Le silence et la brume descendent sur la Tinée. Le major Steve Doussin retrouve la vallée exactement telle qu’il la connaissait il y a un an, lors de sa nomination comme commandant de la communauté de brigades de gendarmerie de Saint-Etienne-de-Tinée. Il sait désormais que le calme qui règne sur cette dernière partie de saison ne sera que de courte durée, période nichée entre les tumultes de l’été et de l’hiver. Il connaît désormais toutes les facettes de la vallée dont il dresse le portrait comme un premier bilan.
« J’ai occupé le même poste à Roquestéron, entre 2015 et 2016. J’avais donc l’expérience de la montagne et des feux de forêt. J’avais aussi l’habitude de travailler avec [l’Office Français pour la Biodiversité]“commence le militaire de 52 ans. Avant de concéder que le secteur de l’Estéron “C’est beaucoup plus sauvage. A Tinée, il y a des vagues d’affluence.
Cols mythiques et Tour de France
Comme lors du Tour de France, les 19 et 20 juillet, avec jusqu’à 30 000 spectateurs par jour. «Sous la direction de la compagnie de gendarmerie de Puget-Théniers, il nous a fallu plusieurs mois de préparation avec la préfecture, les mairies, les pompiers (…) Nous avons beaucoup travaillé notre plan de circulation (…) Une fois le Tour terminé, il y a eu un soulagement.
Mais très vite, l’été impose son rythme. Et un constat s’est dégagé : les routes de Tinée sont loin d’être dépeuplées, “contrairement à la plupart des zones rurales (…) On y retrouve une situation similaire à celle des territoires alpins où les cols mythiques vont attirer de nombreux motards et cyclistes”observe le gendarme.
Dans sa ligne de mire : les cols de la Bonette et de la Lombarde, notamment. Le premier, soi-disant classé comme le plus haut d’Europe grâce à une boucle, culmine à 2 802 mètres d’altitude. Et attire jusqu’à 100 000 véhicules par an avec des pointes en été. La seconde, reliant l’Italie et la France, détient également son record, avec à proximité le sanctuaire de Sant’Anna di Vinadio, le plus haut d’Europe (2 035 mètres).
« Avec la médiatisation du Tour de France, ça nous a amené beaucoup de monde »continue le soldat. « Pour certains [usagers de la route]il y a un manque de connaissance des routes de montagne, il a fallu se mobiliser pour la prévention.
Des problèmes de la côte aux montagnes
La prévention s’accompagne également de dépistage. “Comme le reste de l’année”souligne le militaire qui déplore une augmentation du nombre d’infractions constatées pour des comportements addictifs et dangereux. Si aucun chiffre d’accidentalité n’est communiqué, le gendarme s’engage à donner une tendance générale et s’assure que “Le nombre d’accidents est stable (…) Il y a moins de conduite sous l’emprise de l’alcool”. Il constate également que la consommation de cannabis reste stable. Contrairement à la cocaïne qui est « en nette augmentation »ne se limite plus à « classes aisées ».
La consommation de drogues est également récurrente « quand les problèmes du littoral arrivent à la montagne ». En hiver, les discothèques des stations sont confrontées aux mêmes difficultés que celles de leurs voisines côtières. Le majeur décrit “un public assez jeune avec, entre autres, des individus qui viennent se défouler, trop boire, se droguer, se battre.”
Jusqu’à 100 000 skieurs à Noël
« Cela va de pair avec un afflux de population très important »poursuit-il en faisant référence aux nombreux skieurs qui se ruent vers Isola 2000 et Auron, principalement. Ces stations avaient atteint à elles seules un record de 100 000 skieurs cumulés lors des vacances de Noël 2022. « Cette année, c’était plutôt 60 000 personnes de plus dans la vallée (…) C’est un gros défi. On se coordonne beaucoup avec les pompiers et le PGHM [Peloton de Gendarmerie de Haute Montagne, basé à Saint-Sauveur-sur-Tinée] pour les skieurs blessés mais aussi pour la recherche de personnes.
Au sein de la seule communauté des brigades de gendarmerie, douze personnels sont déployés sur Isola 2000 et six sur Auron, renforçant les onze militaires stationnés à l’année dans la vallée.
Quand on couvre 16,5% des Alpes-Maritimes, ce n’est pas de trop. “Oui, on ne s’ennuie pas”» confirme gentiment le commandant. Ce qui veut dire qu’il ne regrette pas d’avoir quitté Mayotte, où il était auparavant en poste ? « Mon père était aussi gendarme, j’ai grandi de caserne en caserne. Découvrir un territoire est toujours un défi.
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