Quatre ans après l’assassinat de Samuel Paty, le professeur d’histoire-géographie de Conflans-Sainte-Honorine, décapité par un jeune islamiste d’origine tchétchène, le 16 octobre 2020, le procès de huit personnes s’ouvre aujourd’hui à Paris devant la cour d’assises spécialement mis en place pour juger les affaires de terrorisme. L’auteur de l’assassinat a été abattu par la police. Les huit accusés, sept hommes et une femme, devront répondre de complicité ou association de malfaiteurs terroriste. Sept semaines pleines d’audience et parmi les enjeux de ce procès, le tribunal devra s’interroger sur l’implication et le rôle des réseaux sociaux dans cette attaque.
Sur le banc des parties civiles, la famille de Samuel Paty se présente déterminée. Ses proches n’ont pas caché leur déception en décembre 2023, à l’issue du premier procès qui a réuni – à huis clos pour les mineurs – six anciens collégiens, l’élève adolescent de Samuel Paty pour dénonciation calomnieuse, condamné à 18 mois de prison avec sursis et cinq jeunes garçons, condamnés à des peines comprises entre 14 mois et 6 mois, pour avoir désigné le professeur comme son meurtrier, pour 300 euros.
L’attaque a eu lieu devant le collège du Bois d’Aulne, dans un contexte très tendu, depuis la polémique lancée sur les réseaux sociaux par le père de la jeune fille, soutenu par un propagandiste islamiste très virulent. Ensemble, ils sont venus réclamer des sanctions contre le professeur qui avait présenté des caricatures de Mahomet lors d’un cours sur la liberté d’expression. L’adolescent, absent de la classe en question, avait faussement indiqué que Samuel Paty avait demandé aux élèves musulmans de se signaler et de partir. Les deux hommes ont alors, à tour de rôle, publié chacun une vidéo sur les réseaux sociaux. La première, celle du père, était intitulée «Ne touchez pas à mes enfants » et le deuxième « L’Islam et son prophète insultés dans un collège public ».
La menace terroriste s’est également encore accrue au moment de l’attentat, grâce au procès des attentats de Charlie Hebdo, qui a débuté en septembre. L’hebdomadaire a réédité les caricatures et les organisations terroristes et diffusé plusieurs messages menaçants. Le 25 septembre, un jeune Pakistanais a commis une tentative d’assassinat tout près des anciens locaux du journal.
Virginie Leroy, avocate de la famille Paty : « L’évolution de la propagande terroriste sur les réseaux sociaux doit entraîner une sanction ferme et forte. »
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Abdoullah Anzorov, l’assassin de Samuel Paty, est un jeune Russe de 18 ans d’origine tchétchène dont la famille s’est réfugiée en France. Adolescent déscolarisé, violent et bagarreur, fan de sports de combat, ancré dans la radicalisation depuis l’été 2020, comme en témoignent de nombreux éléments d’enquête. Depuis septembre, ses recherches sur Internet révèlent qu’il cherchait également une cible. Le jeune terroriste prendra contact téléphoniquement avec Brahim Chnina, le père de la jeune fille après avoir visionné sa vidéo. Il l’aurait assuré de son soutien. Aucune trace en revanche de contact avec le militant Abdelhakim Sefrioui, dont les avocats ont déjà déployé leur ligne de défense plusieurs semaines avant le début du procès. Ils envisagent de plaider l’acquittement.
Vincent Brengarth, avocat d’Abdelhakim Sefrioui : « Nous sommes confrontés à un refoulement de ce qui vient de la pensée. »
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Les deux hommes, initialement mis en examen pour complicité d’assassinat, seront jugés aux assises pour association de malfaiteurs terroristes, un délit passible de 30 ans de prison. L’accusation estime qu’ils n’avaient pas connaissance des projets de l’assassin, mais que leurs actions concertées ont contribué à la commission des faits, que le parquet national antiterroriste a qualifié de « chronique d’un meurtre ».
Ils semblent détenus, tout comme deux proches d’Abdullah Anzarov, ami d’enfance Azim Epsirkhanov, depuis leurs années universitaires à Evreux. Il était avec lui, la veille des faits, lors de l’achat du couteau qui allait servir à l’assassinat de Samuel Paty dans un magasin de Rouen. Il affirme ne rien savoir des intentions criminelles de son ami, pas plus que Naïm Boudaoud, l’ami du gymnase qui l’accompagnait, le matin de l’attaque, pour acheter deux pistolets à billes d’acier dans une armurerie avant de les déposer devant le Collège du Bois d’Aulne. Ils sont les seuls accusés jugés pour complicité et risquent à ce titre la réclusion à perpétuité.
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Restent encore quatre personnes, poursuivies pour association de malfaiteurs terroriste, qui comparaîtront libres, trois hommes et une femme, en qui les enquêteurs ont vu des membres actifs de la « jihadosphère » et dont les relations, toujours via différents réseaux sociaux avec le terroriste auraient pu ont contribué à favoriser sa radicalisation et son passage à l’action.
Le procès durera sept semaines, jusqu’au 20 décembre. Par ailleurs, la famille de Samuel Paty a porté plainte contre les ministères de l’Intérieur et de l’Education nationale pour « non-assistance à personne en danger » et « défaut de prévention d’un délit ». Une enquête est toujours en cours sur cet aspect, désormais entre les mains d’un juge d’instruction.
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