Son incursion dans le monde des affaires et de la promotion immobilière l’éloigne des masses populaires qui l’ont adopté. Son discours est devenu plus édulcoré, ses positions moins tranchantes et pendant le Hirak, on ne l’a pas beaucoup vue, sans compter qu’elle était invisible. Elle était plutôt du côté d’El-Mouradia dans la recherche d’une sortie de crise provoquée en concertation avec Saïd Bouteflika et le général Mohamed Mediene – alias Toufik – l’ancien patron du DRS. Ce conclave lui coûte cher. Elle est discréditée aux yeux de l’opinion publique pour avoir embêté deux personnes détestées par le peuple.
Le 9 mai 2019, elle a été placée en détention provisoire à la prison civile de Blida après avoir été entendue par le parquet militaire comme témoin dans l’affaire dite « d’atteinte à l’autorité de l’armée » et de « complot contre l’armée ». . « autorité de l’Etat » ouverte contre Saïd Bouteflika, frère de l’ancien président, et deux anciens hauts responsables des services de renseignement, Mohamed Mediène et Athmane Tartag ». Le 26 septembre, elle a été condamnée à 15 ans de prison pour « complot avec réunion » visant à « porter atteinte à l’autorité de l’État et de l’armée ». Le procès en appel se tiendra devant la cour d’appel militaire de Blida à partir du 9 février 2020. Elle est condamnée à trois ans de prison dont neuf mois, et est donc libérée après avoir purgé cette peine.
Depuis cette date, Louiza Hannoune se fait discrète. On ne l’entend pas dénoncer la vague de répression qui s’abat sur le peuple algérien. Pas un mot sur les centaines de prisonniers d’opinion. Pas un mot non plus sur l’éloignement de la presse du pouvoir ni sur la dégradation des conditions de vie des Algériens.
Il y a seulement deux jours, Louiza Hannoune apparaissait reçue par le président Tebboune au siège de la Présidence de la République. A l’issue de l’audience, elle a prononcé un discours qui s’apparente à un plaidoyer en faveur du pouvoir dans lequel elle a centré son propos sur le sujet favori du régime : la menace extérieure.
48 heures après l’audience que lui a accordée Tebboune, le secrétaire général inamovible du Parti des travailleurs donne une conférence de presse. Même si elle a précisé d’emblée « qu’elle n’était pas là pour parler au nom du chef de l’Etat », elle a fait bien mieux. Elle s’érige en bonne avocate du régime et crie haut et fort ce que pensent Tebboune et son entourage. Son discours était une attaque à grande échelle contre la Ligue arabe et les États qui ont normalisé leurs relations avec Israël.
Louiza Hannoune a pratiquement répété tout ce que Tebboune lui avait dit durant les 3 heures d’audience qu’il lui avait accordées. Selon une Source bien informée, il lui aurait tenu les mêmes propos qu’il avait tenus en présence de 14 responsables de la presse nationale le 3 octobre. Des propos avec lesquels il s’en est pris à de nombreux pays arabes, à la Russie et aux pays africains. Tebboune était encore sous le choc du refus des BRICS de la candidature algérienne. Il a exprimé une amertume qui a rendu impossible la diffusion du contenu de sa rencontre comme prévu initialement.
Il faudra attendre Louiza Hannoune pour que les intentions du régime algérien soient enfin révélées et reflétées de manière insidieuse. Les articles hostiles aux Émirats arabes unis, publiés par certains titres de presse sous la dictée des services secrets, se confirment et enregistrent le soutien du chef de l’Etat. Ce dernier, n’étant pas au courant du plan qui se tramait dans les coulisses du ministère de la Défense nationale, avait limogé en pleine nuit son ministre de la Communication suite à une brève information publiée par le quotidien An-Nahar annonçant « le limogeage de quatre diplomates émiratis arrêtés pour renseignements auprès du Mossad israélien.
Cette fois, Louiza Hannoune parle d’un complot ourdi contre l’Algérie par le Maroc, les Émirats arabes unis et Israël. Pourquoi ce complot ? Quels sont ses indices ? Quelles preuves soutiennent cette accusation ? Aucun des nombreux journalistes présents n’a osé poser ce genre de questions agaçantes. C’est du journalisme à l’algérienne.
Forte de l’audience que lui accorde Tebboune, la passionaria algérienne, très heureuse de son retour sur la scène politique, apporte sa contribution. Elle appelle à une mobilisation sacro-sainte autour du régime pour contrer les visées marocaines et émiraties. Tous les problèmes de l’Algérie viennent de là. Au diable les longues files d’attente pour obtenir des produits alimentaires de première nécessité, les centaines de prisonniers d’opinion, les violations des droits fondamentaux des citoyens. L’heure est à la mobilisation contre l’ennemi extérieur, continue-t-elle de proclamer.
Quelle aubaine pour Tebboune et son régime ! Une Louiza Hannoune qui retrouve un second souffle se révèle être leur meilleure avocate jusqu’ici ignorée. Avec sa verve habituelle, elle met en avant « la volonté du président de faire respecter la liberté de la presse ». Sur le plan social, elle estime que « l’augmentation des salaires, cantonnée aux fonctionnaires, devrait être étendue à tous les secteurs d’activité, tant privés que publics ». Elle constate que « le président annonce une bonne nouvelle pour cette année à venir. »
Le plus urgent pour les Algériens, si l’on comprend bien Louiza Hannoune, c’est la Palestine et cette foutue Ligue arabe.
Par ailleurs, elle ne manquera pas de proposer de geler l’adhésion de l’Algérie à cette organisation panarabe infestée de « régimes arabes traîtres à la cause palestinienne ». Elle appelle à la création d’un front composé de l’Algérie, de la Tunisie, du Liban, de la Syrie et de l’Irak « pour contrer les normalisateurs ». Comme si ces pays allaient suivre l’Algérie dans cette démarche. Comme si l’Algérie avait assez de crédit pour fédérer autour d’elle ces pays qui veulent entretenir de bonnes relations avec les pays du Golfe ciblés par une Algérie incapable d’assurer la satisfaction alimentaire de sa population.
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