Malgré ses 600 habitants, Noyant-d’Allier n’est pas un village auvergnat comme les autres. Son passé minier se découvre au vu des colonies et du musée de la mine sur lequel est installé un imposant chevalement en béton. Quelques centaines de mètres plus loin, un dépaysement surprenant : une pagode et un immense Bouddha doré. “Et là, nous allons créer un musée autour des rapatriés d’Indochine”, » raconte Guy Dauchat, adjoint au maire, en désignant les anciennes habitations.
Si l’annonce d’une telle implantation au cœur de la France peut surprendre, elle prend tout son sens lorsque l’élu raconte la riche histoire de sa commune. « Il y a eu un retour des rapatriés en France à la fin de la guerre d’Indochine. Des milliers de personnes ont acquis la nationalité française en Indochine. Ils ont été rapatriés dans deux communes, dont Noyant. Environ 3 000 personnes nous ont rendu visite. »
Et si Noyant-d’Allier a été choisi pour accueillir ces rapatriés, c’est tout sauf un hasard. « Noyant, c’est un pays minier. Mais les mines furent fermées par les occupants allemands en 1943. Les colonies qui abritaient les mineurs se retrouvèrent donc vacantes. Cela représentait 250 logements et c’était assez unique en France. »
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« Enseigner cette histoire aux jeunes générations »
Soixante-dix ans après la fin de la guerre d’Indochine, la commune auvergnate peut enfin concrétiser ce projet de musée imaginé depuis plusieurs années. « Cela fait un moment que ça préoccupe les gens, notamment au sein de l’association locale Arina (Association of returnees from Noyant-d’Allier), explains Guy Dauchat. Mais nous n’avions pas de locaux. Cependant, au cours des trois dernières années, la municipalité est devenue propriétaire de deux colonies. Cela a été le déclic et c’est symbolique car ces lieux ont accueilli les rapatriés. »
Désormais, le permis de construire est sur le point d’être adopté pour des travaux qui débuteront en fin d’année. Avec une ouverture espérée à l’automne 2025 pour devenir un site unique en France selon l’élu. Cette initiative est saluée par Édith Simon, responsable de la pagode construite en 1983 par un petit noyau d’anciens rapatriés. « J’ai été rapatrié dans une autre commune et puis nous sommes venus ici. Ici, tout le monde a adopté cet héritage, même ceux qui ne sont pas d’origine asiatique. Travailler la mémoire et le transfert est essentiel. Et il est plus pertinent de l’installer ici qu’à Paris. »
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« On s’est tout de suite senti bien ici »
Même satisfaction de la part de Caroline Guyenne. La Française naturalisée dirige le restaurant « Le Petit d’Asie » et une boutique asiatique devenus des lieux incontournables pour les 54 000 touristes annuels. « Je suis venu ici adolescent et ce petit village ressemble à ceux du Vietnam. Nous nous sommes immédiatement sentis bien ici. Je suis très intégré, j’ai même francisé mon nom ! Mais on n’a pas du tout le même ressenti selon les générations. L’espace musée viendra donc compléter tout cela, niveau de la mémoire de Noyant et de cette page de l’histoire de France. »
Une mission pédagogique à laquelle Guy Dauchat accorde une place très importante dans ce projet, comme en témoigne la mobilisation d’un conseil scientifique composé d’experts afin de mener plusieurs recherches.
Reste un détail à régler et non des moindres : « C’est un dossier avec un budget de 800 000 €, ce qui est énorme pour nous. Nous attendons des subventions, nous comptons sur l’Europe et nous espérons du mécénat. » Nul doute que les communautés et autres généreux donateurs seront sensibles à cette histoire.
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