Trump parle d’utiliser la « force économique » pour annexer le Canada, Trudeau et Joly répondent

Trump parle d’utiliser la « force économique » pour annexer le Canada, Trudeau et Joly répondent
Trump parle d’utiliser la « force économique » pour annexer le Canada, Trudeau et Joly répondent

Le président élu des États-Unis, Donald Trump, a menacé mardi d’utiliser la « force économique » pour annexer le Canada. Les politiciens canadiens se sont rapidement indignés, tandis que les experts doutent du sérieux de cette proposition.

M. Trump a tenu mardi plusieurs propos incendiaires lors d’une conférence de presse décousue dans son fief de Mar-a-Lago, en Floride. Il a annoncé son intention d’annexer le canal de Panama et le Groenland, en recourant à la force si nécessaire. Quant à savoir s’il pourrait faire la même chose pour le Canada, il a exclu de recourir à la force militaire pour faire de son voisin du nord le 51e État, mais a menacé d’y parvenir en utilisant la « force économique ».

“Si vous vous débarrassez de cette ligne artificiellement tracée et regardez à quoi elle ressemblerait, ce serait également bien mieux pour la sécurité nationale”, a déclaré M. Trump, faisant référence à la frontière entre le Canada et les États-Unis. « Essentiellement, nous protégeons le Canada », a-t-il soutenu.

Le président élu a également affirmé à plusieurs reprises que le Canada était subventionné par les États-Unis, citant comme preuve le déficit commercial entre les deux pays. Rappelons que M. Trump avait déjà annoncé qu’il comptait imposer des droits de douane de 25 % au Canada s’il ne parvenait pas à endiguer « le flux de drogues illégales à travers la frontière ».

Le président élu et son équipe n’ont pas encore donné de détails sur la nature des mesures que l’administration Trump pourrait prendre pour réaliser ses projets d’expansion territoriale, a rapporté le Le journal Wall Street mardi.

Dans la soirée, le président américain a réitéré ses provocations sur son réseau social Truth Social, en publiant une carte des Etats-Unis incluant le Canada.

Vives réactions à Ottawa

La classe politique canadienne n’a pas tardé à se rebeller. «Jamais, au grand jamais, le Canada ne fera partie des États-Unis», a immédiatement écrit le Premier ministre canadien Justin Trudeau à propos de «le plus grand partenaire commercial et sécuritaire de l’autre». » C’est la première fois que le Premier ministre commente directement les propos du président élu américain à l’occasion du 51e État, qui ont grandi et se sont multipliés depuis qu’il en a plaisanté pour la première fois en novembre.

La ministre des Affaires étrangères, Mélanie Joly, a ajouté en affirmant sur le réseau social que « les propos du président élu Trump démontrent une incompréhension totale de ce qui fait du Canada un pays fort ». « Nous ne reculerons jamais face aux menaces. »

Le chef conservateur Pierre Poilievre a également indiqué sur X que « le Canada ne sera jamais le 51e État. Période. » Il accuse un gouvernement libéral « faible et pathétique » qui n’a pas réussi à faire comprendre aux États-Unis l’importance du Canada, notamment en raison de ses exportations énergétiques et de ses importations de produits américains.

La réponse de Jagmeet Singh, le chef du Nouveau Parti démocratique, a été sans équivoque : « Arrêtez ces conneries, Trump. Personne ne veut vous rejoindre. » « Vos attaques vont nuire aux emplois des deux côtés de la frontière. Si vous attaquez les emplois canadiens, les Américains en paieront le prix », a-t-il écrit sur X.

Comment réagir dans les circonstances ?

La ligne de conduite à adopter par les hommes politiques canadiens dans de telles circonstances ne fait pas l’unanimité parmi les experts consultés par Le Devoir.

« La première chose qu’il faut faire, et qui n’a pas été faite au début, c’est de dire que le Canada est un pays souverain avec sa propre culture, sa fierté, ses coutumes, ses valeurs, et que c’est une plaisanterie inappropriée de la part du gouvernement. président », selon Jonathan Paquin, professeur de science politique à l’Université Laval. Le contexte politique canadien, où le Premier ministre fait partie d’un gouvernement minoritaire et a récemment annoncé sa démission, « n’est vraiment pas une situation idéale » pour répondre efficacement à ces menaces, selon lui.

Julien Tourreille, chercheur en résidence à la Chaire Raoul-Dandurand de l’Université du Québec à Montréal, voit les choses différemment. «Quand il a commencé sa blague sur les 51e State, le mieux aurait été que personne ne réagisse au Canada, puisque, évidemment, plus on réagit, plus cela l’incite à répéter cette blague. » Et en le répétant, « on a l’impression qu’il commence à se convaincre que c’est une possibilité ».

«Les politiciens canadiens ont tendance à réagir de manière excessive à ce genre de situations», notamment parce qu’ils y sont poussés par les médias, estime Pierre Martin, professeur de sciences politiques à l’Université de Montréal. M. Trump cherche à provoquer ses adversaires, bien plus qu’à élaborer une proposition réaliste, selon lui.

“Personne n’y croit vraiment”

Que cherche à faire Donald Trump avec ses menaces d’annexion ? Il y a essentiellement deux possibilités, explique Jonathan Paquin. “La première est qu’il utilise cet argument pour provoquer le Canada, l’intimider, saper le moral de ses dirigeants afin d’obtenir de lui un maximum de concessions” dans les questions de sécurité des frontières, notamment d’immigration et de trafic de drogue. «La deuxième possibilité, beaucoup plus troublante, serait que Donald Trump choisisse désormais d’adopter une approche impériale en matière d’annexion de territoires», poursuit M. Paquin.

« On ne peut pas prendre ses propos au pied de la lettre, mais on ne peut pas non plus ne pas le considérer du tout », prévient Julien Tourreille. Il existe trois méthodes pour étendre le territoire américain, explique-t-il : la conquête militaire, l’achat et la procédure judiciaire, qui nécessiterait la volonté du Canada. Cette dernière procédure serait peu probable, étant donné que seulement 13 % des Canadiens souhaiteraient que leur pays devienne un État des États-Unis, selon un sondage Léger de décembre 2024.

“Personne ne croit vraiment” que Donald Trump veuille faire du Canada un État américain, selon Pierre Martin. Ce type de diatribe contribue cependant à renforcer son image de bon négociateur auprès de sa base et à établir une position de force pour négocier avec les autres pays, selon lui. « La réponse la plus rationnelle » à ses menaces serait probablement de dire que la question sera discutée lorsqu’il sera président.

Par ailleurs, l’intégration des économies canadienne et américaine profite aux producteurs depuis des décennies, mais il n’est pas clairement établi que les Canadiens en ont bénéficié davantage que les Américains, estime le professeur Martin. Le déficit commercial n’est « pas nécessairement le signe d’une exploitation d’un partenaire par l’autre », malgré l’interprétation qu’en fait Donald Trump.

Avec La Presse Canadienne et l’Agence -

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