Après 25 ans de recherche fondamentale au CNRS, Véronique Gomord et Loïc Faye créent Angany Genetics à Val-de-Reuil (Eure) en 2010. Cette unité de production de biomédecine extrêmement innovante a notamment développé les premiers vaccins destinés au diagnostic et au traitement des patients allergiques. . Mais, après quatorze années d’activité, l’aventure vient de s’arrêter brutalement. Depuis le 21 octobre, les portes des laboratoires sont fermées et les rideaux tirés. Sept chercheurs ont été licenciés.
Cependant, durant ses huit premières années d’activité, grâce au Crédit Impôt Recherche (CIR) et au soutien financier de ses actionnaires français, Angany Genetics a pu déposer quatre familles de brevets. En 2018, ne parvenant pas à trouver en France le financement nécessaire pour lancer les essais cliniques des produits qu’ils avaient développés, les cofondateurs s’associent à deux partenaires canadiens pour créer la société Angany Inc, basée au Québec. Angany Genetics transfère alors son savoir-faire, ses quatre brevets et l’ensemble de ses équipements à l’entreprise canadienne. En échange de cette vente, les Français ont obtenu 25 % du capital de l’entreprise canadienne, mais aussi un engagement de maintenir le personnel et l’activité de R&D à Val-de-Reuil.
Un engagement d’autant plus crédible que l’entreprise outre-Atlantique ne s’est pas contentée d’absorber l’entreprise française, mais a créé une filiale, Angany Innovation, pour conforter cette position. Véronique Gomord avait également été nommée présidente et directrice scientifique du groupe franco-canadien et directrice de la filiale française. Ainsi, durant les cinq années suivantes, Angany Innovation a pu, en toute confiance en son avenir, développer et valider l’efficacité des premiers vaccins contre l’allergie au chat chez l’homme et la dermatite atopique chez le chien. Puis lancer, en décembre 2023, les premiers essais cliniques.
D’autres projets étaient en cours à la même période. Le laboratoire a ainsi développé une autre gamme de vaccins, destinés cette fois au traitement des allergies à l’arachide et aux acariens, mais aussi aux traitements contre le Covid-19 utilisant des anticorps monoclonaux. Et, le service d’oncologie de l’hôpital de Montréal, la petite entreprise de Val-de-Reuil travaillait sur un premier produit extrêmement prometteur dans le cadre d’un projet de vaccination personnalisée contre le cancer.
Les chercheurs ont remercié, puis… remercié
Mais c’est en coulisses et de l’autre côté de l’Atlantique que s’est décidé le sort d’Angany Innovation. Le couperet est finalement tombé le 21 octobre avec la fermeture du laboratoire, et la retraite anticipée de Loïc Faye. Le cofondateur du laboratoire dénonce les raisons budgétaires avancées par les actionnaires québécois : « Depuis moins d’un an, un énorme remaniement a entraîné un changement de direction et le départ de treize employés, soit 60 % de son effectif. La science ne fonctionne pas sans argent. Il y a deux semaines, nous avons été remerciés pour notre travail via un post et le même jour, nous avons été invités à nos entretiens préalables au licenciement ! »
Véronique Gomord, quant à elle, a été licenciée et licenciée « pour faute grave présumée », selon Loïc Faye, qui a profité d’une lettre aux actionnaires pour clarifier sa position : « En ce qui concerne Angany Inc, il y a eu un rachat forcé. de nos actions au prix de 0,0001 $ par action en août 2024. Nous contestons ces erreurs graves et malgré nos demandes répétées, aucun élément factuel n’a été fourni. Trois procédures sont en cours. Merci à mes collègues avec qui nous avons résisté jusqu’au bout à la tempête face à tant d’injustice. »
Christine Guillen, PDG du groupe Angany depuis novembre 2023, interrogée par « Paris-Normandie », a défendu cette fermeture en expliquant que « l’entreprise canadienne fait face à des défis financiers qui l’obligent à trouver de nouveaux financements pour éviter la faillite ». Dans le communiqué du 21 octobre 2024 annonçant la fermeture du laboratoire de Val-de-Reuil, le groupe précise vouloir « rééquilibrer l’allocation de ses ressources pour accompagner pleinement le développement clinique de ses deux produits les plus avancés ». Des vaccins destinés au traitement de l’allergie aux chats et de la dermatite atopique chez le chien pourraient donc bien être commercialisés après ces périodes d’essai. Avec les « plus sincères remerciements » d’Angany à ses chercheurs.
Related News :