L’homme se précipite à la barre. Apparence déterminée, front haut et menton délibéré, regard laser focalisé sur le terrain. Bref résumé des faits, mais Hackim est mécontent. C’est donc lui qui donne le ton. «D’accord, je vais vous expliquer les choses», dit-il. Rien du tout, les juges arrêtent immédiatement ce drôle de zèbre, car ce sont eux qui mènent les débats et non l’inverse. L’accusé ravale son agacement et ronge son frein.
De mauvaise grâce. Bien bâti, vêtu d’un treillis vert, il respire la force et la puissance, mais pas particulièrement de violence. « Ce n’est pas la méchante bête », a affirmé son avocat, Me Friha.
Sans doute faut-il cependant se méfier de l’eau calme, car les policiers qui l’ont interpellé en gardent un mauvais souvenir. Six jours d’ITT pour l’un d’entre eux. Fin juin, Hackim circulait dans la vallée de l’Orne lorsqu’il a été contrôlé. Illégal selon Me Friha car au départ il n’avait aucun mobile. Pour une fois, le procureur est d’accord avec elle. Talent vif et dent dure, elle en profite pour dénoncer un « contrôle au faciès ».
« Pensez-vous qu’ils utilisent des Tasers pour s’amuser ? »
Il n’en reste pas moins que les policiers sentent une odeur de drogue très prononcée dans l’habitacle du véhicule, et c’est là que tout bascule et tourne à la bagarre. Hackim se rebelle-t-il ? « J’ai du mal oui, parce que j’ai mal à l’épaule. Je suis brisé partout”, se défend-il. S’est-il ou non opposé à l’arrestation en donnant des coups de pied et des coups de poing violents ? ” Certainement pas. J’ai dit de me menotter devant. Derrière moi, je n’y arrive pas”, insiste-t-il. « Vous avez lutté violemment », insiste le président. ” Certainement pas. Je suis désolé si un officier a été blessé, mais ils m’ont emmené au sol et m’ont donné des coups cinq fois. Il y en a trois sur moi. Maintenant, ils savent qui je suis, ils savent ce que je suis, ils pourraient me menotter de face», insiste Hackim, la voix étranglée par la colère. « Ce n’est pas ce que dit la police. Vous avez utilisé la force. Pensez-vous qu’ils utilisent des Tasers pour s’amuser ? », demande le tribunal. L’échange est tendu, Hackim est exaspéré, et il renvoie le ballon brusquement avec : “J’ai dit : allez les gars, je vous suis.” Tel un chat en alerte, Me Friha dénonce « un dossier plié d’avance », en mode « on se le fera tout seul », et enfin « une interpellation musclée et injustifiée ». Puis, fidèle à son côté claqueuse et espiègle, elle déplore « une attitude de cow-boy ».
-La police a trouvé sur lui, dans ses sous-vêtements, de la résine de cannabis, de l’herbe, de la cocaïne et de l’héroïne. Pour environ 900 euros. Celui-ci devait servir à une soirée festive entre amis. Ils allaient à la fête du Grand-Duc à Luxembourg. Et les écailles retrouvées dans son véhicule, à quoi servaient-elles ? « J’ai choisi ça par hasard. Il y avait ma consommation et un peu celle de mes amis. » Hackim jure qu’il avait arrêté de consommer des stupéfiants, puis il a recommencé à cause des embûches semées sur son chemin. Mort du père, mort du frère… S’il entend déplacer les gens, c’est un échec.
Avec 24 mentions à son casier judiciaire pour des affaires de drogue et de violences, l’adulte sait qu’il est mal parti. Par ailleurs, le procureur soulignera « des justifications qui ne tiennent pas la route ».
Hackim, 48 ans, a été condamné à 18 mois de prison, dont 6 mois avec sursis de deux ans. Visite d’adieu des Grands-Ducs…