« Celui qui ne remarque pas le changement est dans le déni. » Lorsque l’on pose la question de l’impact du changement climatique sur l’activité agricole, Laurent Rouyer, agriculteur en Meurthe-et-Moselle, nous propose une réponse simple. Si l’activité agricole est, par nature, dépendante des aléas climatiques, ces derniers sont de plus en plus marqués. Il continue : « Nous sommes constamment en excès, qu’il s’agisse de trop d’eau ou de sécheresse. » De la ” excès “ devenu son quotidien et dont il constate la récurrence depuis une dizaine d’années maintenant. A la tête d’une exploitation de quatre associés en polyculture, le président de la Chambre d’agriculture de Meurthe-et-Moselle nous explique comment il se préserve des risques.
Sur papier, « tout est assurable »il explique. Il souligne cependant le manque de cohérence de ce système. « L’administration se base sur des dates calendaires tandis que nous, agriculteurs, travaillons en fonction de la météo. » Si certains régimes dérogatoires existent pour proposer “plus de latitude” pour ces derniers, ils sont encore trop peu nombreux et insuffisants. « La préoccupation majeure repose sur le principe de référence d’exploitation, établi dans les premières années sur une moyenne régionale, voire départementale. » C’est alors cette même référence, établie par les groupements de cultures, qui définira le niveau d’indemnisation garanti lors de la souscription d’une assurance. « Si vous ne rencontrez pas d’aléas climatiques, votre moyenne reste à peu près stable. En revanche, si pendant la période d’assurance vous êtes confronté à des risques climatiques, votre référence pour la culture concernée chute. » Mais voilà, après trois voire quatre années consécutives de mauvaises conditions climatiques “compliqué”les seuils de déclenchement ont été considérablement abaissés. « Maintenant, il faut presque que ce soit une catastrophe pour déclencher votre système d’assurance. »
Perte d’intérêt
De ce fait, le système d’assurance perd de son intérêt au fil des années, du fait de la récurrence de ces aléas climatiques même si c’est justement dans le partage des risques, fondé sur le principe de mutualisation, qu’il trouve tout son sens. . D’autant que la réforme de la PAC prévoit que s’il existe un système d’assurance, la solidarité nationale ne s’exerce plus. “que vous y soyez abonné ou non”.
En effet, jusqu’à récemment, le régime de « calamités agricoles » prévu une indemnisation financée par le Fonds National de Gestion des Risques Agricoles (FNGRA) pour les exploitations agricoles ayant subi une perte de récolte ou une perte de fonds suite à certains épisodes climatiques exceptionnels. Il constituait ainsi un filet de sécurité pour les agriculteurs en indemnisant une partie des dégâts matériels jugés non assurables. Appareil arrêté depuis. Une décision qui « cela remet en question notre modèle de production ». Face à ces changements, Laurent Rouyer a donc choisi de ne plus assurer ses récoltes pendant environ quatre ans. « Je n’avais plus aucun intérêt économique à le faire. »
Nouveaux outils
Alors pour se protéger, le monde agricole tente de s’adapter au mieux. « Au sein de la Chambre d’Agriculture de Meurthe-et-Moselle, nous avons développé une palette d’outils de mesure afin de comprendre ces nouveaux paramètres. » Ce sont aussi de nouveaux modèles d’agriculture qui se développent dans les champs. « Actuellement, nous expérimentons ce que nous appelons des cultures « dérobées ». » En d’autres termes, des cultures séquentielles à croissance rapide, cultivées entre deux cultures principales annuelles successives. « Cette pratique présente trois avantages : la production de fourrage supplémentaire pour les animaux, l’enrichissement des sols et le captage de l’azote. » Depuis plusieurs années, il a lui-même intégré de nouvelles cultures sur son exploitation comme le tournesol, la luzerne ou encore le trèfle. « Nous réfléchissons à un système d’exploitation global incluant tous ces aléas pour anticiper le plus possible. »
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