Georgette Mazia alias « Mamie Chabine » et ses 70 enfants

Ancienne nourrice, Georgette Mazia, bientôt 83 ans, a été honorée par le Club Femmes d’Outre-Mer. En 25 ans de service, près de 70 enfants sont venus chez lui. Rencontre.

Elle a eu quatre enfants, deux garçons et deux filles. Mais quand Georgette Mazia parle de « ses » enfants, l’ancienne nourrice ne pense pas qu’à ceux qu’elle a mis au monde. Ces descendants supplémentaires, ce sont les près de 70 garçons et filles qui se succèdent sous son toit depuis 25 ans.

Née le 23 avril 1942 à Cayenne, Georgette Mazia commence à travailler jeune. Très jeune. A travers ses souvenirs, elle évoque le ménage qu’elle faisait dans une famille à Saint-Laurent du Maroni, « à l’âge de 12 ans, peut-être même avant »puis son retour à Cayenne.

En 25 ans, Georgette Mazia a hébergé près de 70 adolescents

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Elle est employée d’entretien lorsqu’elle devient, un peu par hasard, une « famille d’accueil ». A l’époque, comme encore aujourd’hui, ce système permet aux adolescents de disposer d’un logement lorsqu’ils doivent quitter leur famille pour poursuivre leurs études sur le littoral. “Ça a commencé avec Guito, se souvient Georgette Mazia. Il est allé au lycée Voltaire (ancien nom du lycée Max-Joséphine, NDLR) avec deux de mes enfants. Il trouva qu’ils étaient toujours bien habillés et soignés. Il leur a dit “demande à ta mère de me surveiller”. La Ddass (Direction Départementale de la Santé et des Affaires Sociales) a accepté. Guito venait de Saint-Laurent. Les enfants se sont ensuite passé le mot. »

Georgette Mazia remonte le temps. Les noms se succèdent : Guito, Richard, Ghislaine… La plupart originaires de l’ouest de la Guyane. « J’ai généralement eu trois enfants, pendant trois ans. Je ne sais pas si c’est Marcus ou Edith qui a commencé à m’appeler « Mamie Chabine ». Après, les gens ont continué à m’appeler ainsi. »


« Mamie Chabine », comme l’appelaient les enfants qu’elle a accueillis, aura 83 ans en avril

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Même si globalement tout se passe bien, il faut parfois passer par des phases de frictions. « Un enfant s’est plaint parce qu’il trouvait que la nourriture n’était pas assez consistante. En fait, c’était différent de ce qu’il avait l’habitude de manger. Il y a eu un rapport, son père est venu. Et puis ça a marché avec lui. » En plus des adolescents venus pour leur scolarité, Georgette Mazia accueille temporairement des enfants nécessitant un placement d’urgence. Là-bas, les séjours sont plus courts et même si les cas sont » plus compliqué », résume-t-elle, respectant une forme de discrétion, Mamie Chabine poursuit sa tâche. En 2004, elle reprend également Saveurs Péyi, l’entreprise créée par l’une de ses filles, qui fabrique et commercialise du kalawang.

Ceux qui sont restés longtemps étaient un peu nos petits frères

Mylène Mazia, fille de Georgette

Alors qu’elle conservait dans un premier temps en parallèle son poste d’agent d’entretien, Georgette Mazia finira par se consacrer uniquement à son rôle de famille d’accueil. Chez elle, selon sa fille Mylène, la cohabitation se passait bien avec tous les enfants de passage. « Nous avons toujours été nombreux. Chacun avait sa tâche : la vaisselle, les couverts, le ménage… Nous mangions toujours tous ensemble. Il y avait beaucoup de respect entre nous. Ceux qui sont restés longtemps étaient un peu nos petits frères. »


Mylène et Georgette Mazia

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Le 19 décembre dernier, lors du premier événement organisé par le Club Femmes d’outre-mer, elle était l’une des deux personnalités récompensées. « Je suis secrétaire générale de l’association, raconte sa fille Mylène. Nous cherchions à mettre en valeur des personnes qui n’ont pas encore été mises en avant. Le bureau s’est réuni pour y réfléchir. Une des adhérentes a dit qu’elle pensait à une personne qui a travaillé dans le secteur social, qui véhicule de grandes valeurs de partage, qui est chef d’entreprise… Et elle a suggéré le nom de ma mère. »

j’étais aimé

Lors de la cérémonie intitulée « De l’ombre à la lumière », Georgette Mazia a reçu le trophée du Club des mains de Christiane Taubira. Et comme le hasard fait bien les choses, il a été réalisé par l’un de ceux dont elle s’occupait, Bruno. Lors de la soirée de gala, la maire de Cayenne, Sandra Trochimara a également remis à Georgette le trophée Cœur de la Ville de Cayenne.

Georgette Mazia pose avec ses filles, Mylène à gauche et Murielle à droite. Au centre, Karine Petchy, présidente du Club des femmes d'outre-mer et Sandra Trochimara, maire de Cayenne. Christiane Taubira, ancienne garde des Sceaux,
Georgette Mazia pose avec ses filles Mylène à gauche et Murielle à droite. Au centre, Karine Petchy, présidente du Club des femmes d’outre-mer et Sandra Trochimara, maire de Cayenne. Christiane Taubira, ancienne garde des Sceaux,

©Kathryn Vulpillat

«C’était génial» résume Mamie Chabine en évoquant cette soirée où son engagement auprès de ces nombreux enfants a été salué. Si elle ne se souvient pas de tous leurs noms, Georgette Mazia n’oublie pas une chose : «J’étais aimé. J’étais dur, mais j’étais aimé. »

Le Club des femmes d’outre-mer a également souligné Ludjy Fontigen, seule femme grutier de Guyane. Retrouvez son portrait ici.

 
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