nous sommes très bien placés en termes de rapport qualité/prix ! »
La rédaction – Claude Delbourg

Des repères numérotés

Aux États-Unis, 33,314 millions d’hectolitres de vin sont consommés par an : 24,3 millions d’hectolitres sont produits localement, dont une grande partie est consommée dans le pays. Les Américains importent 12,265 millions d’hectolitres : principalement des vins italiens et français.

Les États-Unis représentent le deuxième pays exportateur de la France après l’Allemagne.

La France exporte 12,7 millions d’hectolitres de vins toutes catégories confondues dans le monde, dont 1,6 million vers les Etats-Unis et 1,2 million de vins tranquilles, 194 000 hl pour la région dont 71 000 hl d’AOP Languedoc-Roussillon.

Rappelons que si le Languedoc Roussillon était un pays, il serait, avec 8,9 millions d’hectolitres, le 8ème producteur mondial de vin, car il représente 4% de la production mondiale. La production de son vignoble est équivalente à celle de l’Australie, de l’Afrique du Sud, de l’Argentine et de l’Allemagne et est supérieure à celle du Portugal.

Ils exportent aux États-Unis

Aux Celliers des Demoiselles, à Saint-Laurent de la Cabrerisse, nous souhaitons adresser un message positif dans le contexte morose actuel : “Nous nous battons toujours sur l’export, les USA représentent 10% de nos ventes à l’export, souligne la réalisatrice, Anaël Payrou. Notre agent américain nous a fait part de sa position : il attend, car il ne sait pas si la taxe sera appliquée ou non. En attendant, nous refusons de penser négativement. Les États-Unis et la Chine sont des marchés dynamiques. Le vin est le fusible du commerce international.

Au Château Lastours, dans les Corbières, les Etats-Unis, avec 20%, représentent l’un des meilleurs marchés à l’export. “Le rétablissement de la taxe Trump serait une mauvaise nouvelle, c’est quand même nous qui devrons nous incliner”, réagit spontanément Thibaut de Braquilanges, le réalisateur. La dernière fois, les Américains nous ont acculés et nous avons dû baisser nos prix pour pouvoir vendre. Les distributeurs nous ont carrément dit qu’ils ne pouvaient pas assumer ces 25% supplémentaires, que c’était à nous de le faire ! Il faudra aller encore plus loin dans le domaine pour montrer que la qualité justifie le positionnement prix ! Soit on maintient, avec un effort de notre côté, soit on baisse notre gamme pour vendre, car en quatre ans nous avons pu asseoir notre présence et nos références, ce serait dommage de faire marche arrière.

Les Américains adorent les bulles, et, noté avec humour Françoise Antech, from the famous Limoux house Maison Antech, « Ils sont moins snobs que les Français ! Le nom crémant a une très belle image. Ils le goûtent et ensuite ils demandent : combien ? Quand on raconte aux Américains que la blanquette a été fabriquée à l’abbaye de Saint-Hilaire en 1544, ils s’intéressent car ils sont très friands d’Histoire !

La maison Antech, qui produit 98 % de Crémant et de Blanquette, exporte 85 % de ses vins, dont 15 % aux Etats-Unis. Mais la taxe Trump les a épargnés la dernière fois. Cette fois… mystère ! Françoise Antech est optimiste : «Les États-Unis produisent peu de vins effervescents et nous sommes très bien positionnés par rapport à la concurrence. Et en vendant sur le circuit des cavistes et de la restauration, nous ne sommes pas sur le créneau de la grande distribution. Donc, même si nous ne savons pas ce qui va réellement se passer, nous allons rester offensifs et nous préparer à nous muscler comme nous avons pu le faire par le passé !

 
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