Quand le cadre législatif tant attendu divise

Quand le cadre législatif tant attendu divise
Quand le cadre législatif tant attendu divise

Même si l’adoption d’un encadrement de ce droit fondamental est attendue depuis de nombreuses années, le projet de loi organique n°97-15, destiné à définir les modalités d’exercice du droit de grève, a suscité de vives critiques et un profond mécontentement de la part des autorités. partie des syndicats. Ce texte, loin de faire consensus, alimente les tensions et creuse encore davantage le fossé entre ces organisations représentatives des travailleurs et le gouvernement.

Récemment adopté à la majorité à la Chambre des représentants (124 pour, 41 contre, aucune abstention), le projet de loi organique régissant le droit de grève marque une étape cruciale dans l’histoire sociale et législative du Maroc. Cependant, loin de faire l’unanimité, ce texte suscite une forte opposition de la part des syndicats, qui ne cachent pas leur mécontentement quant à son contenu.

Bien que les amendements aient introduit d’importantes nouveautés visant à renforcer l’équilibre entre droits et obligations, le processus législatif reste incomplet. Les syndicats, durcissant leur position, dénoncent une loi qu’ils jugent inadaptée et restrictive, faisant de cette adoption une étape aussi contestée que stratégique dans le cadre d’un droit fondamental.

Lorsqu’on parle du droit de grève au Maroc, il est essentiel de souligner l’attachement institutionnel constitutionnel à ce droit universel, consacré depuis 58 ans par la reconnaissance constitutionnelle, a précisé Abbas El Ouardi, professeur de droit public à la FSJES de Rabat et directeur général de la Revue Africaine des Sciences Politiques, dans une analyse envoyée à Hespress FR.

Il a rappelé que la Constitution de 2011 actuellement en vigueur stipule dans son article 29 : « Le droit de grève est garanti. Une loi organique fixe les conditions et modalités de son exercice « . Cinq ans plus tard, en septembre 2016, le Conseil des ministres a approuvé un projet de loi organique réglementant ce droit au Maroc. Cependant, ce projet n’a pas encore achevé le processus législatif pour entrer en vigueur, a souligné le professeur.

Les différentes constitutions marocaines ont constamment affirmé le droit de grève. En effet, la Constitution de 1962, à travers son article 14, stipule que « le droit de grève est garanti » et prévoit qu’une loi organique précise les conditions et modalités nécessaires à son exercice. Cette disposition a été confirmée dans la Constitution de 1970, toujours à l’article 14, avec des termes identiques. La Constitution de 1972 a réitéré ce droit dans le même article, précisant que la loi organique en fixera les modalités. Par la suite, la Constitution de 1992 a maintenu cette garantie dans les mêmes termes dans l’article 14. Enfin, les Constitutions de 1996 et 2011 ont également consacré ce droit, respectivement à l’article 14 pour celle de 1996 et à l’article 29 pour celle de 2011, a détaillé El Ouardi.

« Malgré cet ancrage constitutionnel, pourquoi le volet législatif de ce droit, à savoir la promulgation de la loi organique sur le droit de grève, tarde-t-il à voir le jour ? 58 ans d’attente ont exacerbé les problèmes liés à l’exercice de ce droit constitutionnel, confronté à des dilemmes tels que le rapport entre salaire et travail, les retenues sur salaire et le principe constitutionnel de continuité des services publics.», a-t-il déploré.

Selon l’expert, l’exercice du droit de grève au Maroc s’est souvent déroulé dans un contexte de tensions récurrentes entre les syndicats et le gouvernement. Ces frictions, alimentées par des divergences d’approches et d’intérêts, ont été particulièrement évidentes autour du projet de loi organique n° 2017-2017. 97-15, destinée à encadrer ce droit fondamental. Présenté il y a plusieurs années, ce projet est resté en suspens à la Chambre des représentants pendant près de huit ans, illustrant les obstacles institutionnels et politiques qui freinent l’adoption d’un cadre réglementaire clair et efficace. Ce blocage prolongé a donné lieu à des négociations intenses et souvent houleuses, accentuant les retards dans la concrétisation législative de ce droit.

Dans le cadre du mandat actuel du gouvernement, des efforts ont été déployés pour revoir les éléments clés afin de finaliser cette loi dans un délai raisonnable. Toutefois, des désaccords persistent sur les questions stratégiques, a-t-il indiqué. Parmi les principaux points de friction figurent les modalités de mise en œuvre de la grève, l’équilibre à trouver entre le droit de grève et la préservation de l’ordre public, ainsi que le régime des sanctions applicables. Ces divergences continuent d’alimenter une dynamique conflictuelle entre les syndicats et l’exécutif, entravant l’élaboration d’un consensus.

Selon le professeur, il est crucial que la réglementation du droit de grève ne soit pas vue comme un obstacle à l’exercice de ce droit constitutionnel, mais plutôt comme un mécanisme visant à le faciliter tout en favorisant l’esprit de responsabilité civique. . Un tel cadre devrait garantir à la fois le respect des droits des travailleurs et la continuité des services publics, en inscrivant l’exercice de la grève dans une logique de coopération institutionnelle et de respect mutuel entre les différentes parties prenantes.

« L’approche punitive envers l’exercice du droit de grève doit être abandonnée au profit d’un dialogue constructif entre les parties prenantes. Une telle approche favoriserait des résultats fondés sur l’intérêt général de la nation et des citoyens.“, conclut El Ouardi.

 
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