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Maroc. Nouvelle bataille de positionnement entre entreprises françaises et espagnoles

Au Maroc, plusieurs secteurs font l’objet de convoitises de la part des entreprises françaises et espagnoles en lice pour les marchés publics. Mais d’un autre côté, outre la politique de diversification initiée ces dernières années par le Royaume, ils font face à une concurrence de plus en plus rude de la part des champions marocains et d’autres entreprises étrangères.

Jusque-là, premier partenaire commercial du Maroc, l’Espagne a-t-elle rattrapé la sur le marché marocain dans le domaine des grands projets ? Une question qui taraude les esprits avec l’offensive lancée par les entreprises espagnoles dans la foulée du réchauffement des relations entre les deux royaumes avec la signature en février dernier, entre le Maroc et l’Espagne dans le cadre de la 12ème réunion de haut niveau d’une vingtaine d’accords couvrant plusieurs domaines tels que le tourisme, les infrastructures, les ressources en eau, l’environnement, l’agriculture, la formation professionnelle, la sécurité sociale, les transports, la sécurité sanitaire et la recherche et développement. Ces accords sont aujourd’hui considérés comme une feuille de route pour laquelle le ministre espagnol des Affaires étrangères, José Manuel Albarez, est venu à Rabat le 13 décembre pour la dynamiser davantage.

L’Espagne travaille dur

On sait déjà que « les deux pays se concertent sur plusieurs projets, notamment dans les secteurs des infrastructures, de l’aménagement urbain et des transports, des énergies renouvelables, maritime, etc. », Abdeslam Touhami, économiste, notant que les canaux de communication directs entre les deux royaumes sont opérationnel à tous les niveaux et en permanence, ce qui permet de traiter tous les dossiers de manière proactive. “La perspective d’une organisation commune de la Coupe du monde en 2030 y contribue également”, ajoute-t-il.

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Côté français, après une longue période de froid entre Rabat et Paris, les relations sortent de l’ère glaciaire. Les rencontres entre responsables des deux pays se multiplient, témoignant, là aussi, d’une volonté de redressement.

Pendant ce temps, l’Espagne continue de travailler dur. Il faut dire qu’elle a parcouru un long chemin en développant significativement ses échanges économiques avec le Maroc. « Avant même le nouveau partenariat économique bilatéral, qui devrait permettre aux deux pays de maintenir dans le temps une dynamique commerciale durable et de mettre en œuvre des projets de développement communs à haute valeur ajoutée, l’Espagne, depuis la fin des années 80, a démontré une réelle montée en puissance. au pouvoir dans le cadre de son partenariat économique avec le Maroc, au point d’arriver aujourd’hui à un niveau lui permettant déjà de rivaliser avec la France», souligne Hakim El Wardi, économiste. Grâce à sa proximité, l’Espagne dispose d’une réelle avance sur la France, sachant que les coûts de transport sont un facteur de compétitivité essentiel dans les échanges commerciaux. Ensuite, l’organisation territoriale basée sur l’autonomie des régions renforce les opportunités de conclure des partenariats économiques avec le Maroc, l’expérience ayant démontré que cela se fait plus rapidement à petite échelle, comme c’est le cas pour les régions de Catalogne ou d’Andalousie, seulement en un cadre plus global. En d’autres termes, l’Espagne ne semble pas être un concurrent facile à battre compte tenu de ses atouts et de l’ambition dont elle a fait preuve ces dernières années.

L’avantage historique de la France

Pour l’économie espagnole, le Maroc est une terre d’opportunités, où ses exportations augmentent de près de 20% par an, dépassant celles de la France depuis une dizaine d’années. Résultat : le Maroc est confronté à un lourd déficit commercial global… avec l’Espagne notamment. Le déficit commercial se creuse de 7,8 milliards de DH, passant de 12,1 milliards de DH en 2021 à 19,9 milliards de DH en 2022, selon l’Office des changes. Il faut dire que depuis 2012, l’Espagne a réussi à chiper la place de premier fournisseur du Maroc à la France tout en étant son 2ème client. En revanche, le Maroc enregistre un excédent commercial avec la France depuis 2017. En 2022, l’excédent s’élève à 2,5 milliards DH contre 11,7 milliards DH une année auparavant, soit une baisse de 9,2 milliards DH, selon l’Office des changes.

La même concurrence entre les deux voisins se retrouve également au niveau des investissements, même si la France bénéficie d’un avantage historique à ce niveau. La France reste de loin le premier partenaire économique du Royaume en termes d’investissements directs étrangers (IDE) avec près de 31% du stock d’IDE au Maroc. En 2020, les IDE français (20 milliards de dollars) pesaient près de quatre fois ceux de l’Espagne (5,6 milliards de dollars), 3e investisseur au Maroc, derrière les Émirats arabes unis (14 milliards de dollars).

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Sur ce marché marocain, la France et l’Espagne se disputent plusieurs secteurs. Les deux pays se retrouvent comme de sérieux concurrents dans les projets structurants du Maroc. Les entreprises françaises et espagnoles se disputent les marchés publics, les projets d’énergies renouvelables, les projets ferroviaires, la construction et l’exploitation d’usines de dessalement d’eau de mer, les services de gestion déléguée des transports urbains, etc.

Une rude concurrence des champions marocains

Si pour l’instant, chacune des deux parties tente de tirer son épingle du jeu, il n’est pas rare de voir certaines entreprises des deux pays former un consortium pour remporter un marché public. Car, souvent aussi, leurs entreprises sont confrontées à une forte concurrence, non seulement de la part d’autres sociétés étrangères mais surtout de champions marocains. C’est par exemple le cas aujourd’hui des marchés de la construction d’autoroutes, autrefois presque conquis par les entreprises étrangères. En effet, récemment, la Société Nationale des Autoroutes du Maroc (ADM) a lancé les travaux de construction de la nouvelle autoroute Tit Mellil-Berrechid. L’infrastructure, qui nécessitera un investissement total de 2,5 milliards de DH, sera la première autoroute nationale avec une conception initiale en 2×3 voies et entièrement réalisée par des compétences marocaines. Une première dans l’histoire du réseau autoroutier national. ADM a entièrement confié le chantier, divisé en quatre lots, à des compétences 100% marocaines.

Autre exemple évident : le projet d’autoroute fluviale 100% marocaine. En effet, suite à une procédure d’Appel d’Offres Conception-Construction avec préfinancement, la réalisation de ce projet d’interconnexion entre le bassin du Sebou et le bassin du Bouregreg a été confiée à un groupement d’entreprises marocaines composé de la SOMAGEC (Gérant), de la SGTM, de la STAM et de la SNCE. . L’infrastructure vise à récupérer les volumes d’eau du bassin du Sebou perdus en mer en les transférant vers les bassins hydrauliques du Bouregreg, de l’Oum Er Rbia et du Tensift, afin de sécuriser la demande en eau. l’eau potable des villes de Rabat et de Casablanca ainsi que les besoins agricoles des régions concernées. Ledit projet, d’un coût total estimé à environ 6 milliards de DH qui a bénéficié de l’expertise de ces entreprises marocaines de renommée mondiale, aurait normalement duré une durée de 3 ans, mais il a été réalisé en 6 mois. Un délai record.

Ce n’est pas un hasard si de plus en plus d’entreprises françaises et espagnoles s’associent également aux champions marocains sur certains grands projets comme la future usine de dessalement de Casablanca, où le consortium dirigé par l’Espagnol Acciona et comprenant les marocains Green of Africa et Afriquia Gaz, a remporté le contrat pour la construction et l’exploitation de cette future gare. Idem pour le groupe formé par le français Engie et le marocain Nareva, qui a été déclaré attributaire du projet de dessalement de Dakhla.

De telles expériences collaboratives sont devenues courantes. En témoigne la collaboration du marocain Gaia Energy, spécialisé dans la production d’hydrogène vert et la décarbonation, avec des entreprises espagnoles. «Nous avons créé un environnement collaboratif qui montre que les entreprises marocaines peuvent être à la hauteur des attentes des entreprises espagnoles», souligne son fondateur et président, Moundir Zniber, qui s’est associé à Iberdrola pour proposer des solutions de décarbonation aux entreprises. Marocains. « Le Maroc pourrait être « la prochaine Arabie Saoudite de l’énergie verte ». Cela pourrait produire un grand volume d’énergie sans carbone dont l’Europe a besoin. Et cela pourrait être réalisé avec des entreprises espagnoles comme Abengoa ou Iberdrola. C’est pourquoi nous avons également d’autres collaborations en cours dans le domaine de l’hydrogène avec des entreprises comme Enagás et Arcelor, qui sont très satisfaisantes », dit-il.

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Aujourd’hui, outre la politique de diversification des partenaires du Maroc, ces sociétés sont également offensives, notamment sur le marché français. L’ambassade de France à Rabat a confirmé la première place du Royaume en tant qu’investisseur africain en France en 2022. Le Royaume occupe la première place en termes de création d’emplois (682) et la deuxième place en termes de nombre de projets mis en œuvre en France en 2022 (12). En effet, les nouvelles implantations marocaines en France ont connu une augmentation de plus de 160% du nombre d’emplois créés ou sauvegardés par rapport à l’année précédente. En France, les principaux investisseurs marocains sont les groupes « Safari » (mobilier), « Intelcia » (services), « Groupelec » (conception de tableaux électriques), « TGCC » (immobilier) ainsi que de grandes banques comme « Attijariwafa ». banque », « BMCE Banque » et « Chaabi Banque ».

 
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