Je ne prétends pas savoir ce que veulent les gens LE MRE. (Il faut toujours se méfier de ce petit pronom personnel, LEqui serrent trop et mal.) Les MRE sont présents partout dans le monde, ils sont de tous âges et de toutes conditions : comment faire une liste exhaustive de leurs souhaits ?
Cela dit, je suis un, MRE, et même au carré ou au cube, ayant résidé dans quatre pays étrangers (France, Belgique, Angleterre, Pays-Bas), et j’ai rencontré suffisamment de compatriotes en exil pour savoir deux ou trois choses que j’ai au disposition du futur organisme qui s’occupera de nous. Voici une liste non exhaustive de souhaits :
1. Adieu au sous-développement. Dit de manière plus positive, le MRE veut être fier de son pays. Soyons honnêtes : les réalisations n’ont pas manqué au cours des deux dernières décennies. Chaque fois que nous rentrons chez nous, nous en voyons de nouveaux. Des autoroutes, des voies ferrées – cette fierté, c’est la première fois qu’on voit un TGV aux couleurs rouge et vert circuler quelque part entre Tanger et Kénitra… -, un joli pont à haubans (ma spécialité quand j’étudiais le génie civil), les tours CFC… Et là c’est tout ce qu’on ne voit pas : je me souviens de l’expression ravie d’une Marocaine vivant à West Hollywood (ça ne s’invente pas…) lorsqu’elle découvrait avec Moi et une délégation anglaise le Midparc de Nouaceur, où sont fabriqués les fuselages d’avions . Cet effort de développement doit être maintenu et renforcé avec, entre autres, une extension vers les villes propres. (El Jadida et Azemmour, tous deux chers à mon cœur, sont d’une crasse répugnante…)
2. Adieu à la corruption. Je suis consterné par le nombre de notaires, de présidents municipaux et de parlementaires qui sont en prison. D’un côté, c’est une bonne chose : cela prouve qu’il n’y a pas d’impunité ; mais de l’autre, c’est désespéré. Ces types et leurs semblables n’ont-ils vraiment aucune notion du service public ? En tout cas, je connais beaucoup de MRE qui hésitent à investir par dégoût face à tant de cas de corruption ou de malversations.
“L’esprit muqata’a, cette attitude commune à la plupart de ceux qui détiennent ne serait-ce qu’une once de pouvoir pour bloquer instinctivement toute initiative chez les autres.”
3. Adieu à l’esprit mouqata’a. Nos jeunes lecteurs ne le savent peut-être pas, mais il fut un temps au siècle dernier où mouqata’a-s étaient le repaire de types coquins, méchants, au regard fuyant, hostiles par principe, dont le seul objectif semblait être de ruiner la vie du citoyen. Dès que nous sommes apparus dans leur champ de vision, ils ont aboyé : r’ja’ ghedda ! (Revenez demain !); ou: la qualité n’existe pas ! (le patron n’est pas là !) ; ou encore le surréaliste : jib chat l’hayat! (Prouve-moi que tu es vivant !) J’ai connu, dans ma jeunesse, ce huitième cercle de l’enfer, avec ses simoniaques dans la troisième fosse. Je tremble encore.
Bien qu’il y ait eu quelques progrès en termes de mouqata’a-s à proprement parler -pourquoi le nier ?-, l’esprit mouqata’ason, ne semble pas avoir disparu ; C’est l’attitude commune à la plupart de ceux qui détiennent ne serait-ce qu’une once de pouvoir. bloquerinstinctivement, toute initiative chez autrui. Vous arrivez dans leur bureau avec un projet d’avenir, cohérent, bien construit et qui sert l’intérêt général – mais vous avez besoin de leur imprimatur. Une formalité ? Rêve toujours, camarade.
L’esprit mouqata’a règne. Le gars vous fixe d’un regard suspicieux puis il examine attentivement votre projet, le regard sombre, les lèvres méprisantes – avec une seule obsession : comment puis-je te bloquer ?
Triomphant:
– Vous n’avez pas rempli le formulaire A-28-ZX-34(bis) à temps !
– Mais ce n’était pas indiqué sur le site du ministère ?
– J’naffou le site. C’est moi qui vous le dis : formulaire A-28-ZX-34(bis).
Nous devons éradiquer l’esprit mouqata’a si nous voulons avancer – et si nous voulons que nos MRE reviennent investir dans le pays de leurs ancêtres.
Je m’arrête ici et vous invite, chers lecteurs, à compléter cette liste, que vous soyez MRE ou non. (personne n’est parfait).
PS : Après avoir écrit ce texte, j’ai pris un café avec une collègue qui revenait tout juste de New York où elle a mené une brillante carrière pendant deux décennies. Elle m’a fait part d’une autre question qui tracasse certains MRE : 4. L’équivalence des diplômes. C’est un problème connu donc je vais vraiment m’arrêter là. À toi de voir.