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Fin des exemptions de visa entre le Maroc et l’Algérie : le tourisme, victime collatérale

Les tensions entre l’Algérie et le Maroc, déjà visibles depuis plusieurs années, viennent de prendre une nouvelle tournure. L’Algérie exige désormais un visa d’entrée pour tous les ressortissants marocains. Malgré les appels répétés à la réconciliation, l’horizon de la coopération entre les deux voisins s’assombrit encore davantage.

L’annonce faite jeudi par le ministère algérien des Affaires étrangères, concernant l’instauration de visas d’entrée pour les citoyens marocains, a pris de court tant les autorités de Rabat que les consulats algériens au Maroc, notamment à Casablanca, où règne l’incertitude.

« Pour le moment nous ne savons rien, nous avons reçu la nouvelle hier à la toute dernière minute. Nous ne savons pas à quel niveau les prix seront fixés. Des discussions sont en cours entre l’ambassade et le ministère des Affaires étrangères. Nous aurons certainement plus de visibilité dès la semaine prochaine. Les dossiers sont également en stand-by en attendant des éclaircissements supplémentaires», nous a indiqué un responsable du consulat d’Algérie à Casablanca.

Une relation compliquée
Pourtant, les liens historiques entre les deux voisins auraient pu constituer un motif de rapprochement, à l’image du Traité d’amitié signé à Ifrane en janvier 1969, qui marqua l’apaisement des relations après des années de tensions. Les accords successifs, dont la convention de 1972 sur la frontière nationale, signée par les ministres des Affaires étrangères de l’époque, Abdelaziz Bouteflika et Ahmed Taibi Benhima, visaient à renforcer la coopération et à stabiliser les échanges. Mais au cours des années 1990, la fermeture des frontières suite aux attentats de Marrakech a définitivement changé la donne. Malgré les tentatives de relance des échanges, notamment avec la levée réciproque des visas en 2004 et 2005, la situation semble aujourd’hui bloquée dans une impasse.

Cette nouvelle décision de l’Algérie intervient au moment où son voisin oriental s’efforce de promouvoir un tourisme encore largement sous-exploité. En 2023, le pays a enregistré 3,29 millions de touristes, soit une augmentation de 135,5% par rapport à 2022.

Cette amélioration cache cependant une réalité plus nuancée. Malgré la croissance des arrivées étrangères, avec un impressionnant +66,68%, le pays reste dominé par le tourisme émetteur, avec 2,55 millions de départs d’Algériens résidents à l’étranger. Le déséquilibre est marqué, mettant en évidence le défi auquel l’Algérie est confrontée pour retenir ses propres citoyens ou attirer un plus grand nombre de visiteurs étrangers.

Historiquement, les Marocains comptent parmi les visiteurs les plus réguliers en Algérie, juste derrière les Tunisiens et les Français. En 2019, selon les statistiques officielles, 79 505 Marocains ont franchi les frontières algériennes.

Le Maroc était également la troisième Source de touristes étrangers en Algérie, une clientèle qui, avec la nouvelle contrainte de visa, risque de diminuer drastiquement. Un chiffre modeste comparé aux 1,3 million de flux internes tunisiens ou algériens, mais qui témoigne d’une curiosité de plus en plus marquée pour les sites historiques et même les thermes algériens.

Une balle perdue pour le tourisme
Malgré ses atouts indéniables, l’Algérie peine à se positionner comme une destination touristique majeure. La mise en service de 56 nouveaux hôtels et les investissements touristiques enregistrés en 2023 n’ont pas encore suffi à changer la dynamique du secteur. L’Algérie compte néanmoins 249 zones d’expansion touristique (ZET) et un portefeuille d’investissement qui dépasse les 2 200 projets.

Ces infrastructures peinent cependant à attirer les foules. A titre de comparaison, le Maroc, avec ses villes impériales, ses plages et son patrimoine culturel, attire près de 13 millions de visiteurs chaque année. A noter que de manière générale, l’Algérie applique le principe de réciprocité pour les visas, c’est à dire aux pays qui les imposent également à ses ressortissants.

Par exemple, pour les Français, les frais de visa sont fixés à 120 euros. Un montant qui risque de dissuader certains voyageurs. En imposant désormais un visa aux Marocains, l’Algérie pourrait non seulement réduire l’un de ses principaux flux de touristes étrangers, mais aussi envoyer un message ambigu sur ses intentions d’ouverture. Alors que les autorités diplomatiques s’emploient à clarifier les conditions d’obtention de ce visa, l’impact sur le tourisme et les relations bilatérales reste, pour l’instant, non résolu.

Faïza Rhoul / Inspirations ECO


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