Quel est le paysage politique parisien après le premier tour des législatives anticipées ? Alors que la gauche arrive en tête dans la majorité des circonscriptions face à une majorité présidentielle en perte de vitesse, l’extrême droite – dont les scores restent faibles – parvient à qualifier un candidat pour le second tour.
Dans la capitale, la gauche tire son épingle du jeu au premier tour des législatives. La France Insoumise, Europe Ecologie-Les Verts, Parti Socialiste… 9 candidats du Nouveau Front Populaire (ou apparentés) ont été élus dès le premier tour dimanche. Parmi les 18 circonscriptions parisiennes, quatre autres candidats de la gauche unie sont également arrivés en tête.
De son côté, la coalition présidentielle recule dans l’ouest et le centre de la capitale, même si elle arrive en tête dans cinq circonscriptions. Quant à la droite républicaine, elle ne qualifie que deux de ses candidats pour le second tour, dans l’ouest parisien. Comme en 2022.
Du côté du parti présidé par Jordan Bardella, le RN, loin de ses résultats historiques au niveau national, réalise toujours de faibles scores à Paris. L’extrême droite qualifie toutefois un candidat pour le second tour : Louis Piquet, également soutenu par Éric Ciotti, et qui a rassemblé plus de 17,6% des voix au premier tour dans la 14e circonscription, située dans le 16e arrondissement. Il affrontera Patrick Dray (Les Républicains), avec 17,7% au premier tour, et Benjamin Haddad (Ensemble), avec 47,7% au premier tour.
Au total, le RN a obtenu 10,7% des suffrages exprimés à Paris, contre 3,9% au premier tour des législatives de 2022. En deux ans, le parti a ainsi gagné 77 000 voix, et est parvenu à se placer troisième dans quinze circonscriptions. Ses scores les plus élevés ont été enregistrés dans l’Ouest parisien.
«Comme dans les grandes villes en général, on observe encore à Paris une relative faiblesse du RN. L’extrême droite y réussit moins bien que dans les zones périurbaines et rurales.“, analyse Benjamin Biard, chercheur au Centre de recherche et d’information sociopolitique (CRISP) à Bruxelles, et professeur invité à l’Université catholique de Louvain, en Belgique. Ce politologue spécialiste de l’extrême droite ne s’étonne cependant pas de constater que “A Paris, le vote RN reste faible mais progresse encore« .
«Cela reflète la tendance politique plus générale lors de ces élections législatives, il explique. Le parti s’appuie sur son soutien traditionnel, mais parvient aussi à élargir et diversifier son électorat. L’électorat du RN est traditionnellement plutôt masculin, et dispose d’un capital socio-économique, culturel et éducatif plus faible, c’est-à-dire d’un niveau de diplôme plus faible. Mais le parti parvient désormais à trouver davantage de femmes dans son électorat, une tendance initiée depuis l’arrivée de Marine Le Pen à sa tête. Le parti parvient également à trouver davantage de personnes aisées et de retraités que par le passé.«
«Le vote RN est à la fois un vote de soutien et un vote de protestation, l’un n’empêche pas l’autre, rappelle également le politologue. C’est une manière de s’opposer à d’autres partis comme LFI et la majorité macroniste sortante. Mais c’est aussi une manière de protester contre le fonctionnement actuel de la démocratie, avec une défiance envers les institutions. Mais c’est aussi un vote très fort de soutien aux critères essentiels de l’extrême droite : la sécurité, l’immigration, etc. Le parti se positionne aussi sur les enjeux socio-économiques, avec le pouvoir d’achat.«
Au-delà du RN, Benjamin Biard souligne enfin que le large succès de la gauche à Paris «s’explique davantage par la structure sociologique que par le lieu de vie lui-même et le simple fait de vivre en ville« . «Les électeurs de gauche sont surreprésentés à Paris, avec des personnes plus diplômées, au capital socio-économique et éducatif plus élevé que la moyenne.« , résume-t-il.
Pour rappel, en 2022, la majorité présidentielle avait obtenu la moitié des mandats et des candidats de gauche avaient été élus dans l’autre moitié.
