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entre 49.3 et peur de dissolution, pourquoi les députés assèchent l’Assemblée

Certains parlementaires semblent en service minimum depuis leur retour au Palais-Bourbon en septembre. Contraints de partager leur temps entre l’hémicycle, les travaux en commissions et leur présence dans la circonscription en cas de nouvelle dissolution, les députés sont à la peine.

Un hémicycle clairsemé pour les lois les plus importantes de l’année. Les bancs des députés semblaient relativement vides ces derniers jours pour examiner le budget de l’Etat puis de la Sécurité sociale.

De la présence d’élus en commission, plutôt que dans l’hémicycle, en passant par le spectre d’une nouvelle dissolution et des députés qui s’interrogent sur le sens de leur mandat, l’Assemblée nationale est empreinte d’un climat de malaise ces dernières semaines.

« Il y a beaucoup de tensions et de frustrations. On ne peut pas travailler dans ces conditions, on fait très mal la loi. Ce n’est vraiment pas bon pour le pays», regrette le député Horizons Vincent Thiébaut (Horizons) auprès de BFMTV.com.

“Une mauvaise image des députés”

Si certains ont vertement recadré les élus, comme le patron du Modem François Bayrou qualifiant dimanche 27 octobre leur absence de « purement, simplement inacceptable » et de « criminelle » sur notre antenne, l’organisation des travaux parlementaires ne laisse pas toujours la place à d’autres. choix.

Ces dernières semaines, les députés ont par exemple dû se pencher à la fois sur les mêmes plages horaires sur le projet de loi de finances dans l’hémicycle et en même temps en commission sur le budget de la Sécurité sociale.

« C’est assez déroutant, cela nécessite de courir dans les couloirs pour passer d’un sujet à l’autre. Et en plus, cela donne une mauvaise image des députés qui travaillent pourtant », analyse de son côté la députée socialiste Dieynaba Diop.

« On jette notre travail par la fenêtre »

Si la situation n’est pas nouvelle, elle a gagné en complexité depuis 2022 avec la majorité relative avant de devenir quasiment inextricable depuis les dernières élections législatives.

Ces derniers jours, dans une Assemblée très fragmentée, les votes se sont souvent décidés à quelques voix, comme sur « l’exit tax », adopté avec seulement 4 voix d’avance. Le gouvernement a même été renié par ses propres troupes sur la refonte des cotisations patronales ou sur l’aide à l’apprentissage en cours de session.

Plus largement, de plus en plus de députés s’interrogent sur leur réelle influence alors que le spectre du 49.3 plane sur les débats. En cas d’activation de cet article de la Constitution qui permet d’adopter un budget sans vote, le gouvernement a toute liberté pour choisir les amendements qu’il souhaite conserver.

« Concrètement, ça veut dire qu’on est resté assis, qu’on a travaillé des heures et qu’à la fin, on jette notre travail par la fenêtre. Je me demande dans quel autre monde accepterions-nous cela. Nous sommes parmi les fous», s’agace un député du Modem.

« La gauche se surmobilise pour obtenir des victoires politiques même si elle n’ira pas loin et on n’a plus beaucoup d’envie quand on pense au 49.3 », résume brusquement un de ses confrères de Renaissance.

« Comment pouvons-nous dire que nous ne sommes pas heureux ?

Pour tenter d’influencer le budget, les députés de la base commune ont multiplié les discussions avec les sénateurs. Il faut dire que c’est probablement la chambre haute, largement à droite, qui aura la plus grande latitude pour influencer le budget.

Si les débats s’éternisent, l’article 47 permet à l’exécutif de transmettre les projets de loi de finances au Sénat, où la majorité est acquise par le gouvernement, sans que l’Assemblée n’ait plus son mot à dire. .

« Le gouvernement compte sur le Sénat pour nous contraindre à nous conformer. Nous sommes en train de nuire à la représentation nationale. Je trouve ça assez grave», regrette le député Renaissance Guillaume Gouffier-Valente, proche d’Élisabeth Borne.

« Ils ne nous font plus confiance. Après, on nous reproche de ne plus venir, mais comment dire qu’on n’est pas content ? Barnier n’écoute personne», dit un de ses collègues.

« On ne va pas se fâcher tout le temps » contre les électeurs

De quoi pousser bon nombre de députés, notamment LR, à multiplier les discussions avec leurs homologues du Palais du Luxembourg pour pousser certains de leurs amendements, quitte à moins venir en séance.

« Nous sommes très courtisés en ce moment », se réjouit un sénateur macroniste. « Venir nous voir, c’est aussi espérer rééquilibrer un budget que les députés veulent pouvoir défendre dans leurs circonscriptions. Et cela, pour le moment, c’est difficile.

Du gel des pensions de retraite qui devrait pourtant épargner les plus modestes, à la baisse du remboursement des consultations chez le médecin généraliste, les députés de la base commune peinent à défendre le budget de Michel Barnier.

«Quand nous n’avons pas voté, nous pouvons facilement dire à nos électeurs que nous étions contre, leur montrer que nous n’avons pas participé au vote. On ne va pas se fâcher tout le temps quand une nouvelle élection peut arriver», remarque un élu LR.

Les députés « obsédés » par « les marchés »

En effet, le spectre d’une nouvelle dissolution plane dans tous les esprits à l’Assemblée, poussant encore davantage les députés à préférer labourer leur territoire. De nombreux membres de la coalition gouvernementale l’ont emporté de justesse, souvent aidés par le retrait de candidats de gauche lorsqu’un représentant du RN était au second tour.

« Ça pousse à aller à tous les marchés, aux brocantes, aux matchs de foot, à toutes les manifestations. Mon député qui a toujours aimé faire de la « natio » (national ndlr) est devenu obsédé par son territoire », déplore un collaborateur parlementaire.

«J’assume de ne pas entrer dans le concours Lépine des plus présents à l’Assemblée alors qu’on n’a pas grand chose à faire là-bas et qu’on peut être plus efficace sur le terrain», défend pour sa part Karl Olive (Renaissance).

« Quelque chose dont on va avoir du mal à sortir »

De quoi rajouter un peu plus de lassitude pour les députés qui ont l’impression d’être en campagne permanente depuis les dernières élections législatives surprise d’Emmanuel Macron.

La pilule est d’autant plus difficile à avaler que les vacances d’été sont traditionnellement une pause salvatrice pour les élus qui alternent le reste de l’année entre journées à Paris, séances de nuit et déplacements rapides dans leur circonscription.

Cette année, fini les longues vacances, remplacées par une campagne express puis l’attente d’un nouveau gouvernement.

« J’ai décidé cette année de prendre un congé à la Toussaint pour passer du temps avec mes enfants. Je ne pouvais pas leur dire que les prochains longs moments ensemble n’auraient pas lieu avant Noël», raconte un député RN.

L’ambiance peut-elle vraiment changer une fois la séquence budgétaire bouclée fin novembre ? Beaucoup en doutent dans l’hémicycle. « J’ai l’impression qu’on s’est embarqué dans quelque chose dont on va avoir du mal à sortir », soupire un parlementaire de la Renaissance.

 
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