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Entre et Sénégal, les encombrantes archives de Thiaroye

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Une entrée du cimetière de Thiaroye (Sénégal), 30 novembre 2007. GEORGE GOBET / AFP

Il s’agit d’un vieux différend mémoriel entre la et le Sénégal, qui refait surface depuis l’arrivée au pouvoir du président Bassirou Diomaye Faye en mars. Ces derniers mois, le massacre de dizaines de tirailleurs par l’armée française à Thiaroye, dans la banlieue de Dakar, en décembre 1944, pour avoir réclamé leur prime de démobilisation, continue de peser sur les relations franco-sénégalaises.

Depuis qu’il a critiqué la décision de Paris d’accorder, en juin, la mention « Mort pour la France » à seulement six tirailleurs sénégalais, le Premier ministre Ousmane Sonko ne cesse de mettre sur le devant de la scène ce sujet sensible. scène. vendredi 1est En novembre, lors de sa campagne pour les élections législatives anticipées, prévues le 17 novembre, il a de nouveau réclamé l’accès aux archives françaises sur cet épisode sanglant de l’histoire coloniale.

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Il a également critiqué la publication d’un livre sur le conflit sécessionniste casamançais, responsable de milliers de morts depuis 1982 dans le sud du Sénégal. Supposant une éventuelle tentative de déstabilisation ourdie par l’ancienne puissance coloniale à travers cet ouvrage scientifique rédigé par l’historienne française Séverine Awenengo Dalberto, M. Sonko en a interdit la commercialisation.

Long silence des présidents sénégalais

France « il suffit de nous donner les archives de ses exécutions sommaires au Sénégal pendant la colonisation, des guerres qu’elle a menées ici, des tortures », » a-t-il proclamé depuis Ziguinchor, la capitale de la Casamance, d’où il est originaire, tout en se défendant « être anti-français »mais plutôt “Prose sénégalaise”. « Qu’elle nous donne les archives de Thiaroye 44 », a-t-il ajouté, sous les applaudissements de ses militants.

Cette véhémence contraste avec l’accommodement historique des chefs d’État sénégalais face au silence français sur le massacre de Thiaroye. Jusqu’à l’élection du président Faye, cette question sensible avait été peu abordée par ses prédécesseurs. Mais pour les nouveaux dirigeants sénégalais, qui se réclament souverainistes, la dénonciation de ce crime colonial est l’un des marqueurs de la « rupture » qu’ils avaient promis.

« Il y a eu un embargo politique français autour de Thiaroye pendant des décennies. » remarques Mamadou Diouf, historien à l’Université Columbia de New York et président du comité 80e anniversaire des commémorations du massacre, organisées par Ousmane Sonko en juillet. « Depuis l’indépendance, les présidents sénégalais se taisent pour ne pas déplaire à leurs partenaires françaiscontinue-t-il. Même [Léopold Sédar] Senghor, qui fut le premier à dénoncer le massacre dans un poème puissant écrit quelques jours plus tard, n’a pas exigé de comptes au cours de ses vingt années au pouvoir. [1960-1980]. Sous [François] Mitterrand et jusqu’en mai, le film d’Ousmane Sembène Thiaroye camp a été interdit de distribution dans le pays. Aujourd’hui, avec les nouveaux dirigeants sénégalais, on assiste à une forme de démantèlement des manœuvres pour entraver cette mémoire. »

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Accusée par certains historiens de cacher la vérité, la France affirme avoir remis l’intégralité de ses archives à l’issue du voyage officiel de François Hollande au Sénégal en 2014. Mais pour les autorités sénégalaises, le récit n’y est pas. “Il manque encore des informations cruciales que l’on ne trouve que dans les archives conservées en France, insiste Abdoulaye Koundoul, coordinateur du comité et conseiller d’Ousmane Sonko. Combien de tirailleurs ont été tués ? Où sont-ils enterrés ? Combien l’État français leur devait-il ? Ces réponses sont essentielles pour faire éclater la vérité. Nous espérons que les Français, qui ont une tradition reconnue de conservation des archives, nous aideront à y répondre pour que nous puissions tourner la page. »

La France joue la transparence

Face aux pressions sénégalaises, Paris mise sur la conciliation. Mi-octobre, suite à un échange téléphonique entre les présidents Faye et Macron, le Sénégal a formulé une demande de restitution d’archives avec une liste précise de documents. Dans quelques jours, une délégation d’historiens et d’archivistes sénégalais se rendra en France afin de consulter un certain nombre de fonds historiques. Une opération de transparence qui vise à « démonter » accusations de manque de sincérité contre lui.

Côté français, les députés français de La France insoumise (LFI), soutien historique des Patriotes africains du Sénégal pour le travail, l’éthique et la fraternité, le parti de MM. Faye et Sonko, tentent de soutenir les revendications sénégalaises. A l’Assemblée nationale, le parti de Jean-Luc Mélenchon, seul homme politique français invité par Ousmane Sonko depuis son accession au pouvoir, multiplie les initiatives symboliques.

Une résolution de l’Assemblée nationale visant à faire reconnaître à la France son rôle dans le massacre est en cours d’élaboration. Le parti insoumis soutient également la thèse des archives » secrète » et exige leur restitution. Ces documents, s’ils existent, pourraient permettre d’indemniser les descendants des victimes et d’ouvrir un procès en révision pour les tirailleurs condamnés après le massacre pour rébellion.

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LFI pourrait également proposer la mise en place d’une commission d’enquête parlementaire afin d’établir les responsabilités individuelles et collectives au sein du ministère des Armées ayant favorisé, selon ses responsables, le silence sur Thiaroye. « Comment la théorie de la mutinerie a-t-elle pu être entretenue par le ministère de la Défense pendant des décennies ? Un certain nombre de personnalités clés, qui occupent encore de hautes fonctions, ont joué un rôle obscur dans la diffusion de cette thèse. Ils doivent être tenus responsables. » estime le député du Val-d’Oise Aurélien Taché, coordinateur LFI de la commission des Affaires étrangères à l’Assemblée nationale.

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“L’approche est nécessaire, mais elle doit être affinée, tempère son collègue Bruno Fuchs (MoDem), président de la commission des Affaires étrangères. Il faut sortir de l’injonction unilatérale et impliquer le Sénégal et ses experts dans ce processus. De plus, ce n’est pas aux députés de raconter l’histoire. »

Commémorations majeures

Le 1est En décembre, les autorités sénégalaises commémoreront le 80e anniversaire du massacre. Plusieurs événements culturels sont prévus d’ici là pour en faire un moment de « communion populaire », selon les organisateurs. Ousmane Sonko et Bassirou Diomaye Faye tenteront de transformer cette séquence mémorielle en un moment fort de leur première année au pouvoir.

En intégrant l’histoire de Thiaroye au roman national, ils entretiennent également une ambition panafricaine. Une quinzaine de chefs d’État du continent dont les ressortissants ont été tués le 1est Décembre 1944 est attendu. « Thiaroye, c’est une histoire qui ne concerne pas seulement le Sénégal, mais l’Afrique. Il faut lui redonner cette dimension. » justifies Abdoulaye Koundoul.

Invitée, la France tente de maintenir un délicat exercice d’équilibriste. Parce qu’il est nécessaire, face aux attentes élevées, d’agir “plus fort” qu’en 2014, lorsque François Hollande avait réfuté pour la première fois la thèse de la mutinerie en parlant de « répression sanglante ». Certains plaident pour une requalification des faits en « massacre »d’autres pour “des excuses officielles”.

Reste également la question de la présence d’Emmanuel Macron à Dakar, qui n’est pas encore résolue. « Il marche sur une ligne de crête. S’il s’en va, il risque d’éclipser le discours des autorités sénégalaises, qui ont mis beaucoup de symboles dans ces commémorations. S’il abandonne, il faudra néanmoins démontrer l’intérêt sincère de la France pour ce sujet qui concerne aussi le pays, murmure un représentant français. Il faut faire preuve de tact dans la consultation des Sénégalais. Une reconnaissance officielle des torts de la France est également en discussion avec eux. »

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Coumba Kane

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