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Actualités éditoriales
Publié le
6 décembre 2024 à 21h22
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Sur les murs des maternités françaises, les affiches conseillant aux nouveaux parents d’emmener leur bébé chez un ostéopathe se multiplient, au grand désarroi de nombreux professionnels de santé qui dénoncent l’inutilité, voire la dangerosité de cette pratique.
Tétées difficiles, pleurs nocturnes, constipation, coliques, ballonnements… Les motifs de consultation affichés par les ostéopathes pédiatriques sont très divers. Mais surtout très fréquent chez les nouveau-nés. Une tendance qui inquiète les professionnels de santé.
“Pas besoin d’une consultation à 60 euros pour soulager un enfant qui a des gaz”
« Ces séances ne servent tout simplement à rien », assène Christèle Gras-Le Guen, pédiatre et porte-parole de la Société française de pédiatrie. « Tous ces symptômes sont physiologiques et disparaissent naturellement vers quatre mois. »
Sur les réseaux sociaux, les vidéos d’ostéopathes manipulant des bébés sont très populaires. Sur TikTok, celles de David Yaiche – alias Monsieur Prout -, qui « libère bébé de ses gaz », cumulent jusqu’à 40 millions de vues.
Un enfant qui semble soulagé, des parents satisfaits, mais rien de miraculeux, selon le président du Conseil national de l’ordre des masseurs-kinésithérapeutes. « C’est juste un massage abdominal, du simple bon sens qu’on explique à la maternité. Il n’est pas nécessaire de faire une consultation coûtant 60 euros en moyenne pour soulager un enfant qui a des gaz”, précise Pascale Mathieu.
Les ostéopathes qui proposent ces séances ne cherchent qu’à développer leur activité en surfant sur l’anxiété des parents.
Législation respectée ?
En France, les ostéopathes ne sont pas considérés comme des professionnels de santé. Leurs consultations ne sont pas remboursées par l’Assurance Maladie mais certaines mutuelles les prennent en charge.
Dans le cas des nourrissons de moins de six mois, les manipulations du crâne, du visage et de la colonne vertébrale sont strictement interdites sans certificat médical de non contre-indication.
Cette condition n’est “jamais appliquée en pratique”, selon la présidente des Ostéopathes de France, Dominique Blanc, qui explique que “les médecins ne veulent pas prendre leurs responsabilités”.
« Les parents amènent encore leur bébé avant six mois et, à ma connaissance, il n’y a jamais eu le moindre problème », affirme-t-il.
De son côté, la pédiatre Christèle Gras-Le Guen affirme que certaines manœuvres seraient potentiellement dangereuses, et explique avoir été confrontée à plusieurs reprises à des bébés qui éprouvaient un inconfort « pendant ou après des séances d’ostéopathie ».
“Sans fondement”
Dans son dernier rapport sur l’ostéopathie, l’Inspection générale des affaires sociales a évoqué la nécessité d’un « registre des accidents graves résultant de ces pratiques ».
Sur leurs sites, certains ostéopathes pédiatriques affirment pouvoir soigner « Le syndrome du baiser», qui se manifesterait par des pleurs répétés et une posture cambrée, liée à un blocage au niveau de la nuque.
Problème : « Cela n’existe pas. Il ne s’agit pas d’un diagnostic médical. On donne le nom de syndrome aux symptômes courants chez le nourrisson », s’insurge Fabienne Kochert, pédiatre libérale et ancienne présidente de l’Association française de pédiatrie ambulatoire.
Face à certains dérives de la profession, l’Académie française de médecine a rappelé cette semaine que les pratiques d’ostéopathie viscérale et crânienne sont « sans fondement scientifique avéré », avec une efficacité et une sécurité « non prouvées ».
Concernant la plagiocéphalie – déformation de la tête du nourrisson et motif fréquent de consultation – la Haute autorité de santé française a réaffirmé à l’AFP que « les données scientifiques ne permettent pas de recommander l’ostéopathie ».
L’Académie française de médecine – dont les avis n’ont pas de valeur juridique mais ont une valeur médicale de référence – a ainsi ” a dénoncé les publicités » promouvoir ces pratiques dans les maternités.
« Si un enfant est en bonne santé, il n’a pas besoin d’un ostéopathe. Et s’il a une pathologie, il a besoin d’un professionnel de santé», résume Pascale Mathieu.
Source : AFP.
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