Par Ilaria vendredi
A partir du 22 janvier 2025, le musée du Louvre consacre une exposition à Cimabue, l’un des artistes les plus importants du XIIIe siècle. Il est le résultat de deux faits divers « Cimabuesques » d’une grande importance pour le musée : la restauration de la Maestà et l’acquisition d’un panneau inédit de Cimabue redécouvert en France en 2019 et classé Trésor National, La Dérision du Christ.
Les deux tableaux, dont la restauration s’est achevée en 2024, constituent le point de départ de cette exposition qui, en réunissant une quarantaine d’œuvres, vise à mettre en valeur l’extraordinaire richesse et l’incontestable nouveauté de l’art de Cimabue. L’artiste fut l’un des premiers à ouvrir la voie au naturalisme dans la peinture occidentale, cherchant à représenter le monde, les objets et les corps tels qu’ils existent. Chez lui, les conventions de représentation héritées de l’art oriental, si en vogue jusqu’alors, laissent place à une peinture inventive, cherchant à suggérer un espace tridimensionnel, des corps en volumes et modelés par de subtils dégradés, des membres articulés, des gestes naturels et des émotions humaines. .
Après une partie introductive consacrée au contexte de la peinture en Toscane, notamment à Pise au milieu du XIIIe siècle, le parcours se concentre sur la Maestà du Louvre : les nouveautés qui se manifestent dans ce tableau ont amené certains historiens de l’art à nuancer comme « l’acte de naissance de la peinture occidentale ». La restauration a permis, outre de redécouvrir la variété et la subtilité des couleurs, de redécouvrir de nombreux détails cachés par les repeints qui mettent en valeur la fascination de Cimabue et de ses mécènes pour l’Orient, tant byzantin qu’islamique.
La question cruciale de la relation entre Duccio et Cimabue est alors abordée. Le parcours se poursuit avec une section construite autour du diptyque Cimabue, dont le Louvre rassemble pour la première fois les trois seuls panneaux connus à ce jour. La verve narrative et la liberté dont fait preuve Cimabue dans cette œuvre aux couleurs chatoyantes en font un précédent important et jusqu’ici insoupçonné de la Maestà de Duccio, chef-d’œuvre de la peinture siennoise du Trecento.
L’exposition se termine par la présentation du grand saint François d’Assise recevant les stigmates de Giotto, destinés au même endroit que la Maestà du Louvre, le tramezzo (la cloison qui sépare la nef du chœur) de San Francesco de Pise, et peint quelques années plus tard par le jeune et talentueux disciple de Cimabue. A l’aube du XIVe siècle, Duccio et Giotto, tous deux profondément marqués par l’art du grand Cimabue mort en 1302, incarnent désormais les chemins du renouveau de la peinture.