au premier rang, le quartier Marcel-Sembat à Béglais, un îlot de commerces préservés – .

au premier rang, le quartier Marcel-Sembat à Béglais, un îlot de commerces préservés – .
au premier rang, le quartier Marcel-Sembat à Béglais, un îlot de commerces préservés – .

> Cet article est extrait du numéro spécial de 64 pages « Un nouveau pont sur la Garonne », disponible en kiosque et à la boutique « Sud Ouest ». 3,90 €.

Au fond de la cour pavée, les jeunes familles vont et viennent ce mardi soir, jour de livraison des paniers Amap dans les locaux du Radis noir, le café associatif fondé par des habitants en 2011. Point de ralliement incontournable, au 37 bis, rue Pauly, dans le quartier Bègles de Marcel-Sembat, cet îlot de commerces qui s’élève à contre-courant de la formidable croissance immobilière sur ses bords sera le premier à être desservi par le pont Simone-Veil. L’un ne va pas sans l’autre, mais tous deux nourrissent ici des sentiments ambivalents : appréhension, voire défiance, pour la poussée de l’urbanisme vertical, curiosité tout à fait naturelle pour le nouvel horizon floiracois.

DONC

Auchan et Leroy Merlin attireront sans doute de nouveaux clients le long des boulevards, mais, spontanément, au Radis noir, c’est l’Arkéa Arena qui prend la tête parmi les nouvelles destinations évoquées au départ de Marcel-Sembat. « La forêt de La Burthe, à Floirac, de très jolis endroits vers l’île des Arcins », complète Anne, fonctionnaire locale, une trentenaire prête à enfourcher son vélo le dimanche en famille. Un sac de légumes sous le bras, deux jeunes enfants dans son sillage, Leslie y voit une autre vertu, terre à terre : « Ça va quand même dégager les quais », veut-elle croire.

« L’esprit village urbain »

Dans « le meilleur quartier du monde », comme le dit Anne, qui habite un appartement à La Scala, l’une des rares résidences de Marcel-Sembat, l’arrivée du pont, « c’est parfait », loue volontiers Yannick Grandjean, l’un des membres fondateurs de Radis noir, 51 ans, ingénieur qualité dans l’aéronautique. « Ça va vers l’autre, et c’est aussi l’autre qui vient vers toi. » Il avoue toutefois être « un peu dans l’expectative » : « Pour nous, c’est le côté urbain qui prime, et on essaie de garder l’esprit “village urbain”, comme le dit le slogan de la Ville. C’est une vraie croyance chez nous, on aimerait diffuser cette bonne humeur, une certaine idée du cosmopolitisme », défend-il.


Rue Pauly, au coeur du quartier Marcel-Sembat, devant les portes du Radis noir, avec vue sur les collines de la rive droite en arrière plan.

Fabien Cottereau/SO

Quartier fièrement « citoyen », traversé par diverses associations, du comité de quartier aux Radis noir, en passant par le Jardin éphémère, autre pôle militant, Marcel-Sembat est historiquement ancré à gauche. Un coup d’œil sur les résultats des dernières élections européennes pour s’en convaincre : le bureau de vote numéro 6 a affiché 23 % des voix pour Glucksmann (PS-Place publique), 16,7 % pour Toussaint (EELV), 14 % pour Bardella (RN), 13,8 % pour Aubry (LFI), 13,1 % pour Hayer (majorité présidentielle) ou encore 4,6 % pour Deffontaines (PC) (1).

Si Yannick Grandjean exprime, en filigrane, la crainte de voir l’identité de Marcel-Sembat mise à mal, c’est que le pont Simone-Veil renvoie rapidement aux contours en pleine effervescence de l’ancien quartier ouvrier. Après avoir investi les abords de la gare Saint-Jean et la rive droite, l’établissement public d’aménagement Euratlantique s’attèle sur les 77 hectares de la future zone d’aménagement concertée (ZAC) promise à Bègles, au niveau des quais. Un enjeu crucial : entre 4 000 et 5 000 logements y sont annoncés d’ici à 2040.

Sentiment « mitigé »

Le pont, qui relie le périmètre Euratlantique entre Bordeaux, Floirac et Bègles, laisse un sentiment « mitigé » à Virginie, 43 ans, coordinatrice dans le domaine médico-social : « Je ne veux pas de tours de huit étages autour de ma maison. Un pont, c’est l’émergence du quartier, et d’Euratlantique. On n’est pas contre la densification urbaine, mais il y a une limite : on ne pourra pas accueillir correctement les gens ici. » A ceux qui seraient tentés de qualifier le front de Marcel-Sembat de « village gaulois » entouré d’arbres, Yannick Grandjean s’oppose résolument à la nécessité « d’accompagner les aménagements ».

Mais, échaudés par les choix urbanistiques qui ont présidé au remaniement d’Amédée-Saint-Germain, à Bordeaux, de l’autre côté des boulevards – minéralité et nombre d’étages des immeubles –, deux collectifs d’associations du quartier, Ville 3D et Euratlantide, veillent sur l’avenir de la ZAC béglaise, quitte à dépasser, sur sa gauche, Clément Rossignol Puech, le maire écologiste et, accessoirement, président du conseil d’administration de l’EPA Euratlantique.

Crise du logement

Les avis restent toutefois partagés, y compris en ce qui concerne la livraison des paniers de fruits et légumes quotidiens. Anne, encore : « Je trouve tout ce dont j’ai besoin à moins de 500 mètres. Des événements tous les week-ends et des gens formidables, un esprit social, et un mélange fou à l’école, des enfants de familles qui vivent dans des squats et d’autres qui ont des piscines », illustre-t-elle dans un élan d’enthousiasme. « Tout le monde n’a pas la possibilité de vivre son engagement écolo. Même à la campagne, il faut prendre la voiture. »

« Je ne veux pas avoir de tours de huit étages autour de ma maison. Qui dit pont dit émergence du quartier, et dit Euratlantique »

Un plaidoyer qu’elle ne peut se résoudre à opposer aux projets d’Euratlantique : « On connaît la crise du logement, et je ne suis pas contre l’idée d’accueillir de nouvelles personnes, ni contre l’idée de voir des immeubles monter en hauteur. » Après le pont Simone-Veil, un autre pont devra être construit entre le « vieux » Marcel-Sembat et l’Euratlantique à Béglais, mais il faudra le faire en termes d’urbanisme.

(1) Au niveau national : 13,8% pour Glucksmann, 5,5% pour Toussaint, 31,4% pour Bardella, 9,9% pour Aubry, 14,6% pour Hayer et 2,4% pour Deffontaines.

 
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