Ce pays, comme la plupart des pays africains, est fragile ! Très fragile ! L’équilibre sociologique du pays, mis à mal par une crise économique sans précédent, ajoutée aux tensions politiques qui ont fini par scinder le pays en deux, s’en trouve fragilisé ; tout cela, dis-je, doit pousser chacun à agir avec circonspection. En parole mais aussi et surtout en action !
En fait, c’est à chacun de nous d’œuvrer pour la paix. Et cette paix que nous convoitons tous dépend en grande partie des deux figures clés de notre système politique, à savoir le président Macky Sall et son adversaire le plus coriace, Ousmane Sonko.
La recherche de cette paix est d’autant plus impérative que le Sénégal, notre pays, est entouré d’un cercle de feu aux ramifications et aux liaisons difficilement contrôlables. Quand les services secrets des pays les plus puissants du monde perdent leur latin en essayant de comprendre ce qui se passe au Sahel, sans parler du nôtre.
Dans ces conditions, est-il judicieux de continuer à jouer avec le feu dans des procès qui ont fini d’afficher leur caractère politique à la face du monde ? Écoutons à cet égard l’excellent Boubacar Boris Diop, qui ne peut être soupçonné de partialité, martèle ses vérités dans une interview largement relayée par la presse : « Le verdict est la preuve irréfutable du complot ourdi contre Sonko. Le tribunal a été contraint de l’acquitter car les accusations portées contre lui étaient ridicules mais n’a pas osé le laisser partir car derrière il y avait un ordre politique à honorer ».
Le mot est lâché : « contrôle politique !!! “. Alors faites attention!
De l’indépendance à nos jours, je ne pense pas que le Sénégal ait connu une crise aussi grave que celle qu’il traverse actuellement. On a vu passer les événements de 1962 avec deux hommes, Dia Mamadou / Léopold Sedar Senghor, partis pour former le couple idéal capable de placer le Sénégal sur la rampe du développement, finissant par se séparer en raison de profondes divergences idéologiques et politiques.
Cette querelle entre les deux hommes culmina au point que Senghor accusa Dia Mamadou d’avoir fomenté un coup d’Etat. Une très grave crise institutionnelle s’en est suivie sans que les fondements symboliques qui garantissaient la pérennité de la nation sénégalaise ne soient ébranlés.
Mai 68, l’État, mis en place par Senghor est au bord de l’effondrement avec des grèves ponctuées de violences dans les secteurs stratégiques du pays. Mais là aussi ce qui fait le charme de ce pays, à savoir la bonne entente entre les différentes ethnies, n’a pas été rompu.
Ce bel équilibre que nous avons su préserver contre vents et marées, pourrait être brisé si nous n’y prenons garde. Et la politique dans sa version la plus négative et la plus hideuse a été là. Disons les choses telles qu’elles sont.
Dans cette affaire de mœurs qui empoisonne l’espace public depuis plus de deux ans et qui implique l’homme politique le plus populaire du moment, les citoyens sénégalais ont l’impression qu’on est en colère contre quelqu’un qui dérange. Les événements malheureux que nous avons vécus en 2021 et 2023 en témoignent en quelque sorte.
Mars 2021, le Sénégal tombe dans une fureur destructrice difficilement imaginable dans un pays où le caractère civilisé et tolérant de ses habitants a toujours été loué. Et ce n’est pas tout, juin 2023 : rebelote ! Les Sénégalais descendent massivement dans la rue suite à l’annonce d’un verdict défavorable à l’opposant Ousmane Sonko.
Ces événements tragiques avec leurs lots de morts, de blessés, de biens matériels saccagés, ont mis l’économie du pays, tous secteurs confondus, en apnée.
Mais plus grave, la situation a révélé une déchirure profonde du tissu social. Des groupes ethniques qui vivaient en parfaite harmonie commencent malheureusement à cultiver une certaine méfiance entre eux.
De fait, les ressorts sociologiques sur lesquels ce pays s’est jusqu’ici rassis sont fortement ébranlés par les turbulences vécues ces dernières années. Combien d’analystes ou d’observateurs lucides ont tiré la sonnette d’alarme ? Et malheureusement, nous ne les avons pas écoutés.
Néanmoins, il faut continuer à se parler encore et encore, même si certains, moqueurs, peuvent s’en moquer : “Encore un rêveur à penser que ces deux-là – Macky Sall et Ousmane Sonko – peuvent se retrouver autour d’une table vu le mur de la méfiance, de l’incompréhension ou même h… qui les sépare ». Il est temps, à mon humble avis, de trouver un schéma dans lequel il n’y aurait ni perdants ni gagnants, et qui pourrait enfin remettre le pays au travail.
Cette direction dans laquelle j’ai toujours poussé et ne trouve malheureusement pas l’approbation de certaines personnes. Normal, dites-vous !
Ces esprits qui sont dans la logique de l’irréductible, vous disent que dans cette affaire Sonko, il faut éviter de créer un dangereux précédent en n’appliquant pas le verdict de la justice.
Mais ces gens oublient-ils que la justice est rendue au nom du peuple ? Oublient-ils encore que la justice, si compétente soit-elle, ne peut avoir raison sur tout un peuple ?
Les gens, en très grande majorité, ont déjà blanchi Sonko. C’est la vérité! La vérité historique ! Sur la base de ce qui précède, je crois que l’idée avancée par l’éminent juriste Doudou Ndoye doit être saisie d’urgence pour une sortie définitive de la crise.
Soit dit en passant, les Sénégalais ont trop souffert de cette affaire, Sonko/Adji Sarr. Sachons maintenant, en tant que nation responsable qui assume ses erreurs, surmonter cette page tragique et douloureuse de notre histoire.
Les Sénégalais souffrent ! Et terriblement ! Cheikh Yérim Seck, qu’on ne peut pas considérer comme un anti-Macky, dans un débat épique qui l’a opposé à Oumar Seck Ndiaye, un monsieur que je venais de découvrir et qui m’a beaucoup marqué, a déclaré ceci : « Les Sénégalais sont fatigués ! Un nombre croissant de jeunes vivent au chômage et ne voient aucune perspective sérieuse à l’horizon. Ce regard que CYS porte sur la situation du pays, qui peut le contester ? Personne !!!
Il faut donc s’attaquer aux fondamentaux sans lesquels aucune nation n’est viable.
Dans l’ensemble, la clé pour résoudre les problèmes que nous connaissons actuellement est entre les mains du président, Macky Sall. Pas ailleurs !
C’est vrai que la posture qui est celle du président Macky, n’est pas facile car dans son entourage, il y a des fauteurs de guerre qui lui proposent d’en découdre avec Sonko. Pareil chez Sonko !
Je crois que ceux qui montrent au président Macky Sall la voie de la confrontation sont ses pires ennemis. On ne peut pas vraiment aimer quelqu’un et le pousser dans une confrontation à l’issue incertaine. Attention !!!
Quarante-six (46) jeunes, tués entre mars 2021 et juin 2023, nous apprend un journal local. C’est trop ! N’en rajoutons pas ! La bonne réputation du Sénégal, vitrine de la démocratie en Afrique, commence sérieusement à se fissurer, au point que certains amis du Sénégal s’en inquiètent !
Nous partageons l’inquiétude de ce compatriote, El Hadj Gorgui Wade Ndoye, journaliste accrédité à l’ONU, Genève : « Quand je suis allé à l’ONU le lendemain pour couvrir la 111e session de la conférence du travail… de la délégation guinéenne. L’un d’eux, un ami hésitant, me défie : « Mais. Ce qui se passe ? On ne s’attendait pas à ça du Sénégal ! Le lendemain, c’est au tour d’un Malien de lui lancer ces mots terribles : « Si le Sénégal tombe, toute l’Afrique, particulièrement l’Afrique francophone, tombera ! « J’ai flanché, je sais de quoi il parle, raconte El Hadj Gorgui Wade Ndoye.
Vous le voyez, Monsieur le Président : la situation est grave ! C’est pourquoi l’histoire, LA GRANDE HISTOIRE, attend de vous que vous surmontiez tous les affects qui tirent l’homme vers le bas pour vous élever à la hauteur des espoirs de tout un peuple, à savoir faire la paix avec votre principal adversaire politique.
Du côté de Sonko comme de votre côté, vous devez faire des efforts pour surmonter tous ces malentendus qui ont fini par créer une barrière entre vous. Ce n’est pas une faiblesse de tendre la main à l’autre. C’est, me semble-t-il, la marque des grands hommes.
Je dois conclure et c’est remercier en personne, les Alioune Tine, Pierre Goudiaby Atépa et tous les autres qui, dans l’ombre, se battent sans relâche pour faire triompher encore le génie sénégalais, capable dans les moments de doute et d’incertitude, de ramener la paix dans Cœurs et esprits. Que tous ces hommes et ces femmes, magnifiques de grandeur et de beauté intérieure et qui s’acharnent à prêcher la bonne parole, que tous ces grands messieurs sachent qu’ils ont la reconnaissance éternelle des dix-sept millions de Sénégalais.
El Hadj Mansour Mbaye, communicant traditionnel, a l’habitude de marteler ces mots : « Chaque Sénégalais doit veiller à ne jamais compromettre la cohésion sociale, ni en paroles ni en actes. Le Sénégalais est connu pour sa propension à dire de belles choses et à faire de belles choses. »
Que les autres – tous les autres – qui tiennent un discours incendiaire en portent la responsabilité devant Dieu et devant les hommes.
Que dire d’autre sinon convoquer ces paroles sublimes, marquées du sceau de la lucidité et signées du poète Amadou Lamine Sall. Puissent ces mots résonner dans la conscience de tous les chefs d’Etat africains et autres futurs dirigeants de ce continent et être pour eux une Source de méditation : « Nous voudrions ici, du haut de cette tribune, dire aux chefs d’Etat de notre cher continent : aidez la démocratie à se construire, si elle se construit, consolidez-la, si elle se consolide, renforcez-la, si elle se renforce, protégez-la, si elle se protège, garantissez-la pour que même contre vous, et après vous, elle tienne comme force de loi ! Enfin, aide-nous à ne pas céder à la malédiction d’une insupportable incapacité à nous développer. Nous pouvons et devons vaincre : « le mauvais infini » ! in DEFENSE DE SE TAIRE, TOME 1 Culture, Enracinement et ouverture, éditions feux de brousse, 2ème trimestre, 2022, Dakar
C’est excellemment dit ! Evitons d’en faire trop ! Faisons la paix si nous voulons avancer. Je continuerai à le dire. Si l’Afrique du Sud post-apartheid n’a pas sombré dans la violence, elle le doit beaucoup à un homme qui a su s’imposer des limites et les imposer à ses proches. Mais bon, ce n’est pas Mandela qui veut !
La maîtrise de Nelson Mandela en politique et qui a ébloui le monde, c’est cette force morale qui lui a permis de vaincre la haine, le ressentiment, le désir de vengeance. Plaise à Dieu que ce grand Monsieur qui a honoré le genre humain et dont l’HISTOIRE est honorée, inspire les Sénégalais de tous bords. Ils en ont bien besoin.
Monsieur le Président Macky Sall, faites preuve de patience en commençant d’abord par libérer tous les détenus accusés de délits d’opinion, afin qu’ils puissent passer la Tabaski avec leurs familles. Ce serait un acte majeur en faveur de l’apaisement ! QUE DIEU SAUVE LE SÉNÉGAL !
Fait à Pikine le 18/06/2023
* Madi Waké TOURE, Assistante Sociale, Conseillère en Travail Social
tmadi [email protected]
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