R.Ambaud repart en guerre. Vendredi 8 novembre, trois jours avant l’armistice 14-18, 170 collégiens de La Brède ont revêtu l’uniforme de soldat pour une reconstitution historique à grande échelle.
L’enfer des tranchées, c’est maintenant. Le directeur de l’établissement catholique Emmanuel Vilbois met ses bataillons en ordre de marche au son de la Marseillaise. Des étudiants en treillis saluent les anciens combattants (les vrais). Le jeu de rôle concocté par le professeur d’histoire Nicolas Batiot est minutieux. « Un collègue professeur de sport m’a proposé en 2020 de créer une tranchée dans le bois du collège pour animer un atelier sur la Première Guerre mondiale. » Depuis, chaque année pendant une journée, les élèves de troisième année viennent armés de pioches et de pelles pour creuser plus profondément la tranchée qui ferait jaloux les paloumayres du Sud Gironde.
Renforcer les bras et le cerveau
Juste une autre façon de renforcer vos bras. Et surtout le cerveau : « On n’a pas besoin d’aller dans les Ardennes. Nous avons notre tranchée maison», sourit l’enseignant. Les jeunes plongent les deux pieds dans l’histoire, coiffés d’un casque de soldat sur la tête. Des éclairs, des bruits d’obus, des fumigènes. Et tant pis pour ceux qui perdent leurs chaussures dans la boue. « Soldats, allez au front en silence », ordonne une enseignante en croisant les doigts pour que ses élèves ne meurent pas de dysenterie. « Faites attention aux poux et aux rats. »
Les élèves soldats chantent une chanson apprise en classe : « Au revoir la vie, au revoir l’amour, au revoir à toutes les femmes. C’est fini, c’est pour toujours, cette guerre infâme. » Un écolier lit une lettre de Poilu, écrite juste avant le grand sacrifice : « À mon petit Armand. Vous ne pouvez pas comprendre ce qui se passe en ce moment. La guerre, ses horreurs, ses souffrances. Cette carte sera un souvenir de votre père. Il espère qu’à l’avenir, les hommes seront meilleurs. Puissiez-vous ne jamais être obligé de vivre la vie que je vis actuellement en compagnie de papas qui, comme moi, ont laissé des petits anges à la maison. Soyez très gentil avec votre mère et ceux qui vous élèveront. »
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Une histoire vivante
Les tirs se sont arrêtés. Direction le cimetière, façonné à côté de la tranchée. Les étudiants réalisent des ateliers dans les chapiteaux prêtés par la mairie : communications au quartier général, soins à l’infirmerie, soupe Poilu et base arrière. Des réservistes du groupe de soutien de la base de défense de Bordeaux présentent les différents uniformes de la Grande Guerre et le fameux pantalon rouge garance de 1914. Dans une salle proche de l’exposition, des élèves de troisième jouent une petite pièce de théâtre. Un hommage aux femmes qui ont tenu le pays à bout de bras et qui ont guéri les visages brisés.
Fin de la reconstruction. C’est l’heure de partager le repas des survivants : le rata. Le ragoût de pommes de terre et de haricots est versé dans des boîtes de conserve. Un vrai régal après toutes ces émotions. « On comprend mieux l’histoire lorsqu’elle est racontée de manière vivante », défend le professeur d’histoire. Nicolas Batiot envisage prochainement un voyage sur les plages normandes. Normalement, dans quelques semaines, ses élèves étudieront la Seconde Guerre mondiale.
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