Originaire du Danube, ce poisson a été introduit dans les rivières françaises pour la pêche de loisir dans les années 80 et 90. Depuis, il colonise l’espace et dévore les poissons migrateurs.
Le Figaro Bordeaux
En Gironde, haro sur le poisson-chat. Ce gros poisson vorace prolifère au détriment des poissons migrateurs, dont la lamproie. Les pêcheurs d’eau douce girondins, à qui il est interdit de récolter ce plat incontournable d’un célèbre plat bordelais, dénoncent ce phénomène depuis avril 2023. Mi-septembre, les conclusions d’une étude présentée par la préfecture de Gironde leur donnent raison.
L’expérience scientifique, menée depuis 2020, révèle que 58 % des estomacs des 4 017 poissons-chats analysés ces trois dernières années sont composés de poissons migrateurs. Et le poisson-chat, en tant que gourmet, a ses préférences : il dévore 24 % des lamproies, 17 % des aloses feintes, 17 % des grandes aloses et les 42 % restants d’autres poissons, amphibiens et invertébrés. Fait significatif, ce chasseur de rivière est aussi cannibale puisqu’il consomme 5%… de sa propre espèce. « Ces données sont 70 fois supérieures aux pertes de poissons migrateurs liées à la pêche accessoire »analyse Hélène Chancel Lesueur, directrice adjointe de la direction régionale de l’environnement, de l’aménagement et du logement à la préfecture.
Pêche au poisson-chat
Le problème ? « Un poisson-chat mange la moitié de son poids en poisson par an et comme c’est le plus gros poisson de la rivière, c’est aussi celui qui mange le plus »explique Sébastien Goupil, conseiller eau et agriculture auprès du préfet de Gironde. Or, ces poissons peuvent mesurer jusqu’à 2,70 mètres et peser plus de 150 kilos. Et ils sont très nombreux en Garonne et en Dordogne : les pêcheurs évoquent la présence d’un stock de plusieurs tonnes sur certains tronçons de ces rivières. Une population massive, qui réduit donc les chances de survie des poissons migrateurs. Sauf que ces derniers, comme le saumon, retournent frayer là où ils sont nés au moment de la reproduction. Une prédation trop importante pourrait donc tout simplement conduire à leur disparition dans ces eaux.
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Pour éviter cela, la préfecture de Gironde et de Nouvelle-Aquitaine renforce les missions de pêche au silure, sans limitation en quantité, sur plusieurs tronçons stratégiques de la Garonne et de la Dordogne. Des échantillons qui sont prélevés avec des filets, des verveux ou des lignes, car ces méthodes ont démontré qu’elles permettent de capturer le poisson-chat sans causer de dommages collatéraux chez les poissons migrateurs. Objectif : réduire la population de silure dans certaines zones ciblées comme autour des barrages qui sont « goulots d’étranglement » pour les poissons migrateurs, particulièrement pendant la saison de reproduction. Des opérations de translocation de lamproies dans des zones dépourvues de silures sont également menées pour tenter de les préserver.
Un deuxième protocole, qui devrait être lancé en 2025, est en cours d’élaboration pour étendre ces dispositifs au bassin de l’Adour et à la Charente, où abonde également le poisson-chat. Une régulation humaine, qui répare en réalité un déséquilibre également créé par l’homme. Originaire du Danube, le poisson-chat a en effet été introduit en France dans les années 80 et 90 (même s’il n’y vivait plus depuis l’ère glaciaire) dans le but de “pêche récréative”. Heureux des eaux françaises, l’animal prolifère depuis et colonise de plus en plus les cours d’eau où les espèces indigènes peinent désormais à survivre en sa présence. Pour favoriser les grandes quantités de poissons-chats sur le point d’être tués, la préfecture de la Gironde réfléchit également à des moyens qui pourraient leur permettre de passer de nos rivières à nos assiettes.
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