La France soumet sa nouvelle stratégie nationale bas carbone (SNBC) à consultation publique. Visant à réduire les émissions brutes de la France de 55 % d’ici 2030 par rapport à 1990, elle constitue la nouvelle feuille de route pour décarboner la France. Face à la baisse significative du niveau des puits de carbone forestiers, elle renforce les objectifs des autres secteurs.
Entre 1990 et 2022, la France a réduit ses émissions de CO2 de 144 millions de tonnes, soit une réduction de 26,5 %. Elle devra désormais les réduire de 126 millions de tonnes supplémentaires d’ici 2030. Voici donc l’objectif premier de la troisième Stratégie nationale bas carbone 3 (SNBC-3) mise en consultation publique ce lundi 4 novembre : réduire le carbone brut émissions. Les émissions de gaz à effet de serre de la France de 50 % d’ici 2030 par rapport à 1990. Cela portera les émissions de 396 millions de tonnes d’équivalent CO2 (MtCO2) en 2022 à 270 millions en 2030.
« Pour atteindre notre objectif territorial, nous devons réduire nos émissions de 5 % chaque année entre 2022 et 2030, contre une réduction annuelle de 2 % en moyenne de 2017 à 2022.prévient le projet SNBC-3. L’objectif semble réalisable. En effet, selon le Centre technique interprofessionnel d’études sur la pollution atmosphérique (Citepa), les émissions de gaz à effet de serre en France ont diminué de 5,8 % entre 2022 et 2023, hors puits de carbone. Pour y parvenir, la SNBC-3 prévoit un scénario de réduction des émissions de GES dans tous les secteurs d’activité, ainsi que des plafonds d’émissions de gaz à effet de serre à ne pas dépasser sur des périodes de cinq ans. Ces budgets carbone couvrent les périodes 2024-2028 et 2029 – 2033. Ils s’élèvent respectivement à 333 MtCO2 et 255 MtCO2.
Émissions brutes ou nettes ?
Depuis la loi européenne sur le climat, l’objectif climatique d’une réduction nette des émissions de l’UE d’au moins 55 % d’ici 2030 par rapport à 1990 est une obligation légale. Interrogé par Natura Sciences, le cabinet de la ministre de la Transition écologique Agnès Pannier-Runacher a précisé la question. « L’objectif de -50 % que nous prenons est bien la version française de l’objectif européen de -55 %. Tel est notre objectif légal et contraignant. Dans l’effort demandé par le Fit for 55 Package pour réduire les émissions de 55% en 2030 par rapport à 1990, il y a un partage de l’effort basé sur les émissions actuelles des pays et donc chaque pays part de plus ou moins loin selon notamment sur son mix énergétique. »
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Compte tenu de l’état du puits de carbone forestier, la France préfère désormais se concentrer sur la réduction des émissions brutes et moins communiquer sur les émissions nettes à court terme. La SNBC-3 ne mentionne qu’un objectif de neutralité carbone à l’horizon 2050. D’ici là, la stratégie prévoit que la France compensera ses émissions brutes résiduelles par des puits de carbone naturels ou technologiques.
Mais la France s’est également engagée à réduire ses émissions nettes de CO2 de 55 % d’ici 2030 par rapport à 1990. Le cabinet d’Agnès Pannier-Runacher confirme : « Les -55% nets sont un objectif que nous retenons, mais c’est un sujet de puits de carbone qui a vocation à être précisé ultérieurement ». Et d’ajouter qu’il ne peut pas donner d’objectif d’émissions nettes de CO2 en millions de tonnes équivalent CO2 pour 2030 » compte tenu de l’incertitude qui pèse aujourd’hui sur les puits de carbone ». Des travaux scientifiques sont en cours pour mieux évaluer leur contribution future à la réduction des émissions.
Les puits de carbone, au cœur des enjeux
Le sujet des puits de carbone est crucial. Pour bien comprendre, il faut regarder le budget carbone 2019-2023 de la SNBC-2, soit la dernière période quinquennale couverte par la stratégie. Si le budget en termes d’émissions brutes a été respecté (400 MtCO2 émises en moyenne contre un budget de 420 MtCO2), ce n’est plus le cas lorsque l’on considère les émissions nettes, puits de carbone compris. Au total, ce budget carbone a été dépassé de 15 MtCO2. La différence est due au secteur de l’utilisation des terres et de la foresterie (UTCATF), un puits net de carbone qui séquestre le CO2 dans la biomasse et les sols.
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Dans le détail, le budget 2019-2023 est réalisé pour tous les secteurs à l’exception des déchets (dépassant 10 Mt) et surtout UTCATF (115 Mt d’absorption en moins sur la période par rapport à l’objectif). Le Citepa explique la difficulté désormais de parier avec certitude sur ce puits de carbone : « estimé à environ -45 MtCO2 en moyenne dans les années 2000, ce puits s’est considérablement réduit pour atteindre environ -20 MtCO2 ces dernières années, notamment du fait de l’effet couplé des sécheresses répétées depuis 2015, des maladies affectant le taux de mortalité des arbres, et d’une augmentation dans les récoltes de bois. »
Des objectifs à renforcer dans tous les secteurs
L’objectif de la SNBC-2 prévoyait d’atteindre un puits de carbone compris entre – 40 et – 45 MtCO2 d’ici 2030. Les estimations provisoires de la SNBC-3 visent désormais un puits de carbone de – 19 MtCO2 à cet horizon. Cela impliquerait de renforcer davantage les réductions d’émissions dans d’autres secteurs. Ainsi, entre 1990 et 2030, les estimations provisoires de la SNBC-3 visent une réduction des émissions de 68% pour l’industrie, 65% pour l’énergie, 62% pour le bâtiment, 57% pour les déchets, 27% pour les transports et 25% pour l’agriculture. .
Après le troisième Plan National d’Adaptation au Changement Climatique (PNACC) ouvert à la consultation le 25 octobre, le Gouvernement lance ce lundi 4 novembre la consultation juridique de la SNBC-3 et de la Programmation Pluriannuelle de l’Energie 3 (PPE 3). . Ces trois textes clés constituent ensemble la nouvelle Stratégie française pour l’énergie et le climat (SFEC).
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