D’où viennent les lynx du Jura, massif français où le félin est le plus présent ? Qui les a réintroduits et quand ? A l’occasion du 50ème anniversaire de la réintroduction du lynx dans le massif du Jura (1974-2024), retour sur son histoire.
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«Ils ont été relâchés dans le Jura suisse et ont traversé la France par leurs propres moyens», livre d’Yves Bongard, responsable de l’association Avenir Loup Lynx Jura pour le canton de Neuchâtel. Deux lâchers officiels ont eu lieu dans ce canton suisse en 1974 et 1975. Deux couples de lynx ont également été relâchés dans le Jura vaudois en 1974.
Pourquoi la Suisse a-t-elle décidé de réintroduire le lynx sur son territoire ? Pourquoi le lynx a-t-il disparu en Suisse et en France ? Durant la seconde moitié du XIXe siècle, la Suisse connaît une croissance économique. Le pays s’industrialise et accélère la surexploitation de ses forêts. « À partir du moment où nous n’avons plus de forêts, la population d’ongulés disparaît » note Yves Bongard. Les ongulés sont des animaux dont les pattes se terminent par des sabots comme le cerf, le chevreuil et le chamois.
« Dès lors, le lynx n’avait plus rien à manger et se rapprochait des animaux de la ferme ». Leur rapprochement avec les humains a donc intensifié et facilité leur persécution. De plus, contrairement aux loups et aux ours, le lynx dépend uniquement de la chasse pour se nourrir. Les loups peuvent compter sur les charognes, et les ours peuvent hiberner et se nourrir de plantes, tandis que le lynx doit avoir un minimum d’ongulés pour chasser. Parmi les grands prédateurs présents en Europe, le lynx est le plus sensible à la destruction de son habitat naturel.
Dans le Jura français, le félin avait également disparu à la fin du XIXème siècle. A cette époque, se produisait, comme en Suisse, « un massacre pur et simple de toute la faune sauvage », testifies Patrice Raydelet, founder and secretary of the Pôle Grands Prédateurs Jura. And to add: « Il y avait beaucoup de déforestation, il ne restait plus de chamois ni de cerfs ». La dernière trace d’un lynx remonte à 1885, date à laquelle le dernier lynx du Jura français fut abattu. “C’était sur la commune de Salins-les-Bains”.
«Au XIXe siècle, le gouvernement suisse a décidé qu’il fallait reconstituer les forêts», dit Yves Bongard. Les populations d’ongulés se sont progressivement rétablies grâce à une protection et une gestion améliorées, mais aussi grâce à une réintroduction active. “Nous nous sommes rendu compte qu’il y avait de la place pour un prédateur car il y avait trop d’ongulés et cela créait des problèmes dans la forêt, donc le lynx était le bienvenu à ce moment-là”, il explique. Les interdictions de chasse toute l’année ont permis aux populations de lynx encore présentes en Scandinavie, en Europe du Nord-Est et dans les Carpates de se rétablir à partir du milieu du XXe siècle.
Mais le félin ne s’est pas rétabli naturellement dans la partie occidentale de l’Europe. Les régions forestières ont été fragmentées par des routes, des zones industrielles ou même des déserts agricoles. Un couple de lynx capturé dans le sud de la Tchécoslovaquie a été transporté en Suisse via les zoos d’Ostrava et de Bâle et relâché le 23 avril 1971 dans le canton d’Obwald. Au total, 16 individus ont été réintroduits entre 1971 et 1980 dans les Alpes suisses et 10 autres entre 1972 et 1975 dans le Jura. Tous étaient originaires des Carpates.
C’était la région, le canton qui s’occupait des personnes libérées. La Suisse a souhaité réintroduire le lynx et a fait appel à des bénévoles comme Archibald Quartier.
Yves Bongard, responsable de l’association Futur Loup Lynx Jura
Selon Yves Bongard, cette réintroduction s’est faite avec discrétion : « Tout s’est fait en cachette. Il n’y a eu aucune annonce officielle ». Des réintroductions ont été réalisées au cours des étés 1974 et 1975, en juillet. «A chaque fois, on retrouve des articles de presse de septembre avec la question : Y a-t-il des lynx dans le canton ou pas ?» précise-t-il.
Le 23 septembre 1975, une conférence de presse officielle annonçait qu’un couple de lynx avait été réintroduit au cours de l’été. A cette occasion, les autorités ont justifié leur retard de communication : « Pourquoi n’avons-nous rien dit ? Parce que c’était le seul moyen de prouver de manière irréfutable que ce n’était pas un problème. ».
L’accueil du lynx dans le Jura français fut d’abord hostile. « La première femelle à passer côté français a été tuée en 1974 »précise Patrice Raydelet. Par la suite, l’arrivée du lynx fut accueillie avec beaucoup de suspicion. « Les gens ne connaissaient pas cet animal. Des décennies plus tard, ils pensaient encore qu’il s’agissait d’un animal exotique. ». Durant les années 80 et 90, le lynx est devenu un sujet sensible, il y a eu des conflits entre pro et anti-lynx. « Dans le Jura, le mot lynx était tabou », souligne-t-il.
Cependant, le lynx n’a pas une aussi mauvaise image que le loup auprès du grand public. « Ce qui est bien, c’est qu’il a un beau visage. La population l’a immédiatement comparé à un gros chat. Cela a joué en sa faveur. commente Patrice Raydelet. Le Jura français est estimé à environ 150 individus. Aujourd’hui, « L’acceptation fait quasiment l’unanimité parmi la population du massif jurassien ».
Célébrons les 50 ans du retour du lynx dans le Jura
Les 9 et 10 novembre 2024, au Carcom de Lons-le-Saunier, le Centre des Grands Prédateurs organise un week-end dédié au félin. Expositions, stands, boutique, conférences, spectacle, projection d’un film le samedi soir, activités participatives… Entrée libre et gratuite tout le week-end.
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