Le gouvernement italien s’oppose également à la conclusion actuelle de l’accord de libre-échange entre l’Union européenne et le Mercosur. Plusieurs médias italiens l’ont affirmé ce jeudi soir, citant “sources du Palais Chigi”, siège de la présidence du Conseil des ministres.
« En confirmant que l’approfondissement des relations avec les pays du Mercosur doit continuer à représenter une priorité stratégique pour l’Union européenne ainsi que pour l’Italie, tant au niveau politique, économique et industriel, le gouvernement italien considère que les conditions ne sont pas réunies pour souscrire au texte actuel de l’accord d’association UE-Mercosur, et cette signature ne peut avoir lieu qu’à condition d’une protection et d’une compensation adéquates en cas de déséquilibres dans le secteur agricole », précisent ces sources, citées par La presse.
Giorgia Meloni arbitre ainsi entre les positions opposées exprimées le 18 novembre par le ministre italien de l’Agriculture, Francesco Lollobrigida, défavorable à l’accord dans sa forme actuelle, et Antonio Tajani, ministre des Affaires étrangères et vice-Premier ministre, qui s’est dit plutôt favorable. à cela. Et elle le fait au moment même où le président de la Commission européenne s’apprête à conclure politiquement l’accord, lors du sommet du Mercosur en Uruguay où est arrivée jeudi Ursula von der Leyen.
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Giorgia Meloni vient ainsi soutenir la France, dont l’opposition à l’accord “tel quel” » a encore été répété cet après-midi par Emmanuel Macron.
Garanties et indemnisation
L’Italie précise les conditions qui lui permettraient d’accepter l’accord. “Tout d’abord, nous devons nous assurer que les normes européennes en matière de contrôles vétérinaires et phytosanitaires soient pleinement respectées et, plus généralement, que les produits entrant sur le marché intérieur respectent pleinement nos normes de protection des consommateurs et de contrôles de qualité”, rapports La Stampa. « Nous avons alors besoin d’un engagement ferme de la Commission pour surveiller en permanence le risque de perturbation du marché et, dans ce cas, pour activer un système de compensation rapide et efficace, doté de ressources financières substantielles. » poursuivent les sources citées par le quotidien turinois.
« L’éventuel feu vert italien à la signature de l’accord par l’Union européenne reste donc conditionné à l’apport de mesures concrètes et efficaces pour prendre en compte les préoccupations du secteur agricole européen. La souveraineté alimentaire européenne, ainsi que les bénéfices objectifs dus au renforcement des marchés, restent un objectif stratégique du gouvernement italien », concluent-ils.
Le risque d’un désaveu du Conseil de l’UE
Ces conditions ne correspondent pas tout à fait à celles réclamées par les agriculteurs français. Ces derniers – soutenus pour une fois par les ONG – ne se limitent pas à demander des garanties en matière de contrôles aux frontières ou de protection des consommateurs, mais contestent plus radicalement les normes régissant la production agricole dans les pays du Mercosur, sources de leurs yeux de concurrence déloyale. Quant à l’éventuelle mise en place d’un système d’indemnisation des dommages causés aux agriculteurs, elle a déjà été fermement rejetée, comme insuffisante, par l’ensemble des syndicats agricoles français.
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Qu’importe : « De toute façon, cela crée une minorité de blocage au niveau européen », se réjouit une Source gouvernementale française. Car “même si les conditions italiennes ne remettent pas en cause le fond de l’accord (négocié en 2019, ndlr), en l’état des contrôles européens, elles bloquent”, explique la même Source.
La France a en effet déjà réussi à rejoindre la Pologne il y a quelques jours. Avec le non de l’Italie et l’abstention de la Belgique – où le Parlement de la Région bruxelloise s’est prononcé contre l’accord en 2020 et où le gouvernement et le Parlement de Wallonie ont pris position contre le traité début novembre 2024 –, le Conseil n’y parviendrait pas. à obtenir la majorité qualifiée requise (14 pays réunissant 65% des voix), calcule le gouvernement français -démissionnaire-.
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Reste à savoir comment Ursula von der Leyen s’y prendra, qui doit se tenir vendredi selon l’AFP. une conférence de presse conjointe avec les présidents de l’Argentine, du Brésil, du Paraguay et de l’Uruguay, membres fondateurs du Mercosur. Juridiquement, rien ne l’empêche d’annoncer néanmoins la conclusion de l’accord, en prenant le risque politique d’un désaveu ultérieur de la part du Conseil de l’Union européenne.