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les habitants du camp du Chemin des Limites, oubliés depuis trente ans

Une centaine de personnes sont installées le long du sentier de trois kilomètres au cœur de la forêt, aux limites de Castres, Portets et Saint-Selve. Plusieurs caravanes, un seul point d’eau, des abris de fortune et surtout des montagnes de déchets divers : plastiques, vêtements, ferraille, épaves de voitures… Selon la municipalité, le lieu sert de dépotoir pour les personnes extérieures au camp.

« Ce sont des êtres humains, il y a des enfants. Imaginez quand il pleut, c’est sombre. Alors les gens ferment les yeux, ils sont loin de la ville, on ne les voit pas. Comment pouvons-nous nous considérer comme une société civilisée lorsque nous permettons aux gens de vivre dans de telles conditions ? » s’exclame Gracia Perez, la maire de Castres-Gironde.


Les détritus s’entassent à côté des caravanes et des véhicules.

PAR EXEMPLE

Le camp d'(in)fortune installé depuis au moins trente ans sur le Chemin des Limites peut-il être qualifié de bidonville ? C’est la question sur laquelle l’État et les collectivités ne semblent pas trouver d’accord. Alors que certains recherchent un responsable, la maire de Castres-Gironde se dit désemparée. « La commune ne peut résoudre seule cette situation et la communauté de communes de Montesquieu veut s’en laver les mains », assure l’élu en présentant les documents accumulés au fil des années.

30 enfants à l’école

Monia et Joseph Lafleur, 35 ans, deux enfants, s’en foutent de la paperasse. Ils attendent inlassablement des jours meilleurs, « un endroit où vivre dignement ». Il est né au Chemin des Limites : « on demande juste l’eau courante, l’électricité et des toilettes. On peut se payer un emplacement, on fait des petits boulots. » « Nous ne demandons pas de palais », ajoute son épouse, arrivée il y a près de vingt ans. Elle porte la voix des 12 familles qui vivent ici. « Depuis des années, on voit des élus, le préfet, défiler, mais rien ne se passe », déplore la jeune femme.

« Comment pouvons-nous nous considérer comme une société civilisée lorsque nous permettons aux gens de vivre dans de telles conditions ? »

Une trentaine d’enfants qui y grandissent fréquentent régulièrement l’école de Castres et le collège Saint-Selve. « Le matin, les enfants prennent le bus pour aller à l’école, j’emmène mon fils chez l’orthophoniste. Comme une vie normale… sauf qu’on n’a pas de lieu digne de ce nom », souffle une jeune femme.

En 2017, les élus départementaux, communautaires et étatiques ont travaillé ensemble pour ce qui semblait être un début de solution. Six logements d’urgence rebaptisés « La belle Etape » ont été construits sur un terrain attenant. Mais les maisons ne peuvent pas accueillir toutes les familles et ne correspondent pas aux habitudes des voyageurs. « Ce n’est pas notre vie », dit Monia.


Six maisons en bois ont été construites par Emmaüs sur le site en 2017.

PAR EXEMPLE

Conscients que la menace d’expulsion menace – le terrain appartient à un propriétaire privé – les habitants s’accrochent à l’espoir de créer des terres familiales publiques locatives. Ces emplacements caravanes sont équipés d’un bloc sanitaire et de compteurs individuels pour l’eau et l’électricité. Les locataires paient le loyer et les factures de services publics.

Le plan départemental d’accueil des voyageurs 2019-2024 prévoit la construction de trois parcelles locatives familiales sur le territoire : 10 places à Saint-Médard-d’Eyrans, 12 places à Portets et 20 places à Podensac.

L’État est-il responsable ?

« Nous avons rencontré à plusieurs reprises à ce sujet des élus. C’est un sujet complexe. Les communautés de communes voisines, Montesquieu et Convergence Garonne, ne respectent pas les exigences du schéma départemental. Un terrain avait été identifié à Portets, juste à côté du Chemin des Limites, mais le sol n’était pas assez stable », précise le sous-préfet de Langon, Vincent Ferrier.


Le terrain attenant à Portets était autrefois prévu pour créer un terrain familial.

PAR EXEMPLE

Du côté de la communauté de communes de Montesquieu, le président Bernard Fath juge qu’il appartient à l’État de supprimer ce « bidonville » et d’assurer le relogement de ces habitants, en vertu d’une circulaire du 25 janvier 2018. « Il n’y a aucune raison pourquoi ce qui se fait à Bordeaux ne devrait pas être appliqué ici », dit-il en référence à l’évacuation du bidonville de Brazza.

Le représentant de l’État a une autre interprétation. « Ces gens vivent en caravanes, même s’il peut y avoir un peu de « cabanisation », et c’est une population issue des gens du voyage et non des populations roms comme à Bordeaux. Nous sommes donc bien dans la compétence d’accueil des voyageurs, communautés de communes. Ces projets sont subventionnés par le Département et l’Etat à hauteur de 60%.

La CdC Montesquieu a acheté un terrain à Cadaujac pour y créer un espace d’accueil d’ici 2027. Du côté de Convergence Garonne, il existe un projet à Podensac au pied du pont de Béguey, mais un bidonville y est également installé actuellement. La possibilité d’un terrain familial à Preignac est également à l’étude.

 
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